Naissance
d’une pensée navale : Schrijver, Van Bylandt et Vaillant
L’amiral Cornelis Schrijver (1686-1768)
fut le premier à se plaindre de cette situation d’inertie. Il fustigea
l’ignorance de ses compatriotes. Il écrivit plusieurs mémoires sur
l’état de la flotte et devint le conseiller du prince Guillaume IV d’Orange
pour les questions navales1.
Dans son rapport de commandement des années 1747-1748, il vanta les
connaissances théoriques des officiers français. Il s’efforça dès
lors de faire traduire les meilleurs traités navals étrangers,
essentiellement français, et de les diffuser en Hollande2.
La plupart de ses contemporains se montrèrent indifférents ou hostiles
à son projet. Certains applaudirent cependant, et en premier lieu le
comte Lodewijk van Bylandt (1718-1793).
Celui-ci était un des rares officiers de
marine dont l’amiral Schrijver avait loué les connaissances et le zèle,
après l’avoir vu servir sous ses ordres dans les Antilles. Van Bylandt
participa à des expéditions contre les Barbaresques et se battit contre
les Anglais de 1781 à 1783. En 1767, il avait fait paraître le premier
ouvrage néerlandais de tactique navale3.
Il s’agissait essentiellement d’une traduction de la Tactique
navale du Français Bigot de Morogues4.
La première partie de l’ouvrage décrivait les formations et les manœuvres
lors des batailles, à l’aide de croquis. La seconde détaillait les
signaux et les manières de les utiliser. Van Bylandt ajouta des annexes
à l’ouvrage de Bigot et le simplifia, en particulier à propos des
signaux5. Bien que coûteux,
le manuel de van Bylandt connut un grand succès et fut vite épuisé. Ce
fut pendant plusieurs années le seul ouvrage néerlandais où les
officiers de marine pouvaient apprendre la tactique6.
En 1786, le capitaine Jan Olphert
Vaillant (1751-1800) suivit l’exemple de van Bylandt7.
Il publia un Traité de l’effet du vent et de la mer sur les navires
qui était en partie la traduction d’un autre ouvrage français, Le
manœuvrier de Bourdé de Villehuet8.
Rappelons que ce dernier, comme Bigot de Morogues, prônait la traversée
de la ligne adverse mais se distinguait par son insistance sur
l’abordage9.
Au cours de la deuxième moitié du
XVIIIe siècle, plusieurs mesures furent prises qui contribuèrent à
renforcer le professionnalisme des officiers de marine hollandais :
la solde fut fixée de manière plus précise, on instaura des examens
d’avancement, un uniforme fut introduit et une Ecole de marine (Kweekschool
voor de Zeevaart) fut mise sur pied. En 1781 parut le premier traité
néerlandais sur les signaux pour une flotte de guerre10.
Il rompait avec la pratique ancienne où l’emplacement du signal déterminait
la signification. Cela entraînait un progrès certain dans la tactique
navale, au moment où les Britanniques et les Français faisaient de même.
Van
Kinsbergen : les Fondements de la tactique navale
Jan Hendrik van Kinsbergen (1735-1819)
fut le premier Néerlandais à écrire un traité original de tactique
navale. Il était le fils d’un sous-officier d’infanterie d’origine
allemande. A l’âge de neuf ans, il fut enrôlé par son père et
participa à la guerre de Succession d’Autriche. Après la paix
d’Aix-la-Chapelle, il fréquenta une école populaire. Il s’y
découvrit une passion pour la marine après avoir lu une biographie de de
Ruyter. Découvrant les dons et l’intelligence de son fils aîné, son
père parvint à lui faire suivre à l’université de Groningen des
cours de langues, de navigation, de mathématiques. A quinze ans, Jan
Hendrik fut nommé aspirant. Il eut l’occasion de servir sous van
Bylandt. En 1770, à l’invitation de Catherine II, il se mit au
service de la Russie. Il accomplit de nombreux faits d’armes, dont le
plus célèbre fut le combat du 2 septembre 1773 en mer Noire.
Avec cinq navires, il brisa la ligne ennemie et coula le vaisseau amiral
turc. Il aurait à cette occasion appliqué les manœuvres préconisées
dans ses Fondements de la tactique navale, qu’un de ses
lieutenants publiera plus tard et sur lesquels nous reviendrons. Cet
exploit lui valut l’ordre de Saint-Georges et le titre de “héros de
la mer Noire”11.
Il regagna les Provinces-Unies en 1775 et
reprit du service. Il fut chargé de négocier la paix avec le Maroc. Sa
réputation l’y avait précédé et il s’acquitta brillamment de cette
mission. Le 5 août 1781, il commandait un vaisseau de ligne de
48 pièces sous les ordres de l’amiral Zoutman à la bataille du
Doggersbank contre les Anglais. Bien qu’inférieurs en nombre, les
Hollandais résistèrent et contraignirent leurs adversaires à se
retirer. Kinsbergen fut salué comme un des vainqueurs du Doggersbank. En
1787, il préféra demander un congé à durée indéterminée lorsque les
Prussiens vinrent réprimer l’agitation des “patriotes” et soutenir
la maison d’Orange12.
Après avoir repoussé plusieurs offres de servir la Russie et le
Danemark, il fut élevé au grade de vice-amiral. En 1793, au début de la
guerre contre la France, il reçut le commandement suprême de la marine
néerlandaise. Il en profita pour améliorer la formation des cadres, la
tactique et l’administration. Il fut démis de ses fonctions au moment
de la conquête française de 1795 et offrit ses services au Danemark
jusqu’en 1806. Il accepta alors les fonctions de conseiller d’Etat et
de chambellan auprès du roi Louis Bonaparte et devint ensuite
“maréchal extraordinaire” de la marine hollandaise et comte du
Doggersbank. Napoléon l’avait en haute estime. Il le fit comte de l’Empire
puis sénateur. Van Kinsbergen mourut à Appeldoorn en 1819, âgé de
quatre-vingt-quatre ans.
