Arrivé à la période qui s’étend de la fin de la Seconde Guerre mondiale à la fin du conflit vietnamien (soit de 1945 à environ 1975), il est intéressant de constater que la doctrine de l’armée de terre américaine est avant tout centrée sur les problèmes tactiques. Elle ne s’appuie pas sur des considérations opérationnelles. La redécouverte de ce niveau du combat devra attendre les années 80. En fait, de 1945 à 1950, l’U.S. Army est sensiblement peu différente de ce qu’elle était lors du second conflit mondial. Le changement le plus important est l’introduction d’armes nucléaires tactiques durant les années 50. Ensuite, jusqu’aux années 60, la pensée doctrinale américaine accorde toujours une attention primordiale à la situation en Europe occidentale. Les stratégistes prévoient un conflit potentiel long et basé sur l’attrition, par opposition à la manœuvre. Le rôle des armes nucléaires tactiques est par conséquent largement valorisé, ainsi que, de manière plus générale, la place accordée à la puissance de feu conventionnelle. En cas d’attaque massive communiste, ce sont ces deux éléments qui devaient jouer le rôle principal pour arrêter l’adversaire. La guerre du Vietnam va permettre l’introduction d’une réflexion sur la guerre de guérilla. Trois grands types d’opérations seront pratiqués dans le sud-est asiatique. Tout d’abord, il y a les opérations appelées search and destroy – rechercher l’ennemi et le détruire. Elles consistent principalement à tendre des embuscades en utilisant la technique dite hammer and anvil (coincer l’ennemi entre le marteau et l’enclume). Ensuite viennent les opérations de nettoyage, clearing, assez similaires à search and destroy, elles donnent plus d’importance à la pacification des campagnes. Elles permettent donc aux troupes gouvernementales d’établir plus largement leur influence dans ces zones. Le troisième type d’opérations, securing, consiste à consolider le clearing en éliminant les unités de guérilla locales. Une constante apparaît dans cette évolution, l’emploi d’une puissance de feu massive en toute situation par l’U.S. Army.[1] En d’autres termes, il s’agit bien de la recherche de l’anéantissement. On ne s’étonnera pas que Clausewitz, mais aussi d’autres auteurs classiques de la stratégie, sera souvent appréhendé par ce biais entre 1945 et la fin de la guerre du Vietnam.
En fait, dans l’immédiat après-guerre, les références aux classiques de la pensée stratégique restent assez éparses dans le discours stratégique américain. Mais, si ces références sont éparses, elles ne sont pourtant pas absentes. On pourra par exemple retrouver les noms du général Beaufre, de Douhet ou de Thomas E. Lawrence dans des articles de la Military Review.[2] Le nom de Mahan, lui, revient plus souvent.[3] On ne le considère pas démodé par la découverte du nucléaire mais on lui reproche de ne pas avoir suffisamment traité de la puissance continentale. Il est également remis en question par le développement de l’aviation.[4]
Plus symptomatique encore, MacKinder est ponctuellement évoqué. Il est vrai que MacKinder offre un cadre de références seyant à la nouvelle donne des relations internationales, la Chine et l’U.R.S.S. constituant maintenant le Heartland.[5] On retrouve les craintes traditionnelles de la guerre froide à la lecture de ces textes. Ainsi, pour certains, la masse continentale du nouveau Heartland communiste ne peut être vaincue, en particulier si les Etats qui le composent possèdent des armes nucléaires et des vecteurs de grande autonomie.[6] Les thèses de MacKinder permettaient aussi de remettre en évidence le Seapower et l’importance du Corps des Marines.[7]
Mais qu’en est-il de la référence à Clausewitz ? Si la véritable renaissance des études consacrées à Clausewitz date de 1976, il est pourtant erroné de penser que le Prussien est absent du paysage stratégique américain auparavant. Ainsi, en 1962, le colonel Edward M. Collins de l’U.S. Air Force édite une version abrégée de On War – War, Politics, and Power -, qui contient en fait moins de 15% de l’original.[8] Puis, en 1969, Peter Paret dresse un bilan des études sur Clausewitz dans un article de très bonne facture dans la revue World Politics. Il y insiste sur la nécessité d’appréhender On War dans son contexte historique.[9] L’article sera reproduit dans la Military Review la même année.[10]
Comme cela a déjà été indiqué, la plupart des textes qui citent Clausewitz l’associe à la bataille d’anéantissement. C’est particulièrement le cas au sein de l’armée de terre. Le Prussien est considéré comme l’instigateur d’une stratégie de destruction des forces ennemies, éventuellement de destruction de la volonté de l’adversaire.[11] Le géopoliticien Strausz-Hupé transposera même le concept au niveau de la compétition des valeurs dans un cadre idéologique et civilisationnel.[12] Par ce biais, Clausewitz est régulièrement associé à Jomini, voire à Frédéric II.
