Les difficultés pour mettre en place un système efficace d’approvisionnement dans la première moitié du XVIIe siècle n’avaient permis au royaume ni de produire beaucoup de salpêtre, ni de disposer d’importantes réserves, d’autant que la France avait été souvent en guerre. D’après les inventaires commandés par le maréchal d’Humières [1] en 1665-1668, la France pouvait compter sur environ 3.000.000 de livres de poudre [2]. A titre de comparaison, les provinces de Picardie , du Boulonnais , de l’Artois , de Flandre et du Hainaut réunies en possédaient 4.511.504 livres en 1689 [3]. Compte tenu des effectifs des armées de l’époque et du nombre de canons emportés dans les équipages, les besoins étaient nettement inférieurs à ceux des guerres suivantes. Malgré cela, cette quantité apparaît remarquablement faible, surtout à la veille de la guerre de Hollande .
I – 1664-1698 : Un effort particulier d’approvi-sionnement :
Dès le traité des Pyrénées , Le Tellier fit le même constat et voulut développer la fabrication du salpêtre et de la poudre, confiée à François Berthelot en 1664 [4]. Contrairement aux marchés suivants, nulle part il n’était fait mention d’une éventuelle réduction des commandes prévues, au contraire, la fourniture de 200.000 livres par an pouvait même être éventuellement doublée. Sur cette quantité, seul le quart était destiné aux arsenaux de la Marine, preuve que l’effort réalisé l’était avant tout pour l’armée de terre. Au-delà de la nécessité de remplir les magasins du royaume, cet encouragement de la production avait également deux autres buts :
– accroître le nombre d’ateliers de salpêtriers.
– limiter les achats à l’étranger toujours trop coûteux [5].
1 – La mise à contribution du royaume :
Manquant de documents statistiques pour les vingt années qui suivirent ce bail, il est difficile d’étudier l’évolution de la production de poudre et l’approvisionnement des magasins. Cependant, il existe très peu de lettres faisant état d’un problème quelconque à ce sujet, notamment au cours de la guerre de Hollande , d’autant qu’il est certain que la production augmenta très fortement. Au début de l’année 1689, les arsenaux de l’artillerie contenaient 10.264.005 livres de poudre, soit trois fois plus qu’en 1668 [6]. Cette très forte progression prouve que, non seulement Berthelot respecta les termes de son marché, mais qu’il dut aussi obligatoirement faire face à des commandes supplémentaires. Les conditions dans lesquelles se déroulèrent le bail de Claude Durié laissent à penser que cet effort fut sans doute réalisé au détriment de la qualité. Passé en 1684, celui-ci portait sur des quantités jamais demandées jusqu’alors (800.000 livres par an) or, au bout de trois ans, l’adjudicataire avoua ne plus pouvoir faire face à ses engagements, non en raison de la quantité, mais de la qualité désormais exigée depuis les ordonnances de 1686 [7]. Si cette situation était nouvelle, c’est que la poudre livrée par son prédécesseur n’était pas non plus d’une excellente qualité.
Dernier élément, seuls des achats à l’étranger avaient pu permettre une telle augmentation des stocks. La lettre du 30 octobre 1689, adressée par Louvois aux intendants pour encourager la production de salpêtre, le prouve
« Les soins que prennent les ennemis pour empêcher que l’on ne puisse tirer du selpetre d’Hollande ny d’Angleterre rendent la recherche des dits selpetres en France (…) beaucoup plus nécessaire qu’elle n’a esté par le passé [8]. »
L’année suivante, François Berthelot devait confirmer l’efficacité de ce blocus imposé par les puissances maritimes.
« Le marchand de Lille (…), m’a dit qu’il n’espéroit plus rien du costé de Londres car il est désormais fait défense de sortir ny poudre, ny salpêtre, ny plomb sans déclaration [9]. »
Si l’urgence avait été révélée par le déclenchement de la guerre de la ligue d’Augsbourg , il est probable que le ministre avait envisagé cet effort dès 1686. Voyant en Berthelot l’homme de la situation, il lui fallait récupérer le bail de Claude Durié en 1687, ce qui expliquerait la dureté des ordonnances prises l’année précédente sur la qualité des poudres. Contrairement à cette période, l’entrée en guerre des Provinces Unies et de l’Angleterre contre la France limitait le recours aux marchands étrangers, d’où la nécessité de développer la production intérieure de salpêtre. Sur ce point, Louvois était très clair : les intendants devaient tout faire de façon à ce “que l’on puisse tirer dans le Royaume toute la plus grande quantité qu’il sera possible [10]. »
Au moment de la rédaction de cette lettre, la production française s’élevait à 1.679.518 livres [11]. Avec une telle quantité, il était impossible de produire plus de 1.500.000 à 2.000.000 de livres de poudre, y comprit celle fabriquée pour les particuliers or, au vu des événements, cela s’avérait insuffisant, et pourtant, jamais le royaume n’en avait produit autant. En outre, les provinces n’étaient pas toutes sur un pied d’égalité, certaines étant beaucoup plus riches en salpêtre, comme c’était le cas de Paris dont la récolte était la première du royaume avec 552.654 livres par an, soit le tiers de la production de la France. La généralité de Tours était également très réputée avec près de 300.000 livres par an, avec en premier lieu les villes de Chinon et de Saumur . La réputation de cette province tenait dans la nature de ses maisons dont un grand nombre étaient construites en tuf, pierre s’abîmant relativement vite et produisant ainsi une grande quantité de salpêtre [12]. La destruction d’une habitation était souvent une véritable aubaine pour les salpêtriers. Venaient après les généralités de Toulouse (163.534 livres) et de Montpellier (137.748 livres) et, à un degré moindre, celle d’Aix (98.400 livres).
D’autres régions s’avéraient en revanche d’une grande pauvreté, telles les provinces du nord, qui ne produisaient guère plus de 17.000 livres par an, essentiellement autour d’Amiens et de La Fère . Les moulins à poudre de Brébières (près de Douai ), de Prouvy (près de Valenciennes ), d’Esquerdes (près de Saint-Omer ) et de La Fère fonctionnaient donc essentiellement avec du salpêtre provenant d’autres provinces, et en particulier de Paris. Ce n’était pas là un cas unique, les généralités de Limoges , de Grenoble et de Perpignan n’avaient strictement aucune activité en la matière à cette époque.
Le problème n’était pas seulement celui des ressources potentielles de ces provinces, mais aussi celui de pouvoir y développer, ou simplement d’y implanter, des ateliers de salpêtriers. En Flandre , l’intendant n’avait guère trouvé que trois anciens ouvriers capables de reprendre cette activité. Ces derniers avaient quitté leur métier, faute de pouvoir vendre leur salpêtre à François Berthelot qui le jugeait trop cher, mais cette fois, il ne pouvait faire autrement que d’accéder à leur demande en le payant entre 9 et 10 sols par livre, soit près du double des prix pratiqués à Paris [13]. Un effort similaire fut demandé au Roussillon , à tel point qu’à la fin de l’année 1689, il existait 9 ateliers dans la province et 11 l’année suivante. La production, nulle au début de la guerre, passa ainsi à 50.000 livres au début de 1690 puis à 82.000 livres à la fin de l’année.
Une telle progression était déjà spectaculaire, mais l’ambition de Louvois , puis de Barbezieux , allait bien au-delà comme en témoigne le marché de Grandchamp , signé en 1690.