Il a laissé plusieurs ouvrages de
tactique et de technique navale qui ont beaucoup contribué à un plus
grand professionnalisme du corps des officiers de marine
néerlandais : Ordres et brèves instructions pour le service de
guerre en mer (1761), Usage de l’artillerie et des armes à feu
sur les ponts inférieur et supérieur (1781), Le service à bord
d’un navire, sur frégate et vaisseau de ligne (1782), Manuel du
marin (1782), Rêves d’un marin sur la nécessité de maintenir
un corps permanent de matelots (1782), Pratique de l’artillerie
maritime (1797), Grand recueil des signaux de jour et de nuit
(1797), Introduction à la guerre sur mer (1798)13.
Le principal ouvrage de Kinsbergen est
intitulé Fondements de la tactique navale14.
Dédié aux princes d’Orange-Nassau, il expose d’abord la définition
généralement admise de la tactique navale : “l’art qui
apprend à faire exécuter aux flottes, selon des règles bien précises,
tous les mouvements utiles en fonction du temps, du vent, de la mer et du
lieu”. Pour Kinsbergen, la tactique navale embrasse tout ce qui a
trait à la marine militaire et elle se divise en deux parties. La
tactique élémentaire recouvre le détail des instructions, de la
discipline et des exercices navals : les principes en sont exposés
dans son ouvrage sur le service à bord. La tactique supérieure désigne “l’art
ou la science de l’amiral” : les manœuvres et les mouvements
qui peuvent être exécutés par des navires dans un combat, pour
effectuer ou couvrir un débarquement, pour protéger une côte ou
investir une fortification côtière15.
Cette deuxième partie, précise Kinsbergen, a été étudiée par le
comte van Bylandt avec lequel il a lui-même travaillé.
La division en deux parties fait penser
à Guibert, qui parlait lui aussi de tactique élémentaire et de grande
tactique, “science des généraux”16.
Il n’est pas impossible que Kinsbergen ait eu connaissance de l’Essai
général de tactique, dont la première édition parut justement en
Hollande, à Leyde, en 1770.
Selon Kinsbergen, un grand amiral doit
posséder cinq qualités principales : un courage serein ; une
connaissance approfondie des deux branches de la tactique navale et
surtout de la seconde ; beaucoup d’expérience et de présence
d’esprit ; la connaissance du cœur humain et la capacité
d’allier la sévérité à la bonté ; la connaissance des
positions politiques et commerciales de sa patrie et de ses relations avec
les puissances étrangères17.
Avec l’apparition de la poudre et du
canon, écrit Kinsbergen, tout le problème de la tactique navale est
devenu celui du plus grand côté du navire qu’il faut chercher à
présenter à l’ennemi, tout en évitant le sien. Pendant longtemps au
XVIIe siècle, on a encore combattu sans ordre : il ne fallait pas
attendre longtemps pour que les flottes s’interpénètrent. Les grands
héros néerlandais, Tromp et de Ruyter, tiraient parti de cette confusion
et y déployaient leurs compétences supérieures en attaquant les
vaisseaux ennemis tantôt par l’avant, tantôt par l’arrière.
L’expérience a progressivement démontré les avantages d’une ligne
bien fermée et on est allé jusqu’à la rendre pratiquement hermétique
en laissant le minimum d’espace indispensable18.
Parallèlement, les vaisseaux de ligne sont devenus de plus en plus grands
et de plus en plus armés, ce qui est devenu difficile à suivre pour les
Néerlandais. Kinsbergen termine l’introduction à son ouvrage en
souhaitant que la tactique navale puisse arriver au même niveau que celui
atteint par la tactique terrestre avec Frédéric II19.
Trente-neuf pages sur les
quatre-vingt-onze que comptent les Fondements de la tactique navale
sont consacrées aux différentes manœuvres de navigation nécessaires à
la marche d’une flotte : comment arranger la ligne de bataille au
vent ou sous le vent, comment éviter l’enfilade, comment rétablir la
ligne de bataille, comment former une arrière-garde, faire marcher la
flotte en trois colonnes, organiser la retraite, etc.20
Viennent ensuite des considérations sur la protection des convois, la
contestation du vent à l’ennemi, la manière de forcer un ennemi au
combat, de le doubler ou de l’amener entre deux feux ou de l’empêcher
de le faire lui-même. Kinsbergen aborde le problème de la percée de la
ligne ennemie : quand une ouverture a été détectée, il faut
attaquer avec des frégates les vaisseaux de l’avant ou de l’arrière.
L’ouvrage se termine par quelques considérations supplémentaires sur
la bataille et sur les façons d’attaquer une avant-garde, une
arrière-garde ou un corps de bataille21.
Les Hollandais attribuent parfois à
Kinsbergen cette nouvelle façon de livrer bataille en perçant la ligne
ennemie, adoptée ensuite par les Anglais22.
La fierté nationale les égare sans doute. Sur le plan théorique, ce
sont les Français Bigot de Morogues et Bourdé de Villehuet – le
second plus franchement que le premier – qui ont exposé les
premiers cette tactique. C’est avec la guerre d’Indépendance
américaine que la règle sacro-sainte de la ligne fut vraiment remise en
cause par Suffren, de Grasse et Rodney. Il revint à l’Ecossais Clerk of
Eldin de systématiser, sur le plan théorique, la révolution tactique
que Nelson mènerait à son terme sur le plan pratique23.
