|
LA
CHARRUE AVANT LES BŒUFS
Alain
Bru
Au moment où
nous écrivons ces lignes - février 1996 - et par une bien rare
exception depuis des décennies, les médias s’intéressent aux
questions relevant de la Défense :
 |
d’une
part au plan des licenciements à prévoir dans notre
industrie d’armement, en raison du plafonnement (en
termes de monnaie courante) puis de la réduction du Titre V
(investissements) du budget. Sans parler des divers prélèvements
de Bercy, devenus habituels en cours d’année :
annulation et reports de crédits, non remboursement ou
remboursement partiel des frais engendrés par les
multiples interventions hors métropole, etc. |
 |
d’autre
part, à propos du grand débat en cours sur l’éventuel
passage de l’armée "mixte" - personnels
d’active et du contingent - à celle de seuls
professionnels. |
C’est de ce second point que
nous traitons ici, les licenciements à venir dans l’industrie
d’armement n’étant pas de nature très différente de ceux
concernant toute autre industrie.
*
* *
Le récent "Livre
blanc" choisissait de conserver la conscription, quoiqu’en
réduisant assez sensiblement les effectifs totaux
et surtout, comme par une sorte de "rituel", au détriment
de l’armée de Terre qui devait se limiter à 227 000
personnels vers l’an 2000.
Depuis lors est intervenu le débat
sur la "professionnalisation" de l’armée, laquelle
devrait engendrer une nouvelle et importante réduction des
effectifs et, là encore, en priorité ceux de l’armée de Terre :
on a parlé successivement de
 |
150 000
personnels environ ; |
 |
puis
de 138 000 pendant quelques semaines ; |
 |
tout
récemment de 130, voire 120 000, soit un effectif guère
plus important que celui de la Gendarmerie. |
On oublie facilement que les armées
ont actuellement près de 50 000 hommes, dont plus de 40 000
"Terre" et pratiquement tous d’active, hors métropole :
les Forces de "présence", "prépositionnées",
"SMA", interventions multiples…
simultanément, de nombreux
politiciens et journalistes évoquent les problèmes de la défense
de l’Europe, prônant très généralement - et à juste titre,
pensons-nous - une sorte d’intégration de toutes les forces
"conventionnelles"1 :
réaliser le passage de Eurocorps (qui est une excellente
"vitrine", mais très limitée) à l’Euro-Armée :
Terre, Marine et Air2 .
- une incohérence
ces deux débats nous paraissent
être sinon contradictoires, du moins détachés l’un de
l’autre à un point qui laisse perplexe : en
effet, le passage à une armée
purement de métier3 représente
un bouleversement radical, non pas seulement dans une tradition
d’une durée déjà respectable (ce serait peu de chose), mais
aussi dans le "format", le recrutement, et surtout la répartition
des dépenses (ce dernier point étant très généralement passé
sous un pudique silence pour le moment).
Or, pour être efficace, donc
respectée, l’armée européenne devra constituer un tout cohérent,
et non pas être formée de la juxtaposition d’éléments
disparates proposés par les Etats-membres selon les seuls désirs
propres à chacun dans l’emploi de ses possibilités budgétaires
(et plus encore peut-être de ses ressources humaines).
En d’autres termes, nous savons
que nous aurons à fournir l’une des pièces d’une
"machine" complexe. Mais sans attendre l’étude puis
la définition exacte de cette machine, et sans connaître ce qui
nous y sera attribué, nous commençons à "fabriquer"
un des composants en espérant, sans doute, que nous aurons visé
juste - ce qui est passablement improbable - ou que nos
partenaires accepteront d’aménager leur coopération en
fonction des options que nous aurons prises4.
On peut alors se demander si le vieux dicton selon lequel "il
ne faut pas mettre la charrue avant les bœufs" n’est pas
d’actualité.