« Le dit Granchamp pourra faire à ses frais et dépens, dans toutes les villes et bourgs où bon luy semblera, les establissements nécessaires pour porter la fabrique des selpestres dans nostre Royaume, jusqu’à la quantité de trois millions de selpestre brut par an, et rétablir la recherche et amas du dit selpestre dans les lieux où elle avoit esté négligée ou abandonnée [14]. »
Lorsque fut rédigé ce bail, la production avait déjà augmenté de 1.150.000 livres en seulement l’espace d’une année. Toutes les généralités avaient été mises à contribution, y compris celle de Limoges , décidément pauvre en cette matière, puisqu’elle ne put jamais en fournir plus de 3.000 livres par an. Les résultats les plus spectaculaires avaient été atteints dans le Roussillon , en Bourgogne (+ 88.000 livres en un an), dans la généralité de Montpellie r (+ 80.000 livres), de Toulouse (+ 107.000 livres) et de Tours (+ 208.000 livres). En 1691, l’objectif fixé par le marché était atteint et même dépassé, le royaume produisant alors 3.647.767 livres. En moins de quatre ans, la production avait triplé [15].
Nous ne disposons malheureusement pas des chiffres pour les années suivantes, mais il est probable que le pays ne pouvait guère produire plus de 4.000.000 de livres par an. Naturellement, les livraisons de poudre augmentèrent dans les mêmes proportions. Si Grandchamp avait été tenu d’en livrer 2.200.000 livres par an, ses fournitures furent bien supérieures à ses promesses. “Par son application”, il put en livrer jusqu’à 4.000.000 par an, soit pour l’ensemble de son bail, une moyenne de 3.000.000 par an [16]. De telles livraisons n’avaient pu se faire sans l’aide de l’étranger, les moulins à poudre français n’ayant pas la capacité d’en fabriquer une telle quantité chaque année.
Selon Surirey de Saint-Rémy , 26 moulins fonctionnaient dans tout le royaume à cette époque, représentant une production potentielle de 3.450.000 livres par an [17]. Pourtant, certains moulins ne pouvant fonctionner toute l’année, notamment lors des basses eaux, la production devait être un peu moins importante. Le plus grand établissement était situé à Essonne , au sud de Paris, première région pour la récolte du salpêtre. Avec ses quatre batteries totalisant 63 mortiers, ce moulin pouvait fabriquer jusqu’à 1.500 livres par jour, soit 450.000 livres par an. Une telle quantité n’était évidemment pas destinée à la consommation locale mais redistribuée dans tout le royaume et, en premier lieu, vers la frontière du nord. Celle-ci, pauvre en salpêtre, disposait néanmoins de quatre moulins d’une capacité cumulée de 660.000 livres par an. Ceux-ci servaient non seulement à fabriquer des poudres neuves grâce au salpêtre venant d’autres régions, mais aussi à radouber les poudres défectueuses des nombreuses places environnantes. Sans cette proximité, le transport aurait fait augmenter le prix du radoub de façon spectaculaire. Le plus petit était celui de La Fère avec ses 28 mortiers, alors que Brébières , Prouvy et Esquerdes en possédaient chacun 48. Après Essonne , seuls six établissements [18] disposaient d’une telle capacité au XVIIe siècle : les trois cités précédemment plus ceux de Limoges , de Saint-Jean d’Angély et Saint-Chamas , ces deux derniers travaillant essentiellement pour la Marine.
La production des poudres en Alsace était assurée par quatre moulins de taille relativement modeste : Sélestat , Brisach , Fribourg et Belfort qui, avec leur capacité de 360.000 livres par an, ne suffisaient pas approvisionner la province et à assurer en même temps le rétablissement des poudres. Une grande partie de l’approvisionnement des places était assurée par les établissements de Metz , de Verdun et d’Arcier (près de Besançon ). L’exemple de l’Alsace au début de la guerre de la ligue d’Augsbourg prouve que Berthelot ne disposait pas d’une quantité suffisante de moulins pour assurer les termes de son marché. Afin d’augmenter les livraisons, le commissaire général des poudres et salpêtres fit travailler tous les moulins à la fabrication de poudres neuves, remettant à plus tard le remplacement des poudres hors de service, lesquelles se montaient tout de même à 592.731 livres au début de l’année 1690 [19]. Or, pour assurer ce radoub, Berthelot aurait dû faire cesser toute production en Alsace pendant 18 mois, ce qui était inconcevable compte tenu des besoins de la province.
La Frézelière [20], lieutenant-général de l’artillerie en Alsace , approuva cette décision, d’autant qu’il craignait d’être confronté à la pénurie.
« Si Monsieur Berthelot ne se presse de remplacer les poudres que je prendray dans les dittes places de derrière pour en munir celles qui sont les plus exposées, il y en restera très peu, c’est pourquoy il est bien nécessaire que le dit sieur Berthelot fournisse les poudres neuves qu’il nous a promis le plus promptement qu’il sera possible afin que les dittes places de derrière n’en demeurent pas dégarnies [21]. »
La Frézelière considérait d’autant plus nécessaire de donner la priorité aux poudres neuves qu’il jugeait toujours possible d’utiliser celles de moins bonne qualité en cas d’extrême urgence [22]. Même si les besoins d’une frontière exposée comme celle de l’Alsace étaient supérieurs à ceux d’autres provinces, cet exemple peut être appliqué à l’ensemble du royaume. Grâce aux inventaires généraux d’artillerie, nous pouvons évaluer les provinces qui eurent la priorité quant à leur approvisionnement durant la guerre de la ligue d’Augsbourg .
2 – La répartition de la poudre dans les provinces :
Naturellement, celles du nord disposaient des plus grandes quantités de poudre, entre 42 et 45% de toutes celles recensées dans les magasins du royaume, plus de la moitié étant destinée à la Flandre [23]. C’était d’ailleurs une des rares provinces à disposer de plus de 2.000.000 de livres de poudre. Le Hainaut , lui aussi exposé, était également bien doté. La Picardie , le Boulonnais et l’Artois servaient de réserves pour les deux provinces citées précédemment. Cette organisation, déjà décrite quant à la répartition des pièces se retrouvait au niveau des places fortes.
Excepté Cambrai , aucune ville de Picardie ne disposait de plus de 50.000 livres de poudre, la moyenne se situant entre 20 et 25.000 livres. En Artois , Arras constituait le seul grand magasin de la région, mais Hesdin et Bapaume possédaient déjà de 30 à 35.000 livres chacune. Le Boulonnais était un cas particulier, Calai s concentrant les deux tiers des poudres de la province, soit plus de 200.000 livres . Évidemment, aucune ville de Flandre ou du Hainaut ne disposait de moins de 100.000 livres, excepté quelques forts comme celui de la Kenocque ou celui de François d’Aire . Les grands arsenaux de la première ligne, à l’image de Lille ou d’Ypres , chargés de conserver les poudres nécessaires pour les campagnes militaires, en renfermaient en moyenne de 300 à 350.000 livres. Tournai à elle seule en possédait plus que la plupart des provinces du royaume, avec ses 593.732 livres [24]. Cette organisation n’évolua guère tout au long du conflit, mais il faut noter que l’accroissement des approvisionnements sur cette frontière ne profita qu’aux places de Flandre et du Hainaut. En 1698, 1.032.471 livres de poudre étaient entreposées dans les magasins de Tournai [25].
Quant aux autres provinces, les mieux dotées étaient celles dont les frontières étaient les plus menacées : l’Alsace , le Roussillo n, les places de la Sarre et le Dauphiné . Les places des côtes de l’Atlantique et de la Manche étaient en revanche particulièrement délaissées, la Normandie ne disposant que de 65.372 livres. L’évolution des stocks de poudre par province entre 1689 et 1691 est intéressante, car elle prouve que toutes ne bénéficièrent pas dans la même mesure des efforts de production [26].
Ce fut le cas du nord dont la part diminua même légèrement, passant de 43,9% à 42,2%, ainsi que de provinces moins directement exposées comme la Champagne ou le Languedoc . La Sarre et l’Alsace furent en revanche privilégiées mais le changement le plus notable s’observa dans les provinces côtières. La guerre contre les puissances maritimes l’imposant, La Provence , l’Aunis , la Bretagne et la Normandie virent leurs stocks de poudre quasiment doubler en deux ans. Ce phénomène se poursuivit tout au long de la guerre, et en 1702, la Provence faisait même partie du cercle très fermé des régions disposant de plus d’un million de livres de poudre [27]. Le cas de Lyon était un peu particulier. Cette place ne disposa d’aucune quantité de poudre de 1689 à 1691. Par la suite, considérant plus judicieux d’y constituer une réserve afin de pouvoir approvisionner soit les villes du Dauphiné , soit celles de Provence ou celles du Roussillon , il fut décidé de remplir ses magasins. En 1702, la ville disposait ainsi d’un peu plus de 300.000 livres de poudre.