Kinsbergen se rattachait en tout cas à ce courant de pensée qui prônait
une tactique plus offensive et plus audacieuse. En cela, il se montrait le
digne héritier de de Ruyter. Outre celui-ci, ses modèles étaient Tromp
et Frédéric II de Prusse : sa cabine était toujours ornée de
leurs portraits24. Sur
le plan théorique, il s’est d’abord appuyé sur van Bylandt, qui
avait traduit Bigot de Morogues. L’influence française est indéniable
dans les Grondbeginselen der zee-tacticq. Nombre de termes
français ne sont pas traduits en néerlandais, comme “het Elementaire
Zee-Tacticque”, peut-être repris à Guibert (la tactique
élémentaire), “manœuvres”, “bataille”, “enfilade”,
“arriere guarde” (sic), “colonnen”, “corps de bataille”.
“March-order” et “contra-march” semblent en revanche repris à
l’anglais.
Les Fondements de la tactique navale
de Kinsbergen connurent un grand succès. Ils furent traduits en allemand
et en russe25. En 1850,
les officiers de la marine prussienne en utilisaient encore une traduction26.
L’ouvrage était très maniable ; il était plus court que celui de
van Bylandt, qui avait déjà simplifié Bigot de Morogues. Comme le
montre la liste de ses œuvres citées plus haut, Kinsbergen écrivit de
nombreux ouvrages plus techniques sur la navigation. Son Manuel du
marin et son livre sur les signaux étaient encore en usage dans la
marine hollandaise au milieu du XIXe siècle27.
Il semble que les Hollandais, peuple de
marins s’il en est, furent plus innovateurs dans les techniques de
navigation que dans la tactique et la stratégie navale. Les Hollandais
n’étaient pas des théoriciens. Les Britanniques, avant Clerk, ne
l’étaient pas davantage en dehors de leurs Fighting Instructions
et ils traduisaient eux aussi des ouvrages français28.
Pour les Hollandais, la mer a toujours fait partie de l’existence et la
marine ne s’est développée sur le plan militaire que comme une
activité maritime de plus, en étroite symbiose avec la marine marchande
dont vivait l’ensemble du pays. Un des apports essentiels de Kinsbergen
fut justement d’avoir rendu la marine plus militaire29.
Son influence fut profonde sur le corps des officiers de marine. Avec lui,
ceux-ci furent désormais de véritables professionnels.
De Winter et la période
française
L’enseignement de Kinsbergen perdura
durant la “période française” (1795-1814), principalement à travers
son disciple Carel Hendrik Verhuell (1764-1845). Celui-ci commanda la
flotte de la République batave en 1803 puis occupa les fonctions de
secrétaire d’Etat à la Marine en 180530.
Mais c’est l’amiral Jan Willem de
Winter (1761-1812) qui fut le grand personnage de cette époque.
Lieutenant de marine, il s’était réfugié en France après le
soulèvement “patriote” contre le stadhouder en 1787. Il revint au
pays dans les fourgons de l’armée française, avec le grade de
général de brigade. Alors qu’il avait très peu d’expérience en
mer, il fut nommé commandant en chef de la flotte batave le 26 juin 1795.
Deux ans plus tard, il se faisait battre par les Anglais à Kamperduin (Camperdown),
au large de l’île de Texel. Cela ne l’empêcha pas, dans la suite,
d’occuper encore de hautes fonctions : son loyalisme à la cause
française compensait sa relative médiocrité. S’il était brave et
valeureux, de Winter n’était pas capable de commander une flotte31.
Durant la période française, la pensée
navale hollandaise se contente toujours de traductions. En 1799 sort une
version néerlandaise de L’art de la guerre sur mer ou tactique
navale du chef de division Grenier32.
En 1806, de Winter traduit l’Essay on Naval Tactics de Clerk of
Eldin33. Tout se passe
comme si de Winter avait recherché les causes de sa défaite de
Kamperduin : Clerk avait, le premier, exposé la théorie de la
percée de la ligne ennemie, pratiquée par Rodney aux Saintes, Duncan à
Kamperduin, Nelson à Trafalgar. De Winter affirme que si la marine batave
s’inspire des innovations techniques et tactiques des Anglais, elle
retrouvera son lustre d’autrefois34.
Les Hollandais, comme les Anglais, ont une inclination naturelle pour la
navigation. La géographie en a fait deux peuples de marins35.
Le type de gouvernement a également son influence mais, à ce propos, les
Hollandais ont trop longtemps souffert de leurs divisions internes. De
Winter en appelle à un gouvernement républicain énergique qui referait
l’unité et ressusciterait les vertus nationales.
M. H. Jansen et la révolution
technique du XIXe siÈcle
Le contre-amiral (schout-bij-nacht) Marin
Henri Jansen (1817-1893) fut un des officiers de marine les plus
intéressants du milieu du XIXe siècle. De sa propre initiative, il
alla étudier les institutions navales françaises, britanniques et
allemandes. Il entra en relation avec Dupuy de Lôme en France et fut
l’ami de Matthew Fontaine Maury, le principal penseur naval américain
avant la guerre de Sécession36.
Jansen fut celui qui, aux Pays-Bas, annonça et introduisit la révolution
technique dans la guerre navale. Ses idées furent exposées dans un
ouvrage intitulé La révolution dans la marine. Une contribution au
maintien de l’indépendance37.
Il prétendait qu’il n’était pas nécessaire pour les Pays-Bas de
rechercher les meilleurs vaisseaux cuirassés. Il suffisait de pourvoir à
la défense du pays et des Indes orientales. Pour de moindres dépenses,
pensait-il, on serait plus fort qu’auparavant. Une commission mise sur
pied par les ministères de la Guerre et de la Marine adopta la plupart
des idées de Jansen38.