A l’Académie de West Point, un document simplement intitulé Clausewitz, Jomini, Schlieffen donne un aperçu de la pensée du Prussien. Ce document a été publié pour la première fois en 1943. Il a ensuite été réédité en 1945, 1948, 1951, 1964 et enfin en 1983 pour une conférence à l’U.S. Army War College de Carlisle Barracks. Dans l’édition de 1951, il est reproché à Clausewitz sa philosophie dite du sang et de l’acier, celle que l’on retrouverait aussi chez Bismarck et dans le Mein Kampf de Hitler.[13] L’édition de 1964 de ce document, sera toutefois nettement plus équilibrée envers le Prussien. La nouvelle édition reconnaît que Clausewitz évoque deux types d’objectifs en guerre ; soit détruire la volonté de l’ennemi ou le désarmer pour l’obliger à accepter certaines conditions ; soit simplement obtenir une portion de son territoire en vue de le conserver ou pour négocier. Clausewitz est aussi largement associé à quelques principes de la guerre : objectif, concentration, économie des forces, surprise, mobilité, simplicité. La défense comme forme la plus forte de la guerre, le point culminant de l’attaque, les frictions, sa pensée sur la guerre de guérilla et le génie sont également mentionnés. Le document juge par contre que l’officier prussien n’a pas attaché assez d’importance à l’usage agressif des avant-gardes comme l’a fait Napoléon.
On remarquera que le document indique que Clausewitz ne cite jamais Jomini, ce qui est inexact. On retrouve, par exemple, le nom de Jomini cité dans On War.[14] Il semblerait que l’erreur de l’auteur provienne d’un ouvrage écrit par Emile Wanty, ouvrage cité dans les notes de bas de page. Emile Wanty avait écrit que Jomini parle rarement de Clausewitz ; Clausewitz ne cite jamais Jomini. La façon dont cet auteur traite Clausewitz est d’ailleurs très proche du document de West Point.[15] Clausewitz y est présenté comme l’exégète de la bataille napoléonienne.
On retrouve une vision assez identique dans l’ouvrage Military Heritage of America (1956). Dans ce livre, les auteurs s’attardent sur la pensée de cinq auteurs classiques de la stratégie. Il s’agit de Jomini, Clausewitz, Schlieffen, D.H. et A.T. Mahan. Ces cinq auteurs sont ceux qui auraient le plus largement influencé la pensée stratégique américaine. Clausewitz et Jomini y sont une fois de plus associés comme les deux exégètes de la stratégie napoléonienne. Tous deux sont complémentaires selon les auteurs. Ils se rejoignent malgré qu’ils aient emprunté des cheminements intellectuels différents. L’ouvrage tente de synthétiser la pensée de Clausewitz. Il y est indiqué que Clausewitz est plus philosophe que scientifique car ce qu’il vise avant tout c’est de comprendre la nature profonde de la guerre. Par ailleurs, il est écrit que Clausewitz récuse les approches mathématiques ou géométriques de l’étude de la guerre. De la même manière, il rejette les faiseurs de système. Pour lui, la théorie, qui n’est pas doctrine, sert à éduquer l’esprit. La théorie ne peut rendre de façon satisfaisante certains phénomènes tels que le danger ou le courage. Les auteurs ajoutent que Clausewitz met fortement en évidence le rôle des forces morales. Ils précisent que les frictions permettent de distinguer la guerre dans la réalité de la guerre en théorie. Dans le registre plus opérationnel, ils répètent les idées de Clausewitz sur la supériorité de la défense, l’efficacité de l’offensive et la nécessité de la poursuite de l’adversaire. La primauté de la bataille revient aussi lorsqu’ils affirment que pour Clausewitz la nature de la guerre est violente et que le combat est affaire de vie ou de mort. La compatibilité de Jomini et Clausewitz est réaffirmée par l’évocation des principes de la guerre. Ceux-ci seraient aussi valables pour Jomini que pour le Prussien. Enfin, les auteurs font un commentaire sur la méthode d’analyse de Clausewitz, c’est-à-dire la nécessité d’étudier en profondeur les phénomènes avant d’affirmer une relation de cause à effet. Pour terminer, ils citent la Formule. En conclusion, selon l’ouvrage Military Heritage of America, si Jomini était plus célèbre que Clausewitz à l’époque, c’est que ce premier a vécu plus longtemps et que son arrogance aidant, il a eu plus d’opportunités de faire valoir son travail.[16]
On retiendra encore que le colonel S.L.A. Marshall fait également référence à Clausewitz dans un passionnant ouvrage sur le comportement des soldats face au feu de l’ennemi. Ce livre, intitulé Men against Fire, va révéler que, lors de la Seconde Guerre mondiale, moins de 25 % des fantassins de l’U.S. Army utilisent leur arme sur le front (au contact de l’ennemi). L’étude de Marshall doit être lue dans une perspective psychosociale. On retiendra le rôle prédominant que l’auteur attribue à la bataille et au feu. Marshall cite non seulement Clausewitz mais aussi, au passage, Ardant du Picq, Maurice de Saxe, Foch, Grandmaison, Fuller, etc. Bien que Clausewitz ne sert pas, ici, à justifier une stratégie d’anéantissement par la puissance de feu, tout l’ouvrage est pourtant tourné dans ce sens. Le Prussien permet de mettre en évidence le rôle du moral et des frictions. Marshall pense également que Clausewitz n’a pas assez développé le concept de génie.[17]
A l’époque, quelques articles vont également mettre en relation Clausewitz avec les réflexions sur les changements introduits sur le champ de bataille par les armes nucléaires tactiques – véritables armes d’anéantissement lorsqu’elles sont pensées en dehors d’un schéma dissuasif. Ces armes doivent permettre de vaincre un adversaire numériquement supérieur. Toutefois, suite à leur apparition, la relation entre l’offensive et la défense décrite par Clausewitz est réévaluée et acceptée. Pour les Américains, si la défense reste la forme la plus forte de la guerre, l’offensive est encore la seule modalité décisive du combat. Mais face à la menace de destruction massive, les troupes doivent être en mesure de passer rapidement d’une position défensive à une position offensive, donc de trouver un équilibre entre les deux termes. La flexibilité, soit la possibilité de passer rapidement de la première à la deuxième forme d’opération, devient un « credo » de l’armée de terre.[18] On notera que l’idée d’anéantissement de l’adversaire trouve aussi sa place dans la pensée relative à la guerre limitée. Encore une fois, la destruction des forces ennemies – ou de leur moral – est mise en évidence. En d’autres termes, Clausewitz sert d’interprète de la bataille d’anéantissement dans la guerre limitée.[19]
En résumé, en prenant appui sur les textes évoqués, il existe un courant important du discours stratégique américain de l’armée de terre qui assimile Clausewitz à la bataille d’anéantissement. Dans cette tendance, Clausewitz est souvent placé en regard du modèle napoléonien de la guerre, voire de Jomini (à ce propos voir en particulier infra à propos des principes de la guerre), parfois de Frédéric II. Toutes les sources évoquées ne montrent pas automatiquement une acceptation de la Formule mais, en tout cas, pas de rejet prononcé.