L’effort fourni pendant la guerre de la ligue d’Augsbourg fut colossal. En une dizaine d’années, la poudre dont pouvait disposer le royaume avait doublé, passant d’environ 10.000.000 de livres à plus de 20.000.000 [28], et pourtant, cela semblait encore insuffisant. Alors que la plupart des provinces se transformaient en vastes magasins à poudre, certaines d’entre elles, comme la Picardie , la Champagne ou le Languedoc , virent leurs réserves transférées vers des places plus exposées. Ceci prouve que les besoins étaient toujours plus importants en raison des effectifs toujours plus nombreux des armées et de la taille plus grande des équipages d’artillerie. Bien qu’il ait été beaucoup demandé aux salpêtriers du royaume, la France n’avait pas pu se passer des marchands étrangers pour atteindre un tel résultat.
3 – Le recours à l’étranger :
Les filières traditionnelles anglaises et surtout hollandaises étant coupées, il fallut se tourner vers d’autres fournisseurs. En 1689, en plein développement de la production du salpêtre dans le Roussillon , l’intendant de cette province essayait de s’en procurer en Aragon et à Gironne [29]. L’Italie pouvait aussi se révéler une excellente source d’approvisionnement, non seulement par sa propre production, mais également par son commerce avec d’autres pays. Ainsi, le salpêtre hollandais était livré dans les grands ports de la péninsule, et en particulier à Gênes où les français pouvaient l’acheter malgré la concurrence de la république de Venise [30]. Mais incontestablement, la principale source d’approvisionnement pour la France fut la Suisse .
Les représentants du roi ne s’inquiétèrent guère des réserves disponibles dans les cantons helvétiques.
« Si le Roy a besoin de poudre, je trouveray le moyen d’en avoir une quantité considérable vendue en cette ville (Bâle ), d’où je ne doute pas que le magistrat me permette de la tirer [31]. »
En fait, leurs soucis étaient ailleurs.
L’imbrication des cantons catholiques et protestants compliquait singulièrement le commerce avec la France depuis la révocation de l’édit de Nantes. Si les marchands vivaient à Bâle , la poudre venait de l’est de la confédération, dans la région de Saint-Gall . Or, pour apporter cette marchandise à Huningue , il fallait obligatoirement traverser des terres protestantes, hostiles à la France, la route directe traversant le canton de Zurich mais, selon Puizieux , il n’y avait pas “de quartier à espérer” de ce côté [32]. Il fallait donc traverser le canton de Berne , lui aussi protestant, mais un peu moins scrupuleux dans ses contrôles. Grâce à des passeports, les marchands pouvaient faire passer quelques dizaines de quintaux. Pourtant, il était hors de question de le traverser avec près de 400 quintaux, même en surchargeant les chariots, ce qu’envisageait très sérieusement Puizieux. La seule solution pour y faire passer des quantités plus importantes était de multiplier les routes, en prenant soin d’éviter les villes et les gros bourgs. Celle permettant d’atteindre Olten , passait par l’extrême nord du canton mais présentait l’inconvénient de n’être praticable que par des hommes et des chevaux, et non par des chariots. Un autre chemin passait par Saint-Urban , dans le canton de Lucerne , puis près de Langenthal et rejoignait l’Aar au nord de Soleure . En multipliant les convois, Puizieux espérait aussi tromper la vigilance des bernois. Une fois arrivée à Soleure, la poudre était conduite à Dornach , à une dizaine de kilomètres au sud de Bâle . Il suffisait alors de traverser la frontière pour rejoindre Huningue .
Pour pouvoir se justifier d’un tel commerce avec la France vis à vis des protestants, les marchands suisses demandaient à être payés en blé “afin de s’excuser en disant qu’ils ont changé de la poudre pour du blé”. Certains avaient vite compris la bonne affaire qu’ils pouvaient réaliser en utilisant un tel prétexte. Arguant qu’ils risquaient de perdre de l’argent avec un tel échange, ils souhaitaient obtenir le blé à des prix souvent 1 à 2 livres tournois au-dessous du coût réel d’un sac. Puizieux jugeaient ces conditions déraisonnables, mais il n’était plus en position de force pour négocier, tout comme sur la marchandise à livrer [33].
La France aurait préféré acheter du salpêtre plutôt que de la poudre, mais les marchands suisses étaient très réticents. En 1689, seulement 7.489 livres de salpêtre avait été livré à Huningu e pour 24.174 livres de poudre [34]. Puizieux s’interrogeait sur les raisons qui poussaient les suisses à ne pas vouloir en livrer davantage et pourtant, celles-ci semblaient claires [35]. Les malversations, donc des bénéfices, étaient beaucoup plus faciles à réaliser sur la poudre (composition moins riche en salpêtre, poudres neuves mélangées à des poudres hors de service…) que sur le salpêtre, et les marchands ne s’en privaient pas. En 1706, Pléneuf mit en garde Chamillart sur la qualité des poudres helvétiques, apparemment réputées pour leur piètre qualité.
« Je dois prendre la liberté de vous faire observer qu’il ne convient point de prendre de la poudre en Suisse dont la qualité vous attireroit des plaintes bien ou mal fondées [36]. »
Dans le cas présent, son conseil était digne de foi, le commissaire général des poudres et salpêtres n’ayant aucun intérêt dans l’affaire en cours. Selon lui, il fallait effectivement mieux acheter du salpêtre.
Prudent (ou échaudé), Puizieux prit désormais ses précautions à chaque livraison pour contrôler la marchandise
« Je n’ay jamais manqué depuis votre premier ordre, il y a un an de faire vuider entièrement tous les tonneaux de poudre que je reçoy dans d’autres avant de les remettre dans nos magasins [37]. »
Cette lettre prouve que la qualité des tonneaux suisses laissait particulièrement à désirer car pour ceux de la ferme des poudres, rarement irréprochables, aucune mesure de la sorte ne fut jamais envisagée. Cette méfiance est confirmée par une autre lettre concernant l’un des fournisseurs.
« Le sieur Bruch limite ses représentations à recevoir une avance de deux mil écus (…) j’estimerois qu’on luy pourroit accorder sa demande, mais je me fie peu à la bonne foy des suisses et il sauroit à propos qu’il donna une caution soit dans Basle ou ailleurs pour cette somme [38]. »
Puizieux n’était pas opposé au versement d’un acompte car tous les marchands en réclamaient un, quand ils ne voulaient pas être payés totalement avant la livraison. Or, les liquidités commençaient à manquer et, même si cela ne semblait guère l’inquiéter, il reconnaissait ne plus pouvoir régler ni la poudre, ni le salpêtre venant de Suisse . Il affirmait cependant qu’il trouverait toujours des personnes prêtes à lui faire crédit pour quelques milliers d’écus, à Bâle [39]. Dans de telles conditions, il était difficile d’être très regardant sur l’honnêteté supposée de ses interlocuteurs.
Les français n’étaient pas les seuls clients des cantons suisses, ni les seuls à avoir des problèmes pour y acheter de la poudre à des prix de plus en plus élevés. Les impériaux, eux aussi, s’y approvisionnaient. En 1690, ils refusèrent même une offre de marchands de Schaffhouse , lesquels se tournèrent vers la France. Puizieu x en déduisit que la France n’était pas la seule à manquer d’argent [40]. Ces achats à l’étranger étaient naturellement motivés par le besoin urgent de disposer de poudre, mais ils permettaient également de priver l’adversaire de telles ressources, et ceci était tout aussi vrai pour le cuivre, l’étain ou le plomb [41]. Dans ce domaine, la Suisse fut une plaque tournante de tout ce qui était nécessaire à l’artillerie. Nous ignorons les quantités importées de Suisse durant la guerre de la ligue d’Augsbourg mais, selon Berthelot de Pléneuf , elles avaient été assez considérables [42].