Il répandit l’usage des mines et fit mettre en service le premier
cuirassé de la marine néerlandaise.
Dans ses mémoires, Jansen dépasse les
questions technico-tactiques pour atteindre la stratégie. Il rapporte que
lors d’un entretien avec le roi Guillaume II vers 1850, il avait
souligné que, si l’Angleterre restait l’allié essentiel,
l’indépendance des Pays-Bas ne pourrait être assurée sans une
défense propre. Seule cette capacité de défense permettrait de faire
appel à un allié. Jansen estime que ce fut souvent une erreur de se
placer sous la seule protection d’une grande puissance. Napoléon avait
dit que les Hollandais attachaient beaucoup de prix à leur indépendance
mais ne voulaient rien faire pour la conserver. Selon Jansen,
Frédéric II de Prusse avait une vue plus exacte lorsqu’il
qualifiait la Hollande de “barcasse remorquée par le navire de ligne
Angleterre”. Jansen pensait qu’il en était de même de la Belgique.
Si l’Angleterre lâchait les amarres, celle-ci serait vite annexée par
la France et les Pays-Bas le seraient par l’Allemagne. Il faut donc,
pense Jansen, s’accrocher solidement à l’Angleterre. La Hollande doit
être un bastion de l’Angleterre sur le continent et doit entretenir une
flotte susceptible d’aider les Anglais aux Indes pour leur permettre de
peser davantage en Europe39.
Jansen incarna parfaitement un certain
type d’officier de marine hollandais, au caractère indépendant et
entreprenant. Les institutions ne semblent pas avoir joué un si grand
rôle dans le développement de la pensée navale hollandaise. Celle-ci a
plutôt évolué au gré des personnalités. Jansen a été proposé en
exemple aux jeunes officiers par l’éditeur de ses mémoires. D’après
celui-ci, la “méthode” de Jansen, qui consistait à saisir toutes les
occasions, permettait d’aller plus loin que tous les enseignements des
écoles de guerre40. On
reconnaît bien là la tradition de Tromp et de Ruyter.
Débats tactiques de
la fin du XIXe siècle
Aux Pays-Bas comme ailleurs, la
généralisation de la navigation à vapeur, l’apparition de la cuirasse
et de la torpille, la réapparition de l’éperon suscitèrent des
débats. Mais ceux-ci furent tardifs et, en dehors de ce qui a été dit
de M. H. Jansen, ils ne donnèrent pas lieu à une percée
théorique originale. La longue guerre d’Aceh (ou Atjeh) contre les
pirates du détroit de Malacca (1873-1902) coûta très cher et retarda la
construction de cuirassés au profit de canonnières et de torpilleurs. La
pensée navale hollandaise de cette époque s’accordait dans les faits
avec les idées de la Jeune Ecole en France41.
Ce n’est qu’à l’extrême fin du siècle que l’on vit paraître de
nouveaux ouvrages néerlandais de pensée navale. La montée en puissance
du Japon commençait alors à inquiéter le gouvernement de La Haye,
préoccupé par la défense des Indes néerlandaises42.
En 1897, la Marine-Vereeniging (Association de la Marine) organisa
un concours sur les questions de tactique navale. Quelques jeunes
officiers y participèrent43.
Parmi eux, le lieutenant de première classe E. de Haan.
Son travail est publié en 1900 sous le
titre “Considérations sur la tactique navale”44.
Il part du principe que les nouveaux moyens diffèrent trop des anciens
pour qu’il soit nécessaire de partir de l’histoire. Les batailles
récentes de Lissa (1866), Yalu (1894) et Cavite (1898) ont apporté
quelques enseignements à propos des manœuvres mais celles-ci peuvent
aussi s’apprendre par l’étude théorique45.
La tactique navale se définit comme l’étude des moyens et des
circonstances qui permettent, lors d’une rencontre avec une flotte
ennemie, d’infliger à son adversaire le plus de dégâts possible tout
en s’exposant le moins. Elle dit de quelle façon le commandant en chef
doit agir. Le coup d’œil personnel est cependant plus important que
l’obéissance stricte à des prescriptions.
De Haan reproche à la Jeune Ecole
française sa conception trop matérielle de la guerre : selon lui, il
faut d’abord chercher à neutraliser l’équipage, le forcer à rendre
ses armes, plutôt que détruire les machines ; il n’est plus
question, non plus, d’exterminer l’équipage adverse46.
Notons que cette conception très moderne et très “civilisée” de la
guerre reflète bien une mentalité néerlandaise qui, au cours du XIXe siècle,
ne partage pas les aspirations impérialistes des grandes puissances
européennes.
Après avoir conclu que le cuirassé,
comme le torpilleur, a son utilité, de Haan aborde vraiment la tactique
dans un chapitre consacré à l’emploi des vaisseaux. Il insiste sur la
nécessité pour un officier de s’adapter aux circonstances, malgré les
ordres reçus. Il faut souvent agir sous sa propre responsabilité, dans
l’esprit de son chef. Alors qu’il aurait pu penser à Tromp et de
Ruyter, de Haan cite le duc de Wellington. Il met cependant en garde
contre les entreprises trop audacieuses. Une ruse de guerre comme celle
des Anglais à Trafalgar n’est possible qu’avec des équipages aussi
entraînés que ceux de Nelson47.
De Haan se veut plus prudent que les Anglais. Il se distingue également
de ceux-ci à propos de la mêlée. L’amiral Colomb préconisait de
garder la formation le plus longtemps possible et d’éviter la mêlée
à tout prix. De son côté, l’amiral Aube, dans L’avenir de la
Marine française, écrit que la mêlée survient très vite au
combat. C’est alors par l’habileté du commandant en chef plutôt que
par les prescriptions tactiques que la décision peut être emportée.