On retrouve des considérations assez identiques chez certains théoriciens de la puissance aérienne. Néanmoins, parmi ceux-ci, c’est le nom de l’Italien Guilio Douhet (1869-1930) qui revient plus fréquemment que celui de Clausewitz. On nomme d’ailleurs « douhetisme » sa façon de concevoir l’emploi de l’aviation militaire. En fait, Douhet avait été dégoûté par la façon dont la Première Guerre mondiale s’était déroulée. Il publie alors en 1921 son principal ouvrage, La Maîtrise de l’air (Il dominio dell’aeria). Il y mettait en évidence le rôle des aéronefs dans la résolution rapide des guerres. Pour lui, une armée en guerre doit d’abord obtenir la suprématie aérienne. Ensuite, elle peut envoyer ses bombardiers à l’attaque de tous les objectifs possibles. On retient surtout le côté sulfureux de la pensée de Douhet. Pour lui, le bombardement des populations civiles doit provoquer des révoltes chez l’ennemi. Ces révoltes obligeraient le gouvernement de l’adversaire à capituler sous peine de voir l’Etat imploser suite à la contestation.[20] La pensée de Douhet a laissé d’importantes traces dans les réflexions sur la puissance aérienne. Son aspect polémique fait qu’elle est encore débattue aujourd’hui.
On sait que Il dominio dell’aeria a été traduit en anglais sous le titre Command of the Air. L’ouvrage sera traduit trois fois en américain : en 1942, en 1958 et en 1983. De plus, des traductions spéciales étaient déjà disponibles en 1923 pour l’Air Tactical School et en 1933 pour les officiers de l’U.S. Army Air Corps. En plus, à partir de 1936, des extraits de l’ouvrage seront encore publiés dans des périodiques militaires britanniques.[21] Si les idées de Douhet sont assez rapidement diffusées en anglais et en américain, l’impact du penseur outre-Atlantique est toujours un sujet controversé.
Dans le discours stratégique américain des années 50, un stratégiste accorde en apparence les lignes de raisonnement de Douhet et de Clausewitz. Il s’agit du colonel D.O. Smith – il deviendra ultérieurement général. Dans son ouvrage U.S. Military Doctrine publié en 1955, Smith ne fait guère de différences entre Clausewitz et Jomini. Les deux théoriciens s’équivalent selon lui. Tous deux seraient les propagateurs du concept des principes de la guerre dont Smith apprécie la sagesse.[22] Il pense néanmoins qu’ils doivent évoluer. Pour lui, l’axiome majeur de la guerre moderne est devenu la rapidité – celerity. Ensuite, l’appréciation de Douhet par l’auteur est discutable. Smith affirme que l’anéantissement ne peut plus être l’objectif de la guerre moderne : elle doit être limitée. Il suit donc le raisonnement de Douhet en désignant la puissance aérienne comme le moyen de limiter la guerre. L’utilisation de la force aérienne groupée, en tant qu’entité non subordonnée à d’autres Armes, permettrait de raccourcir la durée des conflits par la destruction de la volonté ou du matériel de l’ennemi.[23]
Ce raisonnement s’avère paradoxal. Il ramène directement à la contradiction de la pensée de Douhet. Soit, la guerre, selon le penseur italien, serait limitée dans le temps, mais à quel prix! De facto, Dale O. Smith, en se référant à Douhet, ne récuse pas le modèle d’anéantissement. Non seulement il le prône, mais il ouvre encore (inconsciemment ?) la voie à des réflexions sur des frappes, voire une guerre, préventives.[24] En d’autres termes, ce que propose Smith est une guerre brève et paroxystique. Il ne s’agit en aucune manière d’une réfutation de l’anéantissement. Enfin, il faut noter que les lignes de réflexion de Smith, avec référence à Clausewitz, peuvent être trouvées chez d’autres auteurs américains de la même époque.[25] Voire, il existerait une généalogie directe entre la stratégie d’anéantissement de Sherman et les idées de Douhet.[26]
Comme on peut s’en douter, les conceptions de Dale O. Smith ne créèrent pas un consensus au sein des forces armées américaines. Même Henry Kissinger déplorera qu’on trouve plus de passion que de bon sens et d’analyse chez Smith.[27] US Military Doctrine est également critiqué par la Military Review. Pour les membres de l’armée de terre, la victoire ne peut être le fait de l’aviation seule. Ils soulignent le rôle fondamental de l’armée de terre, en particulier dans un environnement mondial caractérisé par la croissance de la subversion. Pour eux, bien que Clausewitz ait affirmé que le but de la guerre est la destruction des forces de l’ennemi – l’anéantissement n’est pas remis en question – la puissance aérienne n’est pas le seul outil efficace.[28] On voit bien poindre une certaine crainte de la part de l’armée de terre d’être reléguée au rang de service auxiliaire de l’U.S. Air Force. Un général de l’U.S. Army donnant une conférence à l’Air War College en décembre 1957 en viendra à affirmer clairement qu’il refuse une doctrine découlant des préceptes de Clausewitz et de Douhet.[29]