Il nous semble donc qu’il
serait plus raisonnable de suivre le processus suivant :
|
 |
agir
sur nos partenaires pour achever de leur faire prendre
conscience de la nécessité d’un “pilier” de défense
européen, au moins pour ce qui concerne les forces
classiques en première urgence5 ; |
|
 |
définir
les menaces, au moins à moyen terme, et les
actions à entreprendre pour leur faire face, et
donc définir également les moyens nécessaires
pour mener à bien ces actions ; |
|
 |
étudier
les possibilités de chacun des Etats-membres
de l’Europe et répartir les charges en
fonction de ces possibilités ; |
|
 |
enfin
et pour chacun, mettre les moyens, matériels
et humains, en concordance avec les
charges, une fois connu le contenu des
“fiches de répartition”. |
Ce n’est donc
qu’en fin de processus que devraient intervenir
les réorganisations de grande ampleur, celle du
passage de l’armée mixte à celle purement de métier
pouvant sans doute être considérée comme la
plus importante.
- l’armée
britannique
La référence
"incontournable" - pour employer le
terme à la mode actuellement - est l’exemple de
la guerre du Golfe, et, dans cette
"campagne", la comparaison entre les
forces engagées par la France d’une part et la
Grande-Bretagne d’autre part. En dépit
d’effectifs totaux Terre alors plus de deux fois
supérieurs, nous n’avons fourni qu’à peu près
la moitié de ceux alignés par nos alliés.
Procédons à une
comparaison, non sans oublier que, la
Grande-Bretagne étant une île, le volume de
moyens nécessaires à sa conquête n’aurait pu
- et ne pourra si une menace majeure pèse un jour
à nouveau sur l’Europe - laisser aucun doute
sur les intentions de l’agresseur.
Les nombres
indiqués dans la comparaison qui suit sont
extraits du Military Balance 1995-1996,
lequel a l’avantage d’uniformiser en dollars
les différents budgets.
|
Royaume-Uni
|
France
|
Population |
58
288 000
|
58
125 000 |
GNP
94 (Mds $) |
1
023,3
|
1
329,3 (+ 29,9 %) |
Effectifs
militaires 95 : |
Active
|
Active
|
Contingent
|
Total
|
*
Terre |
116
000
|
104
600
|
136
800
|
241
400
|
*
Marine |
50
500
|
45
600
|
18
600
|
64
200
|
*
Air |
70
400
|
55
400
|
33
800
|
89
200
|
Total
|
236
900
|
205
400
|
189
200
|
394
600
|
*
Gendarmerie (pour mémoire) |
-
|
81
500
|
11
900
|
93
400
|
Personnels
militaires rémunérés sur le budget de
la Défense |
236
900
|
286
600
(a)
|
201
100
(a)
|
488
000
(a)
|
Budget
réel Défense 94 (Mds $) |
34,5
|
34,1
(b)
|
(a) Non
compris faibles effectifs des services :
Santé, DGA, carburants, etc.
(b) Voté :
40,5. Moins Gendarmerie : 4,2 Mds $ et
annulation de crédits en cours d’année :
moins 2,2 Mds $ : 40,5 - 4,2 - 2,2 =
34,1.
|
Nous nous
retrouvons donc avec un budget réel
pratiquement égal à celui des forces armées
de la Grande-Bretagne et ceci malgré un
surcroît important de dépenses dans deux
domaines :
|
 |
le
rattachement de la Gendarmerie au
ministère de la Défense6,
alors que ses “prestations”
pour ce ministère sont très
minoritaires ; |
|
 |
le
fait que le nucléaire
britannique (grâce aux liens
étroits avec celui des
Etats-Unis), n’a jamais coûté
plus que la moitié du nôtre,
et le plus souvent moins du
tiers7. |
Ainsi,
sans prendre en compte les dépenses
de tous ordres relatives aux
personnels du contingent, notre budget
réel de Défense 1995 nous a permis
de faire face aux "RCS" (rémunérations
et charges sociales), mais d’un
nombre de personnels d’active - dont
les engagés hors Gendarmerie - inférieur
seulement d’une trentaine de
milliers d’hommes à ceux
qu’aligne la Grande-Bretagne.
Nous
ne disposons pas de renseignements
assez précis pour évaluer le coût
de nos 189 200 hommes du
contingent depuis le passage au
Service de 10 mois (solde,
alimentation, habillement et équipement,
nourriture, frais de casernement,
instruction, etc.) mais il est bien évident
que leur "prix de revient"
ne peut qu’être très supérieur à
celui de 30 000 personnels
d’active en pyramide hiérarchique
normale… dans l’état actuel des
niveaux de soldes.