Pour de Haan, la mêlée est souvent plus avantageuse pour le plus faible
et elle ne doit pas être exclue48.
Dans sa conclusion, le lieutenant de Haan
déclare que l’Angleterre ne peut servir d’exemple qu’en matière de
construction navale, d’équipement et de pratique de la navigation. En
dehors de cela, aucune autre puissance navale ne peut la suivre. La
révolution technique et scientifique du XIXe siècle a bénéficié
aux Allemands qui, par nature, ne sont pourtant pas des marins.
L’Allemagne constitue donc un meilleur modèle, surtout en ce qui
concerne l’organisation et la préparation de la guerre. De Haan termine
son étude par un appel aux “forces morales”. Si les Autrichiens ont
triomphé à Lissa, c’est grâce à leur sang-froid, leurs
connaissances, leur courage, leur sentiment de l’honneur national.
Tolstoï dit la même chose dans Guerre et paix : c’est
l’âme russe qui a gagné. Même pour une petite nation, il n’y a pas
de tâche impossible : “Ne désespérez jamais” disait Jan
Pieterszoon Coen (1587-1629), le fondateur de la puissance néerlandaise
en Indonésie49.
Putman Cramer :
la stratégie d’une petite puissance
En 1913, le lieutenant de première
classe G. J. W. Putman Cramer publie un ouvrage basé sur
son enseignement à l’Institut royal de la Marine (Koninklijk
Instituut voor de Marine)50.
Nous ne développerons ici que la partie consacrée à la stratégie.
Comme tout bon théoricien, Putman Cramer
débute par quelques réflexions sur les définitions de l’art de la
guerre, de la stratégie et de la tactique. L’art de la guerre n’est
pas une science positive, bien qu’il rassemble des principes et des
règles qui restent des vérités inébranlables. Il y a par ailleurs un
aspect de changement constant, dû à l’évolution de l’armement.
L’art de la guerre comprend les sciences de la guerre, dont les
principales sont la stratégie et la tactique, et dont les auxiliaires
sont l’histoire militaire et l’histoire de la marine.
Pour définir la stratégie, Putman
Cramer cite Moltke, Clausewitz et surtout Darrieus : c’est la “préparation
à l’objectif : la bataille” ; il s’agit de “s’assurer
la supériorité sur une partie définie du théâtre de la guerre”.
La tactique vise la même chose sur le champ de bataille. L’amiral Mahan
est invoqué à propos de la stratégie maritime : celle-ci doit
viser, en temps de paix comme en temps de guerre, au soutien et à
l’accroissement de la force navale du pays. Pour Mahan, c’est le
“contact” qui trace la frontière entre la stratégie et la tactique.
Selon Putman Cramer, la stratégie doit préparer la guerre en temps de
paix, la bataille en temps de guerre. Il estime que les Pays-Bas, si la
science de la guerre y est étudiée, ne seront pas immédiatement
écrasés par une plus grande puissance en cas de guerre. En 1906, une
“Association pour la promotion de la science de la guerre” a réclamé
un enseignement sur ces questions dans chaque université néerlandaise51.
Putman Cramer fait une comparaison avec
le football pour illustrer la différence entre la stratégie et la
tactique. A la première revient le choix des joueurs, leur préparation
physique et l’attribution des places convenant le mieux à leurs
capacités. La tactique choisira le meilleur côté du terrain, en
fonction de la direction du vent et de la position du soleil (mieux vaut
l’avoir dans le dos). Elle mettra en place les joueurs, à l’attaque,
au milieu ou en défense52.
Le chapitre II est le plus
intéressant de l’ouvrage. Il est consacré aux liens entre la politique
et la stratégie. L’organisation des forces d’un Etat, écrit Putman
Cramer, doit partir des circonstances géographiques. En second lieu, il
s’agira de tenir compte des intérêts politiques et économiques en
dehors du territoire national. Les guerres peuvent naître de conflits
d’intérêts politico-économiques. La stratégie du temps de paix est
la tâche des hommes politiques. Elle doit prévoir ces éventualités, en
restant subordonnée à la politique. Par contre, la politique ne doit pas
intervenir dans la stratégie de guerre. Mais pour les petites puissances,
précise Putman Cramer, ceci ne vaut que partiellement car leur politique
ne suit pas vraiment une direction particulière. Si elles entrent dans un
conflit, c’est qu’elles y sont forcées par le viol de leur
neutralité, une attaque de leur territoire ou d’une de leurs
possessions. Les petites puissances doivent étudier les cas les plus
probables, en suivant de près le développement des autres Etats et celui
de leurs forces.
Pour un petit pays, il est important de
pouvoir compter sur un allié puissant. Les forces seront donc organisées
en fonction de ce que l’on pourra apporter à cet allié. Mais la
politique étrangère des Pays-Bas repose sur la neutralité. Elle suppose
de bons rapports avec toutes les puissances, pas d’alliance militaire.
En faisant allusion à Mahan, Putman Cramer souligne la faiblesse des
alliances. Pour une petite puissance, la protection d’un grand allié ne
sera jamais désintéressée. Une alliance des Pays-Bas avec une grande
puissance pour le maintien du statu quo en Asie du Sud-Est peut être
intéressante, mais seulement si les Pays-Bas disposent d’une flotte
suffisamment importante à cet effet53.
La stratégie maritime consiste d’abord
à déterminer la puissance navale et ses éléments. La composition de la
flotte sera fonction de ses missions et ceci est une affaire politique.