Indéniablement, ce débat doit être replacé dans le contexte de lutte inter-services. Dans la Military Review, les idées de Douhet sont encore critiquées à la lueur de l’expérience de la Seconde Guerre mondiale : les bombardements stratégiques alliés sur l’Allemagne n’ont, après tout, pas permis de stopper la guerre. De plus, un critique souligne que la politique d’anéantissement par le feu aérien du Japon et de l’Allemagne s’est avérée contre-productive à long terme. En effet, à l’époque, les Etats-Unis devaient aider ces pays à reconstruire leur potentiel – mais n’est-ce pas la guerre en elle-même plutôt que les bombardements qui doivent être mis en cause ici (?). La critique souligne également que Douhet est peut-être un penseur intéressant, mais que son œuvre est contingente à la situation italienne. L’Italie, Etat militairement peu puissant, est parvenue à obtenir une capacité de projection grâce à son aviation, et ce à, relativement, bon marché. Cette vision de l’économie des moyens n’est pas sans rappeler le but avoué de la doctrine des représailles massives de l’administration Eisenhower. La doctrine visait assez explicitement la réduction des budgets militaires.[30] La lecture de Clausewitz par Eisenhower a par ailleurs déjà été évoquée. Depuis, on a attribué au président une perception clausewitzienne du risque d’escalade. De même, on a interprété son attention à l’équilibre des fins et moyens dans le cadre des premiers pas de la stratégie nucléaire américaine à l’aune de sa connaissance du Prussien.[31]
Parmi les disciples de la puissance aérienne, on retrouve également quelques considérations sur Clausewitz dans deux ouvrages de Alexander P. de Seversky après la guerre. D’origine russe, de Seversky a fui son pays suite à la Révolution de 1917. Il émigre aux Etats-Unis et se met au service du gouvernement. Il devient ingénieur en aéronautique et pilote d’essai pour le compte du Département de la Guerre. Il entretient des contacts professionnels avec William E. (Billy) Mittchell le célèbre propagateur américain du concept de puissance aérienne. De Seversky lancera aussi sa propre compagnie de production aéronautique, la Seversky Aircraft Corporation qui deviendra Republic Aviation. Sa compagnie développera le fameux P-47 Thunderbolt durant la Seconde Guerre mondiale. En tant que théoricien, de Seversky se fait d’abord connaître en 1942 par un ouvrage appelé Victory Through Air Power. L’ouvrage est vendu à plus de 500.000 copies. Il est rendu encore plus célèbre par son adaptation, sous forme de dessin animé, par Walt Disney. Une anecdote indique que Churchill demanda que ce film soit projeté au Président Roosevelt à la conférence de Québec en 1943. Churchill désirait valoriser le rôle de la puissance aérienne.[32]
Après la Seconde Guerre mondiale, les écrits de De Seversky ne concernent plus uniquement la puissance aérienne au sens étroit, mais aussi la stratégie nucléaire et la géopolitique. L’auteur fait référence à Mahan, Mackinder, Douhet et Clausewitz.[33] En fait l’ouvrage Air Power: Key to Survival tente de substituer la puissance aérienne à la conception traditionnelle de la puissance navale – avec adaptation s’entend. [34] Il est intéressant de constater qu’on trouve aussi chez de Seversky des références à la filiation Jomini – Mahan et à Clausewitz. L’auteur ne cite pas Jomini mais indique qu’il existe des principes de la guerre qui sont immuables.[35] Dans l’ouvrage America: Too Young to Die!, on retrouve une remarque assez similaire avec référence à Mahan.[36] Ensuite, dans le premier ouvrage cité (Air Power…), de Seversky indique que Douhet et Mitchell ne parlent peut-être pas la même langue que Clausewitz mais ils évoquent le même idiome que Mahan. Plus loin, il écrit que la destruction des forces armées est bien l’objectif de la guerre comme l’indiquait Clausewitz. [37] Une fois de plus, la conception de l’anéantissement semble bien à l’œuvre. Toutefois, de Seversky se démarque de Douhet sur ce point. En effet, pour lui, la puissance aérienne n’a pas pour vocation de briser le moral des populations par des bombardements. Il admet qu’en temps de guerre les victimes civiles sont souvent inévitables dans ces mêmes bombardements, mais cela ne doit pas constituer leur objectif. L’objectif, ce sont les forces armées et le potentiel industriel qui les soutient. Si on en revient à l’ouvrage America: Too Young to Die!, de Seversky y fait également une référence à Clausewitz en indiquant que la guerre est toujours le continuation de la guerre politique par d’autres moyens.[38] A ce propos, il est intéressant de noter que pour l’auteur, l’arme nucléaire n’a pas réellement introduit une véritable coupure dans la façon de penser la guerre. L’arme nucléaire reste une arme comme les autres. Elle est certes plus puissante, mais ne correspond pas à une révolution dans l’histoire de l’armement.[39]
Mais les disciples de la puissance aérienne sont loin de conserver l’entièreté de l’œuvre de Clausewitz. Par exemple, lorsqu’il est question de différenciation entre les niveaux tactique et stratégique, pour l’aviation, la définition du Prussien n’est pas retenue (définition selon laquelle la tactique est concernée par les batailles et la stratégie par l’utilisation de ces batailles à un niveau plus élevé). Les aviateurs considèrent qu’un appareil peut servir pour plusieurs types de mission et ne doit pas être confiné à un échelon déterminé. Par ailleurs, pour eux, la stratégie deviendrait trop facilement la préparation avant la lutte tandis que la tactique se transforme simplement en combat ; seule une barrière temporelle séparerait les deux conceptions.[40]