Toutes les propositions des vendeurs étrangers étaient toujours prises en compte, même de l’autre côté de la Méditerrané e. Ainsi, en 1704, un contact fut établi avec le bey de Tunis pour obtenir du salpêtre. Celui-ci était prêt à en fournir à condition d’être payé, non en argent, ni en blé comme les suisses, mais en canons de fer et en boulets. Selon l’intendant de Provence , ce marché était impensable.
« Vous sçavez que par les lois du Royaume et encore par celles de la religion, il est expressément défendu de porter aux turcs et autres infidèles qui sont continuellement armés contre les chrestiens de canons, boulets et autres instruments et munitions de guerre [43]. »
La France ayant besoin de salpêtre, il était pourtant difficile de refuser une telle offre. L’intendant proposa alors de verser une somme d’argent, et Chamillart lui donna raison.
Tous ces efforts permirent à la France de disposer d’un peu plus de 18.000.000 de livres de poudre à la fin de la guerre de la ligue d’Augsbourg mais c’est en janvier 1702 que le royaume eut la plus grande quantité de poudre dans ses magasins (20.533.574 livres) [44]. Ceci ne signifie pas qu’il y ait eu une augmentation des commandes durant la courte période de paix, mais la consommation avait tout simplement chuté. La situation semblait propice à une diminution de livraisons de poudre. Ce fut le cas avec le nouveau bail signé en 1699 avec Jacques Deshayes .
« Nous nous trouvons fort au-dessus doresnavant la fabrique des salpestres aussi loin qu’elle peut aller [45]. »
Cette phrase allait être lourde de conséquences dans les années suivantes.
II – 1698-1765 : Une difficile gestion des maga-sins :
1 – L’épreuve de la guerre de succession d’Espagne :
Le nouveau fermier s’engageait à fournir 1.500.000 livres de poudre par an [46], quantité certes inférieure à celle de son prédécesseur, mais tout de même très importante comparée aux marchés de François Berthelot . Cela aurait été largement suffisant en temps de paix, mais la guerre de succession d’Espagne changea les données :
– les effectifs toujours plus importants des armées et le grand nombre de canons emportés à leur suite augmentaient la consommation.
– l’alliance avec l’Espagne était loin d’être un avantage.
L’état pour le moins inquiétant des magasins des places espagnoles aux Pays-Bas imposait soit de les abandonner, soit de les renforcer, et seule la France pouvait le faire [47]. Suivant les recommandations de Boufflers [48], 330.070 livres de poudre furent envoyées dans les places de Gueldres : Venlo , Ruremonde et Stevenswert [49]. La situation n’étant pas meilleure dans la péninsule ibérique, il fallut vider les places de Guyenne et surtout du Roussillon pour porter secours à Philippe V . Le problème était identique dans le Milanais .
Comme toutes les frontières étaient potentiellement menacées ou devaient soutenir une opération en territoire étranger (comme le Dauphiné en Italie ), il était difficile de dégager des priorités quant au ravitaillement. Seule une augmentation des fournitures de la ferme aurait permis d’y faire face. La politique menée par Louvois et Barbezieux pour développer au maximum la production de salpêtre dans le royaume avait eu un effet pervers, celui d’épuiser les provinces en salpêtre. En 1701, il ne fallait pas espérer pouvoir en tirer plus de 2.600.000 livres. Le Languedoc et le Roussillon ne pouvaient plus en fournir que 160.000 livres au lieu des 500.000 livres récoltées quelques années auparavant, et le Dauphiné, la Bourgogne , la Picardie , la Flandre , la Champagne et la Normandie ne pouvaient être d’aucun secours vu la piètre qualité de leurs terres. Comme à la veille de la guerre de la ligue d’Augsbourg , plus de la moitié de la récolte du pays (57%) reposait sur les généralités de Tours et de Paris. Cette situation était d’autant plus délicate pour le fermier qu’elle l’obligeait à de coûteux transports pour l’apporter dans des moulins parfois éloignés de plusieurs centaines de kilomètres. En 1700, l’établissement de Saint-Chamas utilisait du salpêtre angevin [50].
L’appauvrissement des sols entraînait obligatoirement le ralentissement de l’activité des ateliers de salpêtre, et même la fermeture d’un certain nombre d’entre eux qu’il est malheureusement impossible d’évaluer. Or, il était plus facile de réduire cette activité que de la relancer. Pour des raisons financières, jusqu’en 1765 la politique d’approvisionnement des poudres conduisit fréquemment à des situations semblables.
Même si le nouveau bail, signé avec Paulmier en 1706 [51], prévoyait une fourniture de 2.400.000 livres de poudre par an, les ressources du royaume ne le permettaient plus rendant le recours à l’étranger et à la compagnie des Indes encore plus indispensable qu’au cours du conflit précédent. Le second souci de la ferme était, comme nous l’avons vu, le retard des paiements de la part du roi, lesquels entraînaient une incapacité pour l’adjudicataire de régler les livraisons de salpêtre, obligeant les ateliers à fermer. Au début de l’année 1709, Berthelot de Belloy alerta le secrétaire d’État à la guerre sur la gravité de la situation.
« Les fermiers des poudres représentent que leur service manque et tombera entièrement faute d’être secouru (…), les salpêtriers menaçant de tout abandonner s’ils ne sont pas payés ponctuellement en espèces à chaque livraison du prix entier de leur salpêtre [52]. »
La conséquence de cette situation financière fut l’impossibilité à compenser les pertes de la guerre, ces dernières étant d’autant plus lourdes que de nombreuses places de Flandre étaient tombées aux mains des adversaires. Aussi ne faut-il pas s’étonner si en 1711, on ne comptait plus que 2.238.924 livres de poudre dans cette province au lieu des 4.011.370 livres dont elle disposait cinq ans plus tôt. Dans l’ensemble du royaume, il ne restait plus que 14.718.822 livres de poudre, soit à peu près autant qu’en 1692-1693 [53].
2 – La reconstitution des stocks :
Contrairement à la fabrication des bouches à feu, l’approvisionnement en poudre et en salpêtre ne fut pas interrompu après la guerre de succession d’Espagne , bien qu’elle fut tout de même très réduite. Cette période fut d’abord marquée par une concentration de la fabrication des poudres. Au lieu des 26 moulins en service à la fin du XVIIe siècle, la ferme n’en exploita que 17. Pour certains d’entre eux ce n’était pas là le résultat d’un choix mais une conséquence de la guerre. Brisach et Fribourg n’appartenaient plus à la France. Brébières et Prouvy , deux des plus grands moulins du royaume, avaient été détruits par les armées alliées lors de leurs offensives de 1709-1710. Envisagée un instant, leur reconstruction avait été abandonnée, ces deux établissements étant jugés trop vulnérables car trop près de la frontière. Pour les sept autres, nous ignorons les raisons de leur abandon. Certains, situés trop loin des arsenaux ou dans des régions pauvres en salpêtre, furent abandonnés car jugés trop chers à exploiter. Ce fut sans doute le cas pour Perpignan , la province n’ayant jamais été une grande productrice de salpêtre et le Roussillo n n’étant plus une frontière aussi stratégique que par le passé depuis l’alliance franco-espagnole. En Alsace , la fabrication se concentra dans un seul établissement nouvellement construit, celui de Colmar , entraînant l’abandon de ceux de Sélestat et de Belfor t.