Alors,
où passent les crédits britanniques ?
Pas dans les matériels puisque, dans
presque tous les domaines, nous
alignons une supériorité numérique
d’un ordre très généralement
compris entre 4 à 3 et 5 à 4.
A
titre d’exemple :
|
France
|
Royaume-Uni
|
Chars
de bataille |
1
016 |
788 |
Transports
de troupe blindés |
4
688 |
3
887 |
Pièces
d’artillerie automotrices |
413 |
218 |
Pièces
d’artillerie tractées |
395 |
286 |
Grands
navires de combat de surface
(frégate à P-A) |
42 |
39 |
SNLE |
5 |
4 |
SNA |
6 |
12 |
SM
classiques |
7 |
- |
Avions
"de combat" (au
sens Military Balance :
combat, transport, etc.) |
682 |
589 |
Tout
simplement, les crédits en cause sont
utilisés :
|
 |
dans
l’emploi de nombreux
personnels civils, déchargeant
pratiquement les
militaires de tout ce qui
n’est pas la préparation,
physique et psychologique,
au combat (avec moyens
suffisants, en munitions
et carburant notamment) ; |
|
 |
dans
les soldes et les
avantages sociaux -
familiaux en
particulier - dont bénéficient
les personnels
militaires
britanniques ; et
plus spécialement
ceux des niveaux les
moins élevés8. |
- l’armée
de métier en france
Paul
Maraval9
définit si bien ce que
doivent (devraient) être les
militaires de l’avenir que
nous ne pouvons mieux faire
qu’extraire de son article
les lignes suivantes : "…
ces forces doivent s’appuyer
sur un volume d’hommes de
qualité car la nature même
de leur engagement exigera
qu’elles relèvent toujours
les mêmes défis :
complexité, diversité,
imbrication, isolement, durée,
permanence, courage et abnégation,
pour n’en citer que
quelques-uns". nous
ajouterons encore initiative,
solidarité et confiance réciproque,
discipline morale…
plus
loin, cet auteur note que la
haute technologie miniaturisée
permettra de munir le
"système
combattant" humain de
moyens modulaires - à intégration
prévue dès la réception de
la tenue de base - permettant
d’optimiser les performances
dans tel ou tel domaine selon
les besoins10.
L’article prévoit six
fonctions essentielles :
|
 |
renseignement
(le soldat est
acteur mais aussi
“capteur tout
temps”) :
par vision
nocturne, télémétrie,
etc. Un GPS lui
permet de connaître
sa propre position
et l’envoie “à
ses chefs” ; |
|
 |
agression :
anti-projectiles,
mais étendue
aux rayons
laser,
l’IFF, les
pollutions NBC
et comprend même
une
climatisation
de la tenue) ; |
|
 |
communication :
mini-radio
[via
satellites
pour
liaisons
avec les
échelons
élevés],
micro-caméra
TV
envoyant
le
panorama
“à ses
chefs” -
toujours
d’après
Multimédia,
qui ne précise
pas le
niveau de
ces chefs
-, écran
du
calculateur
projeté
sur la
visière
du casque,
ainsi que
télémétrie,
position
propre et
celle des
combattants
amis,
vision
jour/nuit
et aide à
la visée :
en somme
une sorte
de
“cockpit
tête
haute”
de pilote
de chasse ; |
|
 |
mobilité,
comprenant : |
|
 |
facilité
de
déplacement :
souplesse
de
la
tenue,
fixation
des
charges11 ; |
|
 |
aptitude
à
se
localiser
-
par
le
GPS
-
et
au
positionnement
respectif
des
combattants
vis-à-vis
de
leur
chef
comme
entre
eux ; |
|
 |
soutien :
concernant
essentiellement
une
grande
capacité
de
stockage
d’énergie
électrique,
sous
faible
volume
et
faible
poids12. |
Naturellement,
l’accumulation
d’un tel équipement
serait
parfaitement
inepte, toute
question de coût
mise à part, ne
serait-ce que
par son poids.
Toutefois, Paul
Maraval, plus
raisonnable que
Multimédia, le
voit sous forme
modulaire, donc
ne comportant
que les moyens nécessaires
pour tel ou tel
type de mission.