Pour terminer, il faut encore insister sur le rôle de Douhet, Mitchell et de Seversky dans la formation d’une école de pensée de la force aérienne. Clausewitz reste plus un artifice, voire une « décoration » intellectuelle dans les textes de références de la puissance aérienne. Les conceptions de l’officier italien seront encore évaluées à la lueur des opérations au Vietnam où la puissance aérienne est jugée très importante dans le but de réduire la résistance communiste au sol.[41]
Au niveau de la marine de guerre, il est difficile de trouver des références à Clausewitz en dehors de l’ouvrage Military Strategy – A General Theory of Power Control de l’amiral Wylie, ouvrage publié en 1967. De façon originale, l’auteur mettait en évidence quatre grands paradigmes stratégiques. Il s’agissait des paradigmes de la puissance continentale, navale, aérienne et celui de la guerre populaire. Chacun d’entre eux était représenté par un ou deux théoriciens : Mahan et Corbett pour la puissance navale, Douhet pour la puissance aérienne, Mao Zedong pour la guerre populaire et Clausewitz pour l’approche continentale. Ici, Clausewitz est donc largement ramené à une version de la guerre d’anéantissement et de la bataille décisive. L’auteur faisait une distinction intéressante entre ce qu’il nommait les stratégies cumulative et séquentielle. La stratégie cumulative utilise des moyens économiques et psychologiques et joue, comme son nom l’indique, sur l’effet cumulatif des actions. Au contraire, la stratégie séquentielle vise un but plus direct, bien souvent la destruction pure et simple de l’adversaire ; le nombre en est souvent le facteur principal – c’est bien de cette approche que relèverait Clausewitz. Mais ce qui est peut être encore plus symptomatique, c’est que l’auteur doive combiner le raisonnement de Liddell Hart à celui de Clausewitz pour affirmer que la victoire n’est pas simplement la défaite de l’ennemi sur le champ de bataille par son anéantissement physique – et pour ce faire, il prône la manipulation du centre de gravité. En fait, l’amiral Wylie propose surtout une version améliorée, plus efficace et plus synergique, de la bataille d’anéantissement. Mais, pour lui, la guerre, pour une nation non agressive, doit être vue comme un effondrement de la politique – policy – et non comme sa continuation.[42] Il est vrai que, stricto sensu, l’auteur ne montre qu’un rejet partiel de la Formule. Le texte de l’amiral Wylie reste néanmoins illustratif de la compréhension étroite du lien entre politique et guerre.
Cette compréhension problématique de la Formule se retrouve également chez le président Truman. Le président Harry S. Truman cite Clausewitz à deux reprises dans ses Mémoires. Il écrit d’abord que la guerre est la continuation de la diplomatie par d’autres moyens. Pour lui, cela implique la subordination des militaires au pouvoir politique. A côté de cela, il se sert du Prussien pour justifier la politique de reddition inconditionnelle menée à l’encontre de l’Allemagne.[43] La façon dont Truman accorde cette dernière idée avec celles de Clausewitz reste nébuleuse. On pourra la rapprocher du courant de pensée dit « uptionien », courant d’idée qui remonte au XIXe siècle et provient du général Emory Upton. Selon Upton, le politique et le militaire sont deux sphères séparées ; le politique initie la guerre et le militaire la mène, libre de toutes les contingences civiles. En d’autres termes, là où commence la guerre s’arrête le politique.[44] Cette vision paraît assez similaire à celle de certains officiers prusso-allemands, comme Moltke l’Ancien. A ce propos, dans un article publié en 1982, John E. Tashjean a fait remarquer que la guerre de Corée avait révélé la division entre les tenants de l’école du général Upton et ses opposants. Il s’agissait d’une critique de l’attitude de MacArthur face au pouvoir politique.[45] MacArthur affirmait qu’il n’y avait pas de substitut à la victoire. Il tenta d’outrepasser les directives en provenance de Washington et de mener une guerre totale. William Manchester, le biographe de MacArthur, écrira : Ainsi se trouvait-il plus proche de Ludendorff que de Clausewitz ; il voyait la guerre, non pas comme la politique continuée par d’autres moyens mais comme la conséquence d’un effondrement politique total qui faisait des militaires les syndics d’une faillite.[46] Ajoutons qu’il existe, étonnamment, peu de textes qui ont traité du cas MacArthur sur base de la Formule.[47] Par contre, paradoxalement, on retrouvera des auteurs qui corroborent la vision uptonienne de la guerre en prenant appui sur Clausewitz. Ainsi, dans quelques cas, la Formule est utilisée comme moyen de séparer de manière tranchante guerre et paix. La guerre est alors définie comme l’ultime outil du politique. Cela implique, par exemple, que les négociations ne peuvent se dérouler en même temps que le combat.[48]
Dans cette optique, il existe bien souvent un rejet de la Formule où une compréhension étroite et erronée de celle-ci, combinée avec une foi dans le rôle de l’anéantissement de l’ennemi. En fait, l’école uptonienne justifie le plus souvent son refus de la Formule en considérant que le politique crée des distorsions dans la pratique des opérations. Le but des opérations « logiquement » déduit par cette école est la destruction des forces adverses – leur anéantissement. Or, pour le politique, le but de la guerre n’est pas toujours la destruction de forces adverses. Il s’agit parfois d’envoyer des signaux à l’ennemi.