Cette réduction du nombre de moulins ne diminua pas la capacité globale de production de poudre, au contraire, le nombre de mortiers, et surtout leur capacité, ayant été augmentés. La production journalière s’était accrue de 3.940 livres, représentant une hausse potentielle de 1.182.000 livres par an. Les moulins ne furent jamais exploités au maximum de leurs possibilités jusqu’à la guerre de succession d’Autriche.
Jusqu’en 1724, les livraisons de poudre se montèrent à 500.000 livres par an [54], ce qui suffisait largement en période de paix [55], à tel point qu’en 1730 la France disposait d’autant de poudre qu’au début du siècle (environ 22.000.000 de livres). Les pertes du conflit précédent étaient effacées. Fort de ce bon résultat, il fut décidé de réduire l’approvisionnement à 300.000 livres de salpêtre pour 1732, quitte à remettre en cause la récolte de celui-ci en France. Avec des commandes aussi faibles, le fermier ne pouvait plus acheter toute la production des ateliers du royaume et risquait d’entraîner la fermeture d’un certain nombre d’entre eux. Les expériences passées, que ce soit après le bail de Sabathier en 1635 ou après la guerre de la ligue d’Augsbourg , prouvaient que s’il était facile de réduire l’activité des salpêtriers, il était beaucoup plus difficile de la relancer. Le recours à l’étranger, avec tous ses inconvénients, était alors obligatoire. Pour ces raisons, on conseilla au roi d’acheter le plus de salpêtre possible, l’état de ses finances ne lui permettant pas d’honorer les termes d’un marché prévoyant 1.125.000 livres par an [56]. Un approvisionnement de 700.000 livres semblait raisonnable mais cet avis ne fut pourtant pas suivi.
L’activité des moulins entre 1728 et 1739 prouve que la fabrication de la poudre fut considérablement ralentie [57]. En 1728, 468.400 livres étaient sorties de 10 moulins, sept n’ayant connu aucune activité, du moins pour l’armée. La production chuta dès l’année suivante, passant à 194.500 livres pour atteindre seulement 27.000 livres en 1734. La guerre de succession de Pologne provoqua une petite reprise de l’activité, puis il y eut de nouveau un ralentissement jusqu’en 1737. L’attribution du marché à Primar d s’accompagna dès la seconde année de son bail en 1738, d’une reprise de l’activité. Tout ceci prouve que non seulement le roi diminua ses fournitures mais qu’il exigea plus de salpêtre que de poudre pour des raisons évidentes de conservation. Il est probable que l’augmentation de la production de poudre en 1738 et 1739 correspondit à la transformation du salpêtre livré les années précédentes. En 1736, lors du changement de bail, les livraisons en temps de paix furent fixées à 500.000 livres, entérinant des pratiques courantes depuis vingt ans. En cas de déclenchement des hostilités, celles-ci devaient être portées à 1.500.000 livres [58].
Bien que très mal renseigné sur la guerre de succession d’Autriche, il nous est possible de donner quelques pistes. La France entra sans doute dans la guerre avec des réserves sensiblement égales à celles de l’époque de la guerre de succession de Pologne (22.000.000 de livres), quantités désormais insuffisantes au vu de l’augmentation du nombre de bouches à feu. Comme le prévoyait le marché de 1736, les achats de poudre furent effectivement portés à 1.500.000 livres (dont 75.000 livres pour la Marine), puis à 2.000.000 de livres par le bail signé avec Mahieu en 1746 [59]. La France n’ayant pas eu à déplorer la perte de places fortes et la destruction de magasins, les consommations furent donc exclusivement celles des armées en campagne. Grâce aux livraisons du fermier et aux prises de villes dans les Pays-Bas autrichiens, l’ensemble des places du nord du royaume disposait de 8.202.380 livres de poudre en 1746, soit environ 1.000.000 de plus qu’au début de la guerre, et pourtant les rapports estimaient qu’il en manquait près de 4.000.000 de livres! La situation était sensiblement identique pour l’ensemble du royaume. Les places de Champagne , des trois évêchés, de Lorraine et de la Sarre étaient aussi fournies qu’en 1733 [60], tout comme l’Alsace [61]. D’après les estimations, il manquait 1 million de livres dans les premières et 1.800.000 dans les secondes. Pour l’ensemble du royaume, ces mêmes estimations considéraient qu’il manquait 20.000.000 de livres au lendemain de la guerre, chiffre sans doute un peu exagéré [62].
Nous savons avec certitude qu’il existait 22.679.760 livres de poudre dans les magasins en 1754 or les livraisons depuis 1748 n’avaient pas dû permettre d’en augmenter la quantité de plus d’1 ou 2.000.000. La France avait donc dû sortir de la guerre avec environ 20 à 21.000.000 de livres. Ce document de 1754 considérait qu’il en aurait fallu 32.000.000, ce qui permet d’évaluer le déficit à 12.000.000 de livres. Le fermier s’engageant à livrer 1.125.000 livres par an [63], il fallait compter, une fois les consommations courantes retirées, entre treize et quatorze ans pour espérer le combler, et à condition qu’il n’y eut aucune guerre d’ici là, ce qui ne fut pas le cas.
Le mémoire de 1750 parle clairement d’un danger de pénurie pour le royaume dans les dernières années de la guerre de succession d’Autriche [64], ce qui n’est corroboré par aucun autre document Dans le Dauphiné , Pelletier [65] ne fait mention d’aucune inquiétude dans ce domaine alors qu’il dressait un tableau particulièrement noir de cette province quant aux pièces et aux munitions.
Plus intéressant, ce mémoire préconisait le recours à la Hollande et à l’Espagne pour accélérer la reconstitution des stocks. Il est vrai qu’il était de plus en plus difficile de trouver du salpêtre et de la poudre en Italie . En 1748, le comte d’Argenson exigea que les troupes y manœuvrant s’approvisionnent sur place, et non depuis la France comme cela avait été le cas par le passé, les moulins du royaume n’arrivant à faire face aux autres besoins qu’avec peine. Ne pouvant tirer pratiquement aucun secours de la république de Gênes, les officiers cherchèrent à s’en procurer ailleurs. Le royaume de Naples d’où l’on avait tiré d’importantes quantités lors de la guerre de succession d’Espagne , n’avait plus rien à donner, et l’on avait obtenu difficilement 5.000 livres de poudre dans les états pontificaux. Il ne restait donc que quelques marchands qui, profitant des circonstances, en proposaient à des prix exorbitants, allant jusqu’à 27 sols par livre.
La guerre de Sept ans modifia relativement peu la situation du royaume dans ce domaine, la France sortant de la guerre avec une vingtaine de millions de livres de poudre, soit autant qu’à la fin du conflit précédent. La seule différence notable résidait dans l’évaluation de la quantité nécessaire, estimée désormais à environ 35.000.000 de livres [66]. Parmi les provinces les plus dégarnies figuraient celles du nord (Picardie , Boulonnais , Artois , Flandre , Hainau t), pour lesquelles le déficit se montait à 7.300.000 de livres. Les deux tiers de ces besoins concernaient la Flandre, probablement vidée d’une partie de ses réserves pour soutenir les troupes françaises en Allemagne . Cette guerre ayant changé de théâtre d’opération, elle avait transformé les places du département de Metz en vaste magasin à poudre. Alors qu’en 1754, les places des Trois Evêchés en disposaient d’un peu plus d’1.100.000 , 2.773.601 livres s’y concentraient au lendemain de la guerre de Sept ans. Après la Flandre, l’Alsace et le Dauphiné étaient les plus concernés par “la pénurie”. Pour la première, cette situation était tout à fait normale après un conflit qui s’était déroulé de l’autre côté du Rhin . Pour la seconde, où il manquait 2.551.675 livres [67], la guerre de Sept ans n’avait eu aucune conséquence et le Dauphiné disposait même d’un peu plus de poudre qu’en 1754. Cette décision était donc la conséquence directe de la guerre de succession d’Autriche. Ne faisant plus partie des priorités depuis celle-ci, la province avait été un peu laissée de côté par rapport aux provinces plus menacées, au titre desquelles se trouvaient celles des côtes, toujours exposées à une descente anglaise. Il faut malgré tout relativiser ces besoins car jamais auparavant le Dauphiné n’avait disposé d’autant de poudre, tout comme la Normandie , la Bretagne , l’Aunis et la Guyenne .