Mais comment et
grâce à qui
suivraient les
autres modules,
car la mission
du combattant
peut changer
entièrement
d’un instant
à l’autre ?
Pour
revenir à des réalités
plus sérieuses
et moins
"science-fiction",
il n’en reste
pas moins très
vraisemblable
que le
combattant futur
"de
base" se
verra confier
des moyens de
plus en plus
sophistiqués,
notamment électro-informatiques,
dont la mise en
œuvre efficace
exigera un
individu de bon
niveau
intellectuel.
En
résumé,
l’homme du
rang de
l’avenir -
tout comme ses
supérieurs
d’ailleurs -
devra posséder
non seulement
une constitution
robuste et une
excellente
stabilité émotionnelle,
mais aussi un
niveau
intellectuel développé.
Sans
vouloir lui
faire insulte,
il nous faut
simplement
constater que,
en France
actuellement,
l’engagé
moyen - hors Légion
étrangère -
est bien loin de
cet idéal, au
moins pour la
troisième de
ces qualités.
L’explication
est simple :
nourri et logé
(en chambrée),
l’intéressé
reçoit une
solde qui ne
représente guère
plus que de
l’argent de
poche. Or, par
rapport au
"RMIste",
il est astreint
à de multiples
et lourdes
contraintes13.
Il
est évident que
l’engagé, même
parvenu au grade
de caporal, ne
peut envisager
de fonder un
foyer : le
seul loyer du
logement représenterait
la totalité de
la solde, voire
plus14.
Ceci
entraîne
qu’en dépit
du fort taux de
chômage actuel,
les jeunes gens
ne sont pas
nombreux à
vouloir
s’engager et
les Armées -
celle de Terre
en particulier -
sont alors
contraintes
d’accepter un
niveau moyen
extrêmement
bas. Cela
concourt à
donner une
mauvaise image
de
l’institution
militaire aux
recrues du
contingent15.
D’ailleurs,
malgré les
besoins limités
en engagés
aussi longtemps
qu’existe la
conscription, il
est déjà
difficile d’en
recruter le
nombre permis
par la loi de
finances
annuelle. Enfin,
le
"turn-over"
est trop rapide :
au lieu de 2 ou
3 ans - car il
faut déjà une
année pour
donner une
formation sérieuse
- la durée de
l’engagement
devrait être
initialement de
l’ordre de 4
ou 5 ans ;
puis il serait
renouvelable par
périodes de 2
ou 3 années.
Dans
ces conditions,
et pour une armée
de métier,
comment trouver
assez de jeunes
gens détenteurs
des qualités
indiquées plus
haut ?
Il
n’y a pas de
recette miracle,
sauf une seule :
amener les
soldes et les
prestations à
caractère
social à un
niveau
suffisant.
La
Gendarmerie,
comme l’armée
britannique, a
plus de
candidats que de
postes à offrir ;
la raison en
tient à trois
faits :
|
 |
le
gendarme
“de
base”
est
maréchal
des
logis
(sergent)
et
en
perçoit
donc
la
solde ; |
|
 |
il
est
logé
par
l’Etat
pour
un
loyer
presque
symbolique16 ; |
|
 |
il
est
assuré
d’une
stabilité
d’affectation
-
de
l’ordre
de
5 ans
en
moyenne
-
qui
permet
à
son
épouse
de
trouver
plus
facilement
un
emploi,
et
qui
-
point
non
négligeable
-
facilite
la
poursuite
d’études
à
ses
enfants. |
C’est,
mutatis
mutandis,
la
situation
que
la
Grande-Bretagne
offre
à
ses
engagés
et
qui
lui
procure
des
personnels
de
valeur.
Il
est
évident
que
ces
changements
coûteront
fort
cher17 :
|
 |
en
soldes
et
prestations
sociales,
qui
ne
pourront
qu’être
étendues
à
toute
la
pyramide
hiérarchique
(notamment
construction,
entretien
et
participation
aux
frais
de
fonctionnement
-
“charges”
-
de
très
nombreux
logements) ; |
|
 |
en
moyens
d’instruction
puis
en
maintien
de
l’entraînement
à
un
niveau
élevé :
munitions,
carburants,
simulateurs
complexes,
manœuvres
“en
simili
vraie
grandeur”,
etc.