Quelque part, ce modèle pourrait être lié à une vision technocratique de la conduite des opérations. Croyant se libérer du politique, le mouvement finit par devenir politique en lui-même. La destruction de forces ennemies est bien une décision politique qui repose en ultime mesure sur des croyances, voire une quasi-idéologie, celle de l’efficacité (réelle ou imaginaire).
Samuel P. Huntington apporta aussi une contribution à ce débat au travers de son célèbre ouvrage The Soldier and the State, publié en 1957. Cette étude portait sur les liens entre stratégie et politique, et plus généralement sur le rôle de l’establishment militaire dans la politique de défense américaine. L’auteur marquait sa préférence pour un modèle d’armée américaine professionnel. Son livre, en fait une véritable étude de culture stratégique avant l’heure, analyse le caractère du soldat américain dans l’environnement institutionnel. Pour Huntington, la Formule est l’antithèse de l’idée de croisade si souvent valorisée dans l’histoire militaire américaine. Or, l’idée de la croisade, pour Huntington, coïncide mieux avec l’armée de milice qui est susceptible d’être polarisée par les passions et les sentiments. A contrario, l’armée de métier serait plus détachée par rapport à la guerre.
L’auteur milite pour une meilleure compréhension de la Formule qu’il a tendance à se représenter dans deux dimensions : d’une part vers l’extérieur, une gestion plus instrumentale, et donc potentiellement plus limitée de la violence à destination de nations étrangères ; d’autre part vers l’intérieur, une soumission du militaire au politique en terme quasiment structuralo-fonctionnaliste, allant de pair avec l’idée de la division des pouvoirs propre à toute démocratie. Huntington mettra en évidence le comportement du général MacArthur pendant la guerre de Corée et le considéra, bien évidement, comme impropre au paradigme clausewitzien de soumission du militaire au politique.[49] L’ouvrage de Samuel P. Huntington sera bien reçu au sein de l’armée. Les idées de professionnalisation et de contrôle de la sphère militaire paraissent parfaitement acceptées dans la culture stratégique américaine, même si dans la pratique il existe toujours des MacArthur.[50] Certains reprocheront même à Huntington d’être trop proche des militaires dans son argumentation. L’ouvrage est néanmoins marquant. Il est vrai que le rôle du soldat dans la sphère politique est un débat récurrent dans les écoles militaires aux Etats-Unis.[51]
[1] Doughty R.A., The Evolution of US Army Tactical Doctrine, 1946-1976, Leavenworth Paper n°14, Combat Studies Institute, USCGSC, août 1979, 57 p. Pour une vision plus nuancée, voir aussi : Soutor, K., « To Stem the Red Tide: The German Report Series and Its Effect on American Defense Doctrine, 1948-1954 », The Journal of Military History, octobre 1993, pp. 653-688.
[2] Voir par exemple : Patton O.B., « Colonel Lawrence of Arabia », Military Review, octobre 1954, pp. 18-30 ; Tomlison W.H., « The Father of Airpower Doctrine », Military Review, septembre 1966, pp. 27-31 ; Kreeks R.G., « Beaufre and Total Strategy », Military Review, décembre 1968, pp. 34-40.
[3] Parfois sous forme de reproduction d’articles étrangers, comme: Newman H.D. (R.A.F.), « Mackinder Today », Military Review, août 1952, pp. 92-95 (initialement publié dans R.A.F. Quarterly en juin 1952).
[4] Voir par exemple : Roth I.D., « Atoms and Sea Power », Military Review, septembre 1953, pp. 3-8 ; Millis W., « Sea Power – Abstraction or Asset? », Military Review, mars 1952, p. 3-12 ; Mead Earle E., « The Influence of Air Power Upon History », The Yale Review, juin 1946, pp. 577-600.
[5] Clubb O.E., « Pivot of History », Military Review, février 1957, pp. 3-11. Voir, pour une analyse plus récente : Sloan G., « Sir Halford J. Mackinder : The Heartland Theory Then and Now », The Journal of Strategic Studies, juin-septembre 1999, pp. 15-38.
[6] Franklin W.D., « Mackinder’s Heartland and Escalation Rocket », Military Review, novembre 1966, pp. 32-39.
[7] Sokol A.E., « Sea Power in the Next Age », Military Review, octobre 1952, pp. 11-26.