Il est intéressant de comparer l’évolution des stocks de poudre et du nombre de bouches à feu dans le royaume. Dans les deux cas, le principal effort de production eut lieu durant la guerre de la ligue d’Augsbourg . La courte période de paix qui suivit fut mise à profit pour faire des économies. La guerre de succession d’Espagne remit en cause l’effort des dix années précédentes, mais jamais la fabrique des poudres ne se trouva dans une situation aussi difficile que celle des fonderies. Alors que jamais le royaume ne devait retrouver le nombre de pièces dont il disposait en 1701, les stocks de poudre furent assez rapidement reconstitués. Le problème vint donc essentiellement des besoins croissants des armées au XVIIIe siècle. Les fortes variations des commandes royales à l’adjudicataire des poudres et salpêtres eurent peu de conséquences pour la défense du royaume, ce qui ne fut pas le cas pour les salpêtriers.
3 – Les difficultés des salpêtriers :
Nous avons vu les difficultés auxquelles furent confrontés les salpêtriers avec les particuliers pour la récolte malgré les rappels à l’ordre successifs du roi. Malgré les nombreuses et éternelles plaintes, il ne semble pas qu’elles furent assez graves pour remettre en cause la survie d’un atelier. Par contre, l’évolution des fournitures militaires et leur paiement avaient des conséquences autrement plus graves. Tous les documents s’accordent sur un point : chaque réduction des commandes remettait en cause l’existence d’un certain nombre d’ateliers, or ce fut fréquemment le cas surtout à partir de 1700. Jusqu’à cette date, il existe peu de documents concernant leurs difficultés financières, alors que ce thème revient dans la quasi totalité des textes du XVIIIe siècle. Il faut d’ailleurs remarquer que jusqu’en 1689, les rappels à l’ordre concernant ce corps de métier étaient aussi nombreux que les textes les protégeant. Après cette date, la priorité fut donnée à la protection de cette profession.
Pour appréhender leurs problèmes financiers, il convient d’évaluer leurs charges. D’après un mémoire de 1708 concernant les salpêtriers parisiens [68], les dépenses d’un atelier s’élevaient à 20 livres 11 sols par jour se répartissant comme suit :
– ustensiles : 1 livre tournois.
– loyer : 15 sols.
– nourriture pour deux chevaux : 2 livres.
– cendres : 4 livres 10 sols.
– bois : 5 livres.
– un charretier : 1 livre 5 sols.
– un homme de ville : 1 livre 5 sols.
– quatre ouvriers : 4 livres 16 sols.
A cette époque, chaque atelier parisien produisait environ 68 livres par jour à 5 sols par livre, soit un revenu quotidien de 17 livres 2 sols, auquel s’ajoutait l’indemnisation pour le sel, laquelle se montait à environ 1 livre. Le salpêtrier aurait donc été perpétuellement déficitaire, mais ce document, provenant de la ferme des poudres, était destiné à soutenir une demande d’exemption pour les salpêtriers. Nous pouvons donc le considérer comme partial, et sans doute un peu exagéré quant aux dépenses. La consommation de bois semble être dans ce cas, tout comme l’entretien des chevaux, et si le nombre d’employés est exact, très souvent, un ou plusieurs d’entre eux étaient les enfants des salpêtriers.
Pour rendre cette activité plus attractive, de multiples privilèges et exemptions y furent attachés. L’arrêt du conseil du roi du 13 février 1748, en dressait la liste [69].
– La taille et la capitation étaient fixées à 5 livres maximum, sauf si le salpêtrier avait une autre source de revenus. Cette dernière remarque tendrait à prouver que certains jugeaient les revenus de leur métier insuffisants.
– Les salpêtriers étaient exemptés du logement des gens de guerre, ainsi que du service de la milice, du guet, de la tutelle, de la curatelle, de la collecte et de toutes les autres charges publiques. Tout officier, maire ou échevin ne respectant pas cette décision était responsable individuellement, et non collectivement.
– Les enfants et les employés des salpêtriers en étaient eux aussi exemptés, mais pour éviter les faux emplois destinés à échapper à ces contraintes, ces derniers devaient avoir travaillé pendant les six mois précédents la levée de la milice ainsi que durant les six mois suivants. Si l’un d’entre eux venait à quitter l’atelier avant ce délai, il était considéré comme déserteur et incorporé d’office.
– Les salpêtriers étaient exemptés de corvée, ainsi que leurs chevaux et leurs voitures, indispensables à leur activité. Même en temps de guerre, et même pour être utilisés dans un équipage d’artillerie, aucun officier, ni aucun intendant, ne pouvait les réquisitionner sous peine de devoir payer 100 livres d’amende.
Pour assurer la pérennité des ateliers, leur nombre était limité selon la production souhaitée, un trop grand nombre d’établissements n’ayant pas été viables. Cela concernait toutes les régions, mais avant tout celles riches en salpêtre comme la Tourain e et surtout Paris où, selon les époques, il y eut entre 20 et 30 ateliers. Par son ordonnance du 25 août 1701, le grand maître de l’artillerie en fixait ainsi la limite à 27. Il réduisit également la récolte minimum à 22.000 livres par an et par salpêtrier, au lieu des 25.000 livres de l’ancien bail, les fournitures ayant été revues à la baisse. Les salpêtriers s’engageaient à ne jamais en livrer moins, sous peine de se voir supprimer leur commission, donc leur permission d’exercer. La sanction était identique pour ceux vendant du salpêtre ou du sel en fraude [70]. Une telle nouvelle était toujours une catastrophe pour les salpêtriers car même si ces derniers pouvaient en produire plus, rien ne les assurait de pouvoir vendre leur récolte.
Cette situation fut particulièrement difficile durant la guerre de succession d’Espagne , à tel point qu’en 1708, le fermier demanda au roi la gratuité du bois pour les salpêtriers [71]. Comme par hasard, cet avantage permettait tout juste d’équilibrer leurs comptes, ce qui nous confirme dans l’idée que les dépenses exposées n’étaient pas tout à fait réelles. L’adjudicataire n’obtint probablement pas gain de cause. En revanche, le roi pouvait demander au fermier d’augmenter le prix du salpêtre, comme lors du bail de 1700, par lequel le salpêtre valait désormais 5 sols 6 deniers au lieu de 5 sols. En 1707, les salpêtriers réclamèrent une augmentation de 6 deniers par livre. La crise la plus grave eut lieu en 1710, lorsque, ne touchant plus les sommes promises par le roi, le fermier limita la production de salpêtre, condamnant obligatoirement à la faillite certains ateliers [72].
Ce n’était pas la première fois que cela se produisait. En 1689, Louvois avait déjà exigé de l’adjudicataire une augmentation du prix du salpêtre “pour faire en sorte que l’argent de Sa Majesté employé à faire acheter de la poudre chèrement dans les pays étrangers, se respandre dans son Royaume [73]. Le secrétaire d’Etat à la guerre pensait, à juste titre, que le développement de la production de salpêtre en France ne pourrait se réaliser qu’à l’aide d’une incitation financière. Pour la circonstance, il s’agissait de faire passer le prix du salpêtre de 5 sols à 6 ou 7 sols par livre. Cette pratique fut assez fréquente au cours du XVIIIe siècle.
A en croire les mémoires remis par les salpêtriers, ces augmentations ne représentaient jamais une amélioration de leur condition, mais elle leur permettait d’éviter la fermeture.