Il
serait
en
effet
paradoxal
de
faire
servir
des
matériels
très
évolués
par
des
personnels
de
qualité…
mais
mal
formés ; |
|
 |
en
formation
préparatoire
à
la
reconversion
dans
le
domaine
civil :
si
le
gendarme
de
“la
Blanche”18
peut
rester
en
service
jusqu’à
un
âge
relativement
avancé,
il
ne
saurait
être
question
que
le
combattant
d’élite
au-delà
de
la
trentaine
soit
encore
en
activité
(l’aptitude
physique
serait
à
vérifier
grâce
à
une
visite
médicale
annuelle
approfondie).
Or,
pour
être
tenté
par
le
recrutement
militaire,
il
faut
que
le
jeune
homme
(ou
la
jeune
femme)
sache
qu’il
recevra
aussi
une
instruction
“civile”
le
mettant
à
l’abri
du
chômage
quand
l’armée
ne
pourra
prolonger
son
contrat19 ; |
|
 |
en
embauche
de
nombreux
personnels
civils
(comme
dans
toutes
les
autres
armées
de
métier),
déchargeant
ainsi
les
militaires
des
multiples
“corvées”
-
cuisine,
nettoyage
de
locaux,
etc.
-
qui
consomment
une
partie
non
négligeable
du
temps
qui
devrait
être
consacré
à
l’instruction
puis
à
l’entraînement. |
Certains
donnent
déjà
des
évaluations
du
surcoût
d’une
armée
de
métier20,
mais
il
serait
nécessaire
qu’une
étude
poussée
dans
les
moindres
détails
soit
menée
à
ce
sujet.
Il
est
vrai
qu’une
telle
étude
ne
peut
qu’être
longue
et
ne
peut
être
sérieuse
que
si
elle
repose
sur
des
bases
sûres.
Par
exemple :
quels
seront
les
"formats"
qui
seront
définitivement
arrêtés ?
Quelle
sera
la
pyramide
hiérarchique
retenue
pour
les
différents
grades ?
Quel
sera
le
niveau
de
rémunération
accepté
par
les
"toutes
puissantes"
finances ?
Combien
y
aura-t-il
de
bases
navales
et
aériennes
principales
et
quel
volume
doit-on
envisager
pour
chacune ?
L’armée
de
Terre
doit-elle
continuer
à
être
"éparpillée"
dans
de
multiples
villes
de
garnison,
ou
bien
(à
la
manière
américaine)
doit-elle
être
regroupée
dans
un
nombre
limité
de
"grands
camps"
disposant
chacun
des
commerces,
écoles
pour
enfants,
moyens
sportifs
et
culturels
nécessaires
(sans
parler
des
terrains
de
manœuvre,
installations
de
tir,
etc.) ?
s’en
tenir
aux
seules
RCS
risque
de
conduire
à
de
fâcheuses
surprises.
- le
"service
civil"
(ou
"civique")
Nous
ne
nous
jugeons
pas
qualifié
pour
juger
des
merveilles
que
certains
en
attendent
-
ou
feignent
d’en
attendre.
Pour
notre
part,
nous
sommes
infiniment
moins
optimiste,
ne
serait-ce
que
pour
deux
raisons
majeures :
a)
on
ne
peut
attendre
de
jeunes
gens
d’une
vingtaine
d’années
l’expérience
(ni
la
maturité)
permettant
de
les
utiliser
isolément :
pour
l’énorme
majorité
d’entre
eux,
il
faudra
prévoir
des
structures
(mais
lesquelles
et
pour
quel
objet ?)
encadrées
(mais
par
qui ?).
b)
le
"piston"
des
jeunes
gens
"bien
placés",
que
nous
avons
vu
naître
et
se
développer
depuis
une
vingtaine
d’années,
risque
fort
d’atteindre
un
niveau
insupportable
pour
ceux
qui
n’en
bénéficieront
pas,
avec
pour
effet
une
aggravation
de
la
fracture
sociale
dès
l’entrée
dans
l’âge
adulte.