C’est l’élément principal de toute stratégie maritime et cela doit
dominer toute la politique maritime. Interviennent à ce niveau des
impératifs de budget, de matériel et de personnel. En 1912, la marine
hollandaise envisagea une flotte de gros cuirassés pour la défense des
Indes, mais le Parlement objecta l’impossibilité de trouver un nombre
suffisant de volontaires pour équiper ces bateaux.
L’essence de la guerre est
irrationnelle, écrit Putman Cramer. La seule bonne préparation consiste
à utiliser tous les moyens disponibles pour augmenter la force militaire.
Il ne faut pas prendre comme point de départ le budget disponible mais
bien le niveau de forces nécessaire : l’analyse doit être
stratégique. Putman Cramer connaît le caractère de ses compatriotes.
Mahan disait qu’une nation pacifique et aimant le profit n’avait pas
de vision à long terme. Or ceci est indispensable en matière maritime.
Le Grand Pensionnaire Jan de Witt s’était plaint de l’avarice bornée
des Hollandais, qui ne consentaient à donner de l’argent pour la
défense qu’au moment où la guerre était à leur porte.
Pour une petite puissance possédant de
grandes colonies, la force nécessaire à la marine est sans doute plus
élevée que ce qui peut être obtenu. On sera toujours loin de
l’idéal, constate Putman Cramer. Ce sera d’ailleurs le cas pour les
autres puissances navales, à l’exception peut-être de l’Angleterre.
Mais avec une force respectable, il est moins probable que les Pays-Bas
voient leur neutralité violée. Il faut pour cela renforcer le sentiment
national. Le gouvernement cherchera les moyens54.
Après avoir insisté sur la préparation
du personnel en citant Daveluy, Putman Cramer aborde la conception et la
préparation des plans de guerre. Son analyse est ici très classique. Il
insiste sur la nécessité de concentrer les forces. Il parle de positions
centrales, de lignes d’opérations intérieures et extérieures :
c’est le vocabulaire de Jomini, repris par Mahan55.
Il examine les principales bases néerlandaises (Helder, Amsterdam,
Hellevoetsluis, Soerabaia). Leur choix, précise-t-il, est assez facile du
fait de la stratégie des Pays-Bas, toujours défensive56.
Les Britanniques donnent une mission offensive à leur flotte : leur
objectif a toujours été de tomber sur la flotte ennemie ;
c’était leur façon de défendre le Royaume-Uni. Quand on n’a pas la
puissance suffisante pour attaquer l’ennemi avec une chance raisonnable
de succès, il faut adopter une stratégie défensive. Comme l’ont
écrit Daveluy et Mahan, c’est un pis-aller. Chaque fois que ce sera
possible, il faudra pratiquer l’offensive57.
Dans
le sillage de Castex
En 1913, l’année même où Putman
Cramer publia son ouvrage, la Marine hollandaise adopta un plan de
construction en 35 années de neuf vaisseaux de type Dreadnought.
Elle suivait ainsi la mode “navaliste” provoquée par les écrits de
l’amiral Mahan. La création de l’association Onze Vloot
(“Notre Flotte”) en 1906 s’inscrivait aussi dans ce climat navaliste.
Il faut toutefois souligner que le navalisme apparut tardivement aux
Pays-Bas. Le plan de 1913 venait plutôt tard et les ouvrages de Mahan
n’ont jamais été traduits en néerlandais, même s’ils étaient
connus et que Putman Cramer les citait58.
Au lendemain de la Première Guerre mondiale, la Marine hollandaise ne
partageait pas l’“obsession du Jutland” avec les marines anglaise et
américaine59. Sa
situation financière était difficile et elle vivait alors dans un
certain isolement par rapport aux autres marines. Un rapport du
26 octobre 1933 conclut que l’esprit de la Koninklijke
Marine n’était pas assez orienté vers la guerre : en face des
autres, les Hollandais étaient des “dilettantes”60.
Pour améliorer la situation, le gouvernement accrédita des attachés
navals à Londres et à Washington et envoya le commandant du Koninklijk
Instituut voor de Marine à Dartmouth, Flensburg-Mürwik et Brest.
L’amiral Furstner, directeur de l’Ecole
de guerre de la Marine (Hoogere Marine Krijgsschool) de 1930 à
1936, essaya d’envoyer un officier suivre des cours en Grande-Bretagne,
en France ou en Allemagne. Il essuya des refus. Les officiers étrangers
n’étaient pas acceptés. Lui-même avait pourtant obtenu le brevet
d’officier d’état-major à l’Ecole de guerre navale française en
1928 mais il resta un cas isolé. Furstner avait subi en France
l’influence de l’amiral Castex. L’enseignement de ce dernier lui
avait semblé particulièrement adapté à une puissance navale
secondaire, incapable d’aspirer à la maîtrise des mers. Par
l’intermédiaire de Furstner, qui allait devenir chef d’état-major de
la Marine, les idées de Castex furent à la base de la réorganisation
des états-majors de La Haye et de Batavia. Les trois principes de Castex
“savoir, vouloir, pouvoir” suscitèrent l’apparition de trois
bureaux : renseignements, opérations et organisation61.
Il y a également une analogie frappante
entre les idées de Castex et les conceptions stratégiques enseignées à
l’Ecole de guerre de la Marine hollandaise dans les années 1930,
conceptions qui étaient à la base de la planification navale. Au cœur
de celle-ci se trouvait le concept de la “flotte harmonieuse”, où
l’on mesurait le juste équilibre nécessaire quant au nombre et aux
types de vaisseaux de surface, de sous-marins et d’avions. Cette flotte,
pourvu qu’elle fût entraînée et que la coordination des armes y fût
bien développée, pouvait faire beaucoup de mal à un adversaire plus
fort, en particulier par des actions sur ses communications62.