« Sans cette augmentation des prix, les salpêtriers de Paris se trouveroient hors d’état de continuer leur travail par l’extrême rareté des fourrages, la chereté des denrées matières et autres choses nécessaires à la fabrication des salpêtres [74]. »
En 1728, ils se plaignirent d’une nouvelle baisse des prix due encore une fois, à un changement de bail à la fin de 1724. Le nouveau titulaire, Ducayet , avait obtenu des conditions particulièrement avantageuses (de 12 à 13 sols par livre de poudre fournie à l’artillerie) pour relancer la production de salpêtre et, dans un premier temps, assurer ses achats à l’étranger [75]. Au lieu de cela, il s’empressa de diminuer le prix du salpêtre de 3 sols en trois ans! Il profitait au maximum de la réduction des fournitures à l’armée pour réaliser de substantiels bénéfices. Les salpêtriers portèrent l’affaire devant le roi afin de réclamer réparation.
« Les salpêtriers espèrent avec une juste confiance, qu’après l’examen de leurs dépenses et de leurs produits, le fermier non seulement sera tenu de leur payer la véritable valeur de leur salpêtre, mais encore de restituer ce qui leur a été indûment retenu [76]. »
Nous ignorons si cette indemnisation leur fut accordée [77] mais ils durent attendre 1731 pour voir le prix du salpêtre remonter à 8 sols. Cette hausse était l’œuvre du nouvel adjudicataire, Maillot , lequel avait pourtant proposé une diminution du prix de la poudre livrée au roi. Toutefois, il n’en fit pas porter le poids sur les salpêtriers, au contraire, considérant sans doute plus rentable à long terme de développer la production française plutôt que de dépendre des marchands étrangers. Sachant que le roi ne pourrait être que d’accord avec ce point de vue, il lui demanda une aide exceptionnelle en 1732 afin de compenser l’effort financier consenti pour le développement des ateliers, ce qu’il obtint sans difficulté [78]. En 1754, les salpêtriers se plaignirent une nouvelle fois de leur condition dans des termes identiques à ceux de 1723, réclamant une nouvelle fois une hausse du prix du salpêtre ainsi qu’une indemnité [79].
Ces exemples prouvent que le roi ne devait pas seulement tenir compte de ses propres besoins en poudre ou de l’état de ses finances pour fixer les quantités à livrer par le fermier. Si ces deux éléments pesèrent naturellement dans ses décisions, l’état des ateliers de salpêtriers du royaume devait être également pris en compte.
Conclusion
Tout au long de la seconde moitié du XVIIe siècle, les Le Tellier poussèrent la production des bouches à feu, des projectiles et de la poudre au maximum, si ce n’est des capacités des fonderies, des forges et des moulins, au moins des possibilités des finances royales. La guerre de la ligue d’Augsbourg fut à ce titre une période marquante. L’effort fut particulièrement remarquable durant les premières années du conflit, à tel point que dès 1694, certains officiers réclamèrent déjà de l’argent pour pouvoir poursuivre leurs achats, en particulier à l’étranger. Pour obtenir du salpêtre, toutes les sources d’approvisionnement possibles furent exploitées, que ce soit aux Pays-Bas , en Suisse , en Italie ou dans les colonies. Destinée à soutenir une politique offensive dès le lendemain du traité des Pyrénées , cette politique du clan Le Tellier due répondre à la nécessité des circonstances imposées par la menace des alliés durant la guerre de la ligue d’Augsbourg .
En 1697, jamais la France n’avait possédé une telle quantité de poudre. En apparence, le royaume était à l’abri du besoin pour longtemps, mais en apparence seulement. Une telle opulence masquait en fait une incapacité totale à renouveler les stocks de matières premières, non seulement pour des raisons financières, mais aussi parce que la prodigieuse récolte de salpêtre dans les premières années de la guerre de la ligue d’Augsbourg avait épuisé certaines régions, interdisant au secrétaire d’Etat à la guerre d’espérer pouvoir porter la fabrication de poudre au même niveau que lors de ce conflit. Globalement, l’artillerie française vécut jusqu’en 1711 sur les acquis du conflit précédent. L’aide aux troupes espagnoles, les combats en Italie et en Espagne et la perte de nombreuses places en Flandre épuisèrent ces ressources à tel point que l’effort réalisé de 1689 à 1698 était annulé.
Malgré une période de paix de plus de vingt ans et les victoires de la guerre de Succession d’Autriche, les pertes de la guerre de Succession d’Espagne en canons et munitions n’étaient toujours pas compensées en 1756, et ce pour d’évidentes raisons financières. Il est possible d’affirmer que pendant cinquante ans, l’artillerie française géra la pénurie, et les responsables en eurent parfaitement conscience. Seule la poudre échappait à ce sombre tableau. Globalement, l’approvisionnement fut toujours relativement suffisant même si certains rapports parlaient de pénurie, mais celle-ci était due à l’augmentation des besoins.
Le bilan de la ferme générale des poudres et salpêtres peut donc être jugé positivement. Jamais l’armée n’eut à souffrir d’un manque de poudre, même aux pires heures de la guerre de succession d’Espagn e et cette réussite est incontestablement à mettre au crédit des fermiers, et en particulier à celui de la famille Berthelot.
[1] Louis de Crevant , marquis puis duc d’Humières (1628-1694), maréchal de camp en 1650, participa à la bataille des Dunes (1658). Gouverneur de Lille et maréchal de France en 1668, il refusa de servir sous les ordres de Turenne en 1672, ce qui entraîna sa disgrâce. Revenu dans l’armée en 1675, il fut nommé gouverneur du Hainaut . En 1685, il devint grand-maître de l’artillerie, lieutenant-colonel du régiment des fusiliers du Roi et de celui des bombardiers mais montra peu d’intérêt pour l’artillerie. Devenu duc et pair de France en 1690, il se retira à Versailles .
[2] S.H.A.T., fonds privés 1K353, artillerie des places du Royaume (1665-1668).
Même s’il s’agissait là d’une évaluation minimale, la France ne devait pas disposer de plus de 4.000.000 de livres de poudre.
[3] S.H.A.T., série A-1 909, inventaire général d’artillerie (1689).
[4] A.N., AD VI 16, « bail fait par le roy à maistre François Berthelot, commissaire général des poudres et salpestres de France, pour la fourniture de quatre cens milliers de poudres et salpestres par chacun an », le 31 décembre 1664.
[5] A.N., AD VI 16, « bail fait par le roy à maistre François Berthelot, commissaire général des poudres et salpestres de France, pour la fourniture de quatre cens milliers de poudres et salpestres par chacun an », le 31 décembre 1664, p.2.
[6] S.H.A.T., série A-1 909, inventaire général d’artillerie (1689).
[7] S.H.A.T., fonds artillerie 4w662, bail de Grandchamp pour la fabrique des poudres et salpêtres, le 26 août 1690, à Versailles .
[8] S.H.A.T., fonds artillerie 4w579, lettre de Louvois aux intendants, le 30 octobre 1690, à Versailles .
[9] S.H.A.T., série A-1 944, lettre de François Berthelot , en 1690.
[10] S.H.A.T., fonds artillerie 4w579, lettre de Louvois aux intendants, le 30 octobre 1690, à Versailles .
[11] Surirey de Saint-Rémy Pierre, Mémoires d’artillerie, Paris, 1ère édition, 1697.
[12] A.N., G-7 1297, mémoire de l’intendant de Paris sur la production de salpêtre.
[13] S.H.A.T., série A-1 944, lettre de l’intendant de Flandre , le 6 janvier 1690, à Lille .
[14] S.H.A.T., fonds artillerie 4w662, bail de Grandchamp pour la fabrique des poudres et salpêtres, le 26 août 1690, à Versailles , article X, p.6.
[15] Surirey de Saint-Rémy Pierre, Op. cit...
[16] A.N., AD VI 16, « bail pour la fabrique, fourniture et vente des poudres, salpestres et plomb fait à maistre Jacques Deshayes pour neuf années », le 10 novembre 1699.