- CONCLUSION
Nous
revenons
à
notre
réflexion
première :
au
moment
où
les
questions
de
Défense
européenne
-
menace
et
moyens
pour
y
parer,
contribution
des
différents
partenaires,
structures
-
sont
encore
dans
les
limbes
et
où
les
disponibilités
économiques
sont
si
maigres
que
la
Défense
en
vient
à
constituer
le
seul
"gisement
de
récupération"
de
crédits
pour
les
Finances,
il
nous
semble
plus
qu’imprudent
de
se
lancer
dans
un
choix.
Qui
plus
est,
ce
choix
sera
irréversible,
car
une
fois
l’armée
de
métier
mise
en
place
-
bonne ?
médiocre ?
mauvaise ?
-
quel
pouvoir
politique
aura
le
courage
d’affronter
l’opinion
publique
et
les
médias
en
prescrivant
le
retour
à
une
armée
de
conscription ?
________
Notes:
1
Le
volet
nucléaire
soulève
des
problèmes
encore
plus
délicats.
Nous
n’en
citerons
que
deux :
2
Nous
laisserons
de
côté,
bien
qu’elles
ne
soient
pas
négligeables
loin
de
là,
les
questions
relatives
à
l’interopérabilité
des
matériels :
moyens
et
systèmes
de
liaison,
munitions
de
tous
types,
matériels
électro-informatiques,
etc.,
sans
parler
des
difficultés
linguistiques.
3
Et
non
pas
seulement
une
des
composantes
-
comme
l’entendait
le
colonel
De
Gaulle
(Vers
une
armée
de
métier)
-,
celle
mettant
en
œuvre
les
moyens
mécanisés-blindés
en
particulier.
Les
commentateurs
qui
se
réfèrent
à
lui
pour
prôner
leur
solution
semblent
négliger
le
fait
que,
président
de
la
République
et
donc
chef
des
Armées
pendant
près
de
deux
septennats,
le
général
De
Gaulle
eût
pour
le
moins
engagé
cette
réforme
s’il
avait
été
convaincu
de
la
supériorité
absolue
du
professionnalisme
sur
la
conscription.
4
Prenons
une
comparaison
matérielle :
supposons
qu’il
soit
question
de
construire
un
nouvel
“Airbus”,
toujours
en
coopération
avec
d’autres
nations
européennes.
Nous
agissons
en
somme
comme
si,
avant
même
que
l’étude
soit
lancée,
nous
avions
décidé
unilatéralement
de
fournir
un
certain
type
de
fuselage
en
espérant
que
nos
partenaires
accepteront
de
lui
adapter
les
ailes,
moteurs,
empennages
nécessaires
pour
lui
donner
des
caractéristiques…
qui
sont
loin
encore
d’avoir
été
décidées.
5
Il
est
vrai
qu’en
cette
matière,
le
traité
de
Maastricht
n’est
guère
explicite.
Mais
parmi
ceux
qui
ont
voté
au
référendum
-
pour
ou
contre
d’ailleurs
-,
bien
peu
ont
réellement
lu
ce
traité
et
se
sont
reportés
aux
nombreux
textes
précédents,
modifiés
ou
précisés
par
le
nouveau
document.
6
Une
fois
de
plus
nous
déplorons
cette
appellation.
L’Ordonnance
du
7 janvier 1959,
qui
reste
le
texte
de
référence,
a
bien
spécifié
que
toutes
les
branches
ministérielles
ont
une
responsabilité
dans
la
Défense.
A
cet
égard,
elles
doivent
(devraient)
désigner
en
leur
sein
un
“Haut
fonctionnaire
de
Défense”
disposant
des
moyens
et
des
personnels
lui
permettant
de
mener
sa
tâche
à
bien.
7
cf.
Défense
nationale,
septembre
1995.
8
S’ajoute
le
fait
que,
jusqu’à
un
grade
élevé,
le
militaire
britannique
fait
sa
carrière
dans
le
même
régime
-
parfois
envoyé
au
loin,
en
“régiment
de
marche”,
mais
retrouvant
ses
casernements
au
retour.
L’épouse,
assurée
d’une
très
grande
stabilité,
est
donc
dans
une
situation,
pour
trouver
un
emploi,
toute
autre
que
celle
du
militaire
français,
lequel
est
mutable
à
volonté
et
muté
trop
souvent
(l’auteur
a
déménagé
19
fois
en
34
ans
de
carrière ;
or,
il
ne
représente
nullement
un
cas
exceptionnel).