L’influence de Castex aurait même
précédé Furstner : le rapport de la Commission
interdépartementale sur la Marine de 1920 introduisait déjà des
éléments essentiels du concept de flotte harmonieuse, notamment par une
insistance sur la liaison des armes sur mer63.
Même si les circonstances ne lui ont pas permis de parvenir à des
résultats probants, la Marine hollandaise a beaucoup travaillé sur ces
questions pendant l’entre-deux-guerres.
Conclusion
La tradition stratégique hollandaise est
d’abord maritime. Il y a toujours eu une pensée navale hollandaise,
alors que la Belgique, pays de dimensions comparables mais à tradition
plutôt continentale, n’en a jamais eu. La pensée navale des Hollandais
était en grande partie empruntée, mais leur esprit pragmatique et leur
grande maîtrise des techniques de navigation leur ont permis d’adapter
les concepts français ou anglais. Les deux théoriciens les plus
originaux furent Kinsbergen et Putman Cramer.
Après le “siècle d’or” de Tromp
et de Ruyter, la pensée navale hollandaise s’est toujours inscrite dans
une politique pacifique. La paix économique était nécessaire pour les
relations commerciales avec les colonies, base de la richesse nationale.
Si les Pays-Bas ont été entraînés dans les guerres de la Révolution
et de l’Empire, c’est bien malgré eux. Après avoir joué le rôle
d’Etat-tampon face à la France et vu la Belgique conquérir son
indépendance, les Pays-Bas ont opté, de 1839 à 1940, pour la
neutralité et l’alliance de fait avec la Grande-Bretagne. Après 1945,
les Etats-Unis ont relayé celle-ci mais il y a eu continuité dans
l’alliance avec une grande puissance maritime.
________
Notes:
1
Nieuw Nederlandsch
biografisch Woordenboek, Leiden, Sijthoff, 1918, V, p. 706.
2
J. C. de Jonge,
Geschiedenis van het Nederlandsche Zeewezen, 5 vol. + index,
Haarlem, Kruseman, 1858-1862, V, pp. 39-41.
3
L. van Bylandt, Zee-tactick,
of grondregulen der krijgskunde ter zee, Amsterdam, J. Morterre,
1767 ; Nieuw Nederlandsch Biografisch Woordenboek, IV, pp. 385-386.
4
Bigot de Morogues, Tactique
navale ou Traité des évolutions et des signaux, Paris, Guérin et
Delatour, 1763. Cet ouvrage fit l’objet d’une deuxième édition à
Amsterdam en 1764 (en français).
5
J. C. de Jonge,
op. cit., V, p. 42. Van Bylandt ne fut pas le seul à
vouloir simplifier Bigot : cf. Michel Depeyre, “Audibert
Ramatuelle ou des enseignements perdus”, dans L’évolution de la
pensée navale, p. 81.
6
J. C. de Jonge, op.
cit., V, pp. 41-42 ; Nieuw Nederlandsch Biografisch
Woordenboek, IV, p. 386.
7
Vaillant servit en Méditerranée
de 1783 à 1786 puis aux Indes orientales. En février 1795, lors de
l’invasion française, il suivit le prince d’Orange en Angleterre puis
alla se mettre au service de la Russie. Il commanda une flottille en mer
Noire et mourut à Riga en 1800. Nieuw Nederlandsch Biografisch
Woordenboek, V, p. 987.
8
J. O. Vaillant,
Werktuigkundige beschouwing van de uitwerking der wind en zee op een
schip, Amsterdam, 1986 ; Jacques Bourdé de Villehuet, Le manœuvrier
ou essai sur la théorie et la pratique des mouvements du navire et des évolutions
navales, Paris, 1765.
9
Hervé Coutau-Bégarie,
“Réflexions sur l’école française de stratégie navale”, dans L’évolution
de la pensée navale I, pp. 35-36.
10
Generale Zeinen voor
een Vloot of Esquader Oorlogschepen (Asaert et Bosscher, op. cit.,
III, p. 374).
11
Nieuw Nederlandsch
Biografisch Woordenboek, IV, p. 839.
12
Les patriotes ou
“étatistes” (staatsgezinden), partisans de réformes
libérales et d’une plus grande autonomie provinciale, s’opposaient
aux orangistes ou prinsgezinden.
13
Orders en korte
instructiën voor den krijgsdienst ter Zee, Amsterdam, 1761 ; Exercitie
met het geschut, op het onder- en bovendek, alsmede met het handgeweer,
Amsterdam, 1781 ; De Algemeene Scheepsdienst zoowel op een Fregat
als op een Schip van Linie, publié par C. A. Verhuell,
Amsterdam, 1782 ; Zeemans Handboek, Amsterdam, 1782 ; Zeemans-Droomen
over de noodzakelijkheid van een vast korps matrozen in dienst te houden,
Amsterdam, 1782 ; De praktikale Scheeps-Artillery, Amsterdam,
1797 ; Het groote generale dag- en nachtseinboek, Amsterdam,
1797 ; Inleiding voor den oorlog ter zee, publié par
C. A. Mackay, Zutphen, 1798.
14
J. H. van
Kinsbergen, Grondbeginselen der zee-tacticq, publié par
C. A. Verhuell, Amsterdam, G. Hulst van Keulen, 1782.
15
Ibid, p. 1.
16
Comte de Guibert, Ecrits
militaires 1772-1790, préface et notes du général Ménard, Paris,
Copernic, 1977, p. 96.
17
J. H. van
Kinsbergen, Grondbeginselen der zee-tacticq, pp. III-IV.
18
Ibid, pp. V-VI.