[8] McIsaac, « Master at Arms: Clausewitz in Full View », Air University Review, janvier-février 1979, p. 83. Collins était un étudiant de Stefan T. Possony. Ce dernier, très proche des milieux de l’U.S. Air Force, avait participé à la première édition du Makers of Modern Strategy en 1943. Bassford Ch., op. cit., p. 262.
[9] Paret P., « Clausewitz – A Bibliographical Survey », art. cit., pp. 272-285.
[10] Id., « On Clausewitz », Military Review, juillet 1965, pp. 46-54.
[11] Gordon W.I., « What Do We Mean by ‘Win’? », Military Review, juin 1966, pp. 3-11.
[12] Strausz-Hupé R., « New Weapons and National Strategy », Military Review, mai 1961, pp. 70-76. L’auteur perçoit l’opposition entre l’U.R.S.S. et les Etats-Unis comme une gigantesque compétition de valeurs et de civilisations.
[13] Voir : U.S. Military Academy, Department of Military Art and Engineering, Clausewitz, Jomini, Schlieffen, West Point, New York, U.S. Military Academy, 1951, (réécrit en partie par Elting J.R.) ; Paret P., « Clausewitz – A Bibliographical Survey », art. cit., pp. 284-285 ; Colson Br., op. cit., p. 282 ; Bassford Ch., op. cit., p. 199 ; correspondance personnelle, Major Michael A. Boden, U.S. Army, Instructor, Department of History, United States Military Academy, West Point, daté du 4 mars 1999.
[14] On War, p. 516 ; référence que le lecteur français pourra trouver dans Clausewitz C. von, De la guerre, (préface de Rougeron C., introduction de Naville P., traduction de l’allemand par Naville D.), Paris, Les Editions de Minuit, 1955, p. 598. (dorénavant, nous mentionnerons juste le titre de l’ouvrage dans les références). Ensuite, dans son histoire sur la Campagne d’Italie de 1796-97, Clausewitz fait référence à Jomini, dont il utilise par ailleurs les cartes. Paret P., « An Unknown Letter by Clausewitz », The Journal of Military History, avril 1991, pp. 147 et 150 ; Colson Br., « Bibliographie Commentée », dans Jomini A. de, Les guerres de la Révolution (1792-1797) – de Jemmapes à la campagne d’Italie, Paris, Hachette, 1998, p. 418.
[15] Wanty E., L’art de la guerre – de l’antiquité chinoise aux guerres napoléoniennes, t. I., Verviers, Marabout Université, 1967, p. 383 et pp. 387-388.
[16] Dupuy T.N. & R.E., Military Heritage of America, New York, McGraw-Hill Book Co., Inc., 1956, 794 p.
[17] Marshall S.L.A., Men against Fire, The Problem of Battle Command in Future War, New York, William Morrow and Company, 1954 (1947), 215 p. (Clausewitz : p. 49, p. 109, p. 120, p. 174).
[18] Reinhardt G.C., « Notes on the Tactical Employment of Atomic Weapons », Military Review, septembre 1962, pp. 28-37 ; Font J.L., « US Offensive and Defensive Strategy », Military Review, septembre 1969, pp. 31-42 ; Sherower A.W., « Napoleon’s Military Strategy », Military Review, août 1966, pp. 87-91 ; Paolini M.G., « The Flashing Sword of Vengeance », Military Review, février 1962, pp. 87-97 ; Gordy S.E., « Is the Defense the Solution? », Military Review, janvier 1959, pp. 58-59.
[19] Magathan W.C., « In Defense of the Army », Military Review, avril 1956, pp. 3-12.
[20] Voir : Douhet G., The Command of the Air, (Il dominio dell’aeria, 1921 – traduit de l’italien par Fischer Sh.), Roma, « Revista Aeronautica » E./Edizione Furi Commercio, 1958, 202 p. Voir aussi : Warner E., « Douhet, Mitchell, Seversky: les théories de la guerre aérienne », dans Mead Earle E. (éd.), Les maîtres de la stratégie, vol. 2, op.cit., pp. 245-267 ; Chaliand G. et Blin A., Dictionnaire de stratégie militaire, Paris, Perrin, 1998, pp. 185-187. On consultera aussi : Facon P., Le bombardement stratégique, Monaco, Ed. du Rocher, 1996, pp. 55-73.
[21] Segré Cl.G., « Giulio Douhet: Strategist, Theorist, Prophet? », The Journal of Strategic Studies, septembre 1992, p. 362 ; Hammond G.T., « Landmark in Defense Literature – Command of the Air », Defense Analysis, avril 2000, p. 101.
[22] Constatons aussi que Smith a écrit un ouvrage en collaboration avec le général Curtis E. LeMay du S.A.C. en 1968. Cet ouvrage fait quelques références a Clausewitz, plutôt péjoratif, remettant en cause la validité des idées du Prussien à l’époque du nucléaire. De plus, les auteurs semblent assimiler les néo-clausewitziens à l’idée de la dissuasion à tout prix. LeMay C.E. & Smith D.O., America Is in Danger, New York, Funk & Wagnalls, 1968, pp. 297 ; 299 ; 307.
[23] Smith D.O., US Military Doctrine – A Study and Appraisal, New York, Dual, Sloan & Pearce, 1955, pp. 46 ; 55 ; 59 ; 74-76. Voir aussi : id. (with Barker J.DeF.), « Air Power Indivisible », Air University Quarterly Review, automne 1950, pp. 5-18.