9
Défense
nationale,
février
1996,
Chronique
armée
de
Terre,
p. 173.
10
Cf. le
“cahier
Multimédia”
du
2
février
1996
de
Libération,
détaillant
-
dessin
et
texte
à
l’appui
-
ce
que
pourraient
être
ces
modules.
L’individu
représenté
porte
la
totalité
des
modules
concevables,
mais
avec
impasse
discrète
sur
la
source
d’énergie
électrique
nécessaire.
En
revanche,
son
armement
se
limite
à
un
“vieux”
FAMAS.
Le
coût
d’un
tel
équipement
exigerait
pour
l’armée
de
Terre
d’être
limitée
à
quelques
milliers
d’hommes
au
mieux
puisque,
ultra-miniaturisé,
l’ensemble
électro-informatique
serait
nettement
plus
cher
que
celui
d’un
char
Leclerc.
11
Il
est
de
fait
qu’aux
Malouines,
les
troupes
britanniques
durent
utiliser
des
“brûlages”
de
mortiers
de
81,
bricolés
du
mieux
possible
à
l’aide
de
cordages
divers,
pour
porter
les
postes
de
tir
et
missiles
Milan.
12
Problème
non
résolu
jusqu’à
présent.
Les
batteries
du
Ni-Cd
ne
diminuent
que
d’un
facteur
de
l’ordre
de
2,5
les
masses
et
volumes
des
bons
vieux
accumulateurs
au
plomb.
Les
piles
au
lithium
réduisent
encore
ces
facteurs
mais
ne
sont
guère
susceptibles
de
recharge.
13
Gardes
de
week-end
et
de
nuit,
disponibilité
immédiate,
y
compris
possibilité
de
rappel
d’urgence
s’il
se
trouve
en
permission,
etc.
On
ne
peut
non
plus
négliger
l’impact
psychologique
ressenti
au
contact
de
jeunes
gens
du
contingent
d’un
niveau
d’instruction
en
moyenne
très
nettement
supérieur
et
-
il
faut
le
reconnaître
-
aux
capacités
intellectuelles
trop
souvent
meilleures.
14
Chacun
sait
bien
que
le
montant
des
loyers
en
région
parisienne
est
très
élevé.
15
Après
la
guerre
du
Golfe
il
a
fallu
résilier
les
contrats
d’un
nombre
non
négligeable
d’engagés
que
cette
expérience
(“en
vraie
grandeur”)
avait
montrés
radicalement
inaptes.
16
Logement
dit
“attribué
par
nécessité
de
fonction”
(être
joignable
immédiatement).
17
Ainsi
que
le
montre
l’examen
des
dépenses
RCS
actuelles
des
différentes
armées :
si
l’on
prend
comme
unité
le
“prix
de
revient
RCS”
du
militaire
d’active
de
l’armée
de
Terre,
celui
de
l’armée
de
l’Air
revient
à
1,3 ;
celui
de
la
Marine
à
1,4
et
celui
de
la
Gendarmerie
à
2,1
(que
seule
la
DGA
dépasse
avec
son
personnel
d’ouvriers,
employés
et
ingénieurs
militaires).
18
Les
gendarmes
de
formations
territoriales,
depuis
la
brigade
de
chef-lieu
de
canton
jusqu’aux
échelons
territoriaux
les
plus
élevés,
portent
des
galons
argentés.
Ceux
de
la
“Mobile”
(par
laquelle
ils
débutent
normalement),
sont
dorés,
d’où
le
surnom
de
“la
Jaune”.
19
Plus
particulièrement,
nous
pensons
à
des
métiers
intelligents
d’artisans
(mécaniciens,
électriciens,
plombiers
et
chauffagistes,
menuisiers,
etc.
dont,
en
raison
du
mépris
affiché
à
l’égard
de
ces
“manuels”
par
notre
intelligentsia,
la
France
souffre
d’un
déficit
qui
serait
de
l’ordre
de
600 000
personnes
(journal
L’entreprise,
automne
1995).
20
Par
exemple
J.-P.
chevènement
prévoit
un
surcoût
annuel
de
20
milliards
de
francs
(de
1996).
|