19
Ici également, on peut
déceler un point commun avec Guibert, lui qui avouait exposer en grande
partie les principes du roi de Prusse, Guibert, op. cit., p. 98.
20
Ibid,
pp. 11-49.
21
Ibid, pp. 50-74
et supplément pp. 1-17.
22
Nieuw Nederlandsch
Biografisch Woordenboek, V, p. 839.
23
H. Coutau-Bégarie,
“Réflexions sur l’école française de stratégie navale”, op.
cit., pp. 35-36. Michel Depeyre, “Le père Paul Hoste,
fondateur de la pensée navale moderne”, L’évolution de la pensée
navale I, pp. 73-74. Michel Depeyre, “Clerk of Eldin, un
penseur naval contesté”, L’évolution de la pensée navale II,
p. 73.
24
De Jonge, op. cit.,
V, p. 52.
25
Ibid, V,
p. 45.
26
Allgemeine Grundzüge
einer Flottentaktik nach der holländischen Taktik des Ritter von
Kinsbergen, Asaert et Bosscher, op. cit., III,
p. 374.
27
De Jonge, op. cit.,
V, pp. 43-46.
28
M. Depeyre, “Clerk of
Eldin, un penseur naval contesté”, op. cit., pp. 62-63.
29
De Jonge, op. cit.,
V, p. 48.
30
Asaert et Bosscher, op. cit.,
III, p. 380.
31
Ibid, III,
p. 377.
32
Grenier, Zee-taktique,
of kunst des oorlogs ter zee, traduit du français par
J. J. Melvill, Leyde, Luzac en Comp., 1799. M. Depeyre,
“Clerk of Eldin, un penseur naval contesté”, op. cit.,
p. 81.
33
J. Clerk, Krijgskunde
ter zee, of zee-taktiek, recherche systématique et historique,
traduite de l’anglais avec un supplément (sur la bataille de Kamperduin)
par J. W. de Winter, Amsterdam, W. Holtrop, 1806.
34
Ibid, p. X.
De Winter émaille sa traduction de notes où il rapporte les
considérations de Clerk à la situation des Pays-Bas.
35
Ibid, pp. XI-XII.
36
Avec Dennis Hart Mahan,
professeur à West Point et père de l’amiral A. T. Mahan,
Maury incarna le “Military Enlightenment” du milieu du XIXe siècle
aux Etats-Unis. Maury contribua à un plus grand professionalisme au sein
de l’U.S. Navy. Virginien, il rejoignit la Confédération en 1861.
Samuel P. Huntington, The Soldier and the State : The Theory
and Politics of Civil-Military Relations, Cambridge, Mass., Harvard
University Press, 1957, pp. 217-221.
37
M. H. Jansen, De
omwenteling in het zeewesen, eene bijdrage tot het behoud der
onafhankelijkheid, Dordrecht, Braat, 1864.
38
M. H. Jansen,
“Het leven van een vloothouder : gedenkschriften 1817-1875”, Werken
uitgegeven door het historisch Genootschap te Utrecht, III,
n° 49, 1925, p. 365.
39
Ibid,
pp. 247-248. La Hollande fut l’alliée de l’Angleterre dans les
guerres de la première moitié du XVIIIe siècle, au début des
guerres de la Révolution et en 1815. Ensemble, les “puissances
maritimes” combattaient l’hégémonie continentale de la France. David
French, The British Way in Warfare 1688-2000, Londres, Unwin Hyman,
1990, pp. 24, 49.
40
M. H. Jansen,
“Het leven van een vloothouder : gedenkschriften 1817-1875”,
p. VII.
41
Asaert et Bosscher,
op. cit., IV, p. 328.
42
Ibid, IV,
p. 330.
43
D. E. Keus, Beschouwingen
over zeetaktiek, Helder, 1900 ; C. Vreede, Verhandelingen
over zeetaktiek, Amsterdam, 1900.
44
E. de Haan, Beschouwingen
over Zeetaktiek, Helder, C. De Boer Jr., 1900.
45
Ibid, pp. 1-3.
De Haan cite à ce propos l’ouvrage de Laughton, Essay on Naval
Tactics.
46
Ibid, pp. 4-5.
De Haan renvoie à Bainbridge-Hoff, Examples, Conclusions and Maxims of
Modern Naval Tactics, p. 29.
47
De Haan, op. cit.,
pp. 127-128, 140.
48
Ibid,
pp. 151-152.
49
Ibid,
pp. 180-182. Gouverneur des Indes orientales, J. P. Coen
avait montré de grands talents de commandant et d’administrateur. Il
avait affronté les indigènes et les Anglais. Souvent inférieur en
nombre, il était toujours parvenu à se tirer d’affaire.
50
G. J. W. Putman
Cramer, Inleiding tot de maritieme strategie en zeetactiek, Helder,
C. de Boer Jr., 1913.
51
Ibid,
pp. 1-4.
52
Ibid, pp. 5-6.
53
Ibid,
pp. 10-15.
54
Ibid, pp. 17-19.
55
Voir notre article
“Jomini, Mahan et les origines de la stratégie maritime américaine”,
L’évolution de la pensée navale I.
56
Putman Cramer, op.
cit., pp. 28-58.
57
Ibid,
pp. 63-77.
58
Asaert et Bosscher, op.
cit., IV, p. 333.
59
P. M. Bosscher,
De Koninklijke Marine in de Tweede Wereldoorlog, Franeker, T. Wever,
1984, pp. 142-143.
60
Ibid, p. 158.
61
Ibid, p. 160 ;
Tussen vloot en politiek. Een eeuw marinestaf 1886-1986, Amsterdam,
De Bataafsche Leeuw, 1986, p. 37.
62
P. M. Bosscher,
op. cit., p. 160.
63
Ibid, p. 161.