[24] Voir à propos de ces notions : Freedman L., The Evolution of Nuclear Strategy, Londres, The MacMillan Press Ltd., 1981, pp. 125-127.
[25] McDonnel R.H., « Clausewitz and Strategic Bombing », Air University Review, printemps 1953, pp. 43-54.
[26] Jones A., « Jomini and the Strategy of the American Civil War, A Reinterpretation », Military Affairs, décembre 1970, p. 130.
[27] Kissinger H., Nuclear Weapons and Foreign Policy, New York, Harper & Brother, 1957, p. 441.
[28] Cushman J.H., « Books of Interest to the Military Reader – US Military Doctrine », Military Review, septembre 1955, p. 112 ; Magathan W.C., art. cit., pp. 3-12.
[29] Kleinman F.K. et Horowitz R.S., The Modern United States Army, Princeton, D. van Nostrand Company, Inc., 1964, p. 44.
[30] Kintner W.R. , « A Survey of Air Power », Military Review, avril 1949, pp. 29-35 ; Tomlison W.H., art. cit., pp. 27-31.
[31] Respectivement : Trachtenberg M., « A « Wasting » Asset – American Strategy and the Shifting Nuclear Balance, 1949-1954″, International Security, hiver 1988/89, p. 37 et Gaddis J.L., Strategies of Containment, Oxford, Oxford University Press, 1982, p. 188. Le lecteur pourra aussi consulter Bassford Ch., op. cit., pp. 157-162.
[32] De Seversky A.P., Air Power: Key to Survival – with a prologue on the lessons of Korea, NY, Simon & Schuster, 1950, pp. ix-x.
[33] L’auteur est toutefois critique vis-à-vis de Douhet. Par exemple, de Seversky ne pense pas que l’idée de Douhet de produire un seul type d’avion militaire est valable. Ibid., p. 89.
[34] Idée que l’on retrouve aussi chez : Mead Earle E., « The Influence of Air Power Upon History », art. cit., pp. 577-600.
[35] De Seversky, op. cit., p. 120.
[36] Id., America: Too Young to Die!, NY, Macfadden Book, 1962, p. 125.
[37] Id., Air Power: Key to Survival, op. cit., p. 39 et p. 74.
[38] Id., America: Too Young to Die!, op. cit., p. 137.
[39] De Seversky justifie particulièrement ce point dans Air Power… Il base son point de vue sur des visites sur les sites de Hiroshima, Nagasaki et sur l’atoll Bikini.
[40] Browne R.J., « Tac vs. Strat », Military Review, avril 1948, pp. 33-37.
[41] Franklin W.D., « Douhet Revisited », Military Review, novembre 1967, pp. 65-69.
[42] Wylie J.C., Military Strategy – A General Theory of Power Control, New Brunswick, Rutger University Press, 1967, 111 p.
[43] Truman H.S., Year of Decision – 1945, vol. 1, Bungay, Hodder and Stoughton, 1955, p. 127.
[44] Weigley R.F., « American Strategy from Its Beginnings through the First World War », dans Paret P., Makers of Modern Strategy (from Machiavelli to the Nuclear Age), Oxford, Clarendon Press, 1986, p. 438.
[45] Tashjean J.E., « The Transatlantic Clausewitz », Naval War College Review, vol. 35, n°6, 1982, p. 71. L’auteur de l’article postule l’existence d’une division géographique des deux écoles : les détracteurs de Upton se retrouveraient majoritairement dans le Nord des Etats-Unis – snowbelt -, ses disciples plutôt dans le Sud – sunbelt. J.E. Tashjean prend l’exemple des théories de l’Airpower, lié à l’école de Upton, dont les principaux acteurs proviennent de Californie et ensuite du Texas. De plus, il note l’opposition entre deux tendances dans le caractère américain quant à la façon d’appréhender les relations internationales. La première est représentée par des idées pratiques, le commerce et l’internationalisme. On retrouve des traces de cette tendance sur la côte est parmi les républicains internationalistes. La seconde école est caractérisée par son côté utopique, théologique et isolationniste.
[46] Manchester W., MacArthur – Un césar américain, (traduit de l’américain, American Caesar, 1978), Paris, Robert Laffont, 1981, p. 516.
[47] Voir tout de même : Rees D., Korea: The Limited War, Londres, MacMillan & Co. Ltd., 1964, pp. xi, xiii et xiv ; Spanier J.W., The Truman-MacArthur Controversy and the Korean War, Cambridge, The Belknap Press of Harvard University Press, 1959, p. 3 et pp. 276-277. A titre indicatif, voir aussi, en français : Silvain R., « Clausewitz et la guerre de Corée », Revue politique et parlementaire, Octobre 1951, pp. 165-172.
[48] Welch G.P., « Cannae – 216 B.C. », Military Review, juin 1953, pp. 3-14 ; Heller F.H., « The President as Commander in Chief », Military Review, septembre 1962, pp. 5-17 ; Sackton F.J., « The Changing Nature of War », Military Review, novembre 1954, pp. 52-62.
[49] Huntington S.P., The Soldier and The State, Harvard, Harvard University Press, 1957, 534 p.
[50] Singland J.K., « Books of Interest to the Military Reader – The Soldier and the State », Military Review, novembre 1957, p. 112.
[51] Higgs J., « Landmark in Defense Literature – Soldier and the State », Defense Analysis, décembre 2000, pp. 345-346.