[17] Surirey de Saint-Rémy Pierre, Op. cit...
[18] Il faudrait y ajouter celui de Maromme , près de Rouen , avec sa production de 300.000 livres par an, grâce à ses 72 mortiers. Cependant, ce moulin avait la particularité de disposer de mortiers de très faible capacité (10 livres chacun). Il était apparemment le plus exposé aux basses eaux d’où une production toujours inférieure à sa capacité réelle.
[19] Ces poudres à rebattre et à ressécher se répartissaient de la façon suivante :
Belfort : 2.161 livres; Huningue : 94.679 livres; Brisach : 112.500 livres; Fribourg : 94.400 livres; Sélestat : 53.000 livres; Strasbourg : 37.080 livres, Sarrelouis : 74.452 livres ; Landau : 50.000 livres ; Philisbourg : 2.309 livres, Fort-Louis : 74.452 livres.
S.H.A.T., série A-1 971, état des poudres à radouber en Alsace , en 1690.
[20] François Frézeau de La Frézelière (1623-1702) dirigea l’artillerie lors de la campagne de Hollande en 1672. Il participa aux principales actions de cette guerre sur la frontière du nord. De 1678 à 1702, il dirigea l’artillerie des places d’Alsace , de la Sarre et de Bourgogne .
[21] S.H.A.T., série A-1 972, lettre de La Frézelière, le 20 mars 1690, à Paris.
[22] S.H.A.T., série A-1 972, lettre de La Frézelière, le 23 février 1690, à Versailles
[23] S.H.A.T., série A-1 909, inventaire général d’artillerie (1689).
[24] ibid.
[25] S.H.A.T., série A-1 1437, inventaire général d’artillerie (1698).
[26] S.H.A.T., série A-1 909, inventaire général d’artillerie (1689).
S.H.A.T., série A-1 1114, inventaire général d’artillerie (1691).
[27] S.H.A.T., série A-1 1603, inventaire général d’artillerie (1702).
[28] S.H.A.T., série A-1 1437, inventaire général d’artillerie (1698).
[29] S.H.A.T., série A-1 901, lettre de Trobat , le 14 novembre 1689, à Perpignan .
[30] S.H.A.T., série A-1 1585, lettre de Louveciennes, le 16 mai 1702, à Gênes.
[31] S.H.A.T., série A-1 967, lettre de Grandvilliers à Louvois , le 17 janvier 1690, à Bâle .
[32] S.H.A.T., série A-1 967, lettre de Puizieux , le 3 janvier 1690, à Huningue .
[33] S.H.A.T., série A-1 967, lettre de Puizieux , le 3 janvier 1690, à Huningue .
[34] S.H.A.T., série A-1 967, état des poudres suisses livrées à Huningue , le 27 décembre 1689.
[35] S.H.A.T., série A-1 968, lettre de Puizieux , le 9 février 1690, à Huningue .
[36] S.H.A.T., série A-1 1990, lettre de Berthelot de Pleneuf , le 8 février 1706.
[37] S.H.A.T., série A-1 968, lettre de Puizieux , le 9 février 1690, à Huningue .
[38] S.H.A.T., série A-1 968, lettre de Puizieux , le 25 février 1690, à Huningue .
[39] S.H.A.T., série A-1 968, lettre de Puizieux , le 28 février 1690, à Huningue .
[40] S.H.A.T., série A-1 968, lettre de Puizieux , le 25 février 1690, à Huningue .
[41] A.N., G-7 1296, mémoire anonyme sur le salpêtre (1701).
[42] S.H.A.T., série A-1 1990, lettre de Berthelot de Pleneuf , en 1706.
[43] S.H.A.T., série A-1 1769, lettre de Le Bret, le 16 août 1704, à Aix .
[44] S.H.A.T., série A-1 1603, inventaire général d’artillerie (1702).
[45] A.N., AD VI 16, “bail pour la fabrique, fourniture et vente des poudres, salpestres et plomb fait à maistre Jacques Deshayes pour neuf années”, le 10 novembre 1699.
[46] ibid.
[47] S.H.A.T., série A-1 1493, lettre du chevalier Destouches, le 11 avril 1701, à Venlo .
[48] Louis-François, duc de Boufflers (1644-1711) se vit confier le commandement d’une armée dès le début de la guerre de la ligue d’Augsbourg . Ses multiples succès lui valurent de devenir maréchal en 1693. En récompense de sa remarquable défense de Lille (1708), Louis XIV le nomme pair de France en 1709. La même année, il se couvrit de gloire à la bataille de Malplaquet.
[49] S.H.A.T., série A-1 1603, inventaire général d’artillerie (1702).
[50] A.N., G-7 1296, mémoire anonyme sur la production de salpêtre (1701).
[51] A.N., AD VI 16, « marché général arresté au conseil du Roy contenant les conditions accordées par Sa Majesté à Philippe Paulmier , pour la fabrique des poudres et selpestres, pour neuf années », le 14 septembre 1706.
[52] A.N., G-7 1298, lettre de Berthelot de Belloy , le 11 janvier 1709.
[53] S.H.A.T., série A-1 2336, inventaire général d’artillerie (1711).
[54] Au lieu des 1.125.000 livres prévues par le bail de la ferme des poudres.
S.H.A.T., fonds artillerie 5w13, dépenses de l’artillerie de 1715 à 1724.
[55] La consommation annuelle en temps de paix était évaluée à 300.000 livres en 1751. S.H.A.T., fonds artillerie 5w13.
[56] S.H.A.T., fonds artillerie 5w13, projet pour les dépenses de 1731-1732.
[57] S.H.A.T., série A-1 3315, état des poudres fabriquées dans les moulins du royaume (1728-1739).
[58] A.N., AD VI 16, « résultat du conseil du Roy contenant les conditions du marché de Charles Primard pour la fabrique, vente et débit des poudres et salpêtres dans toute l’étendue du Royaume, pour neuf ans », le 18 décembre 1736.
[59] A.N., AD VI 16, « résultat du conseil du Roy contenant les conditions du marché de Jacques Mahieu pour la fabrique, vente et débit des poudres et salpêtres dans toute l’étendue du Royaume, pour neuf ans », le premier mars 1746.
[60] 1733 : 2.921.926 livres. 1746 : 3.146.034 livres.
[61] 1733 : 4.688.823 livres. 1746 : 4.153.771 livres.
[62] S.H.A.T., fonds artillerie 5w13, mémoire sur l’état de l’artillerie en 1750.
[63] A.N., AD VI 16, « résultat du conseil du Roy contenant les conditions du marché de Jacques Mahieu pour la fabrique, vente et débit des poudres et salpêtres dans toute l’étendue du Royaume, pour neuf ans », le premier mars 1746.
[64] S.H.A.T., fonds artillerie 5w13, mémoire sur l’état de l’artillerie en 1750.
[65] Louis-Auguste Pelletier fit la guerre de succession de Pologne en Italie en qualité de commissaire provincial. Lieutenant d’artillerie en 1740, brigadier en 1742, il devint commandant de l’école de Grenoble en 1747, puis de celle de La Fère en 1756. Inspecteur général du Corps Royal de l’artillerie en 1759, il dirigea l’artillerie du comte de Saint-Germain et fut nommé lieutenant-général des armées du roi en 1761.
[66] S.H.A.T., fonds artillerie 3w59, état général des bouches à feu et des attirails d’artillerie du royaume (1765).
[67] ibid.
[68] A.N., G-7 1297, mémoire du fermier des poudres et salpêtres (1708).
[69] A.N., AD VI 16, « arrest du conseil du Roy, qui confirme, augmente et explique les privilèges, franchises et exemptions dont Jacques Mahieu , chargé par Sa Majesté de la fourniture, fabrique, vente et débit des poudres et salpêtres dans tout le Royaume, ses procureurs, commis, gardes magasins, sapêtriers, leurs enfans, ouvriers et domestiques, maîtres poudriers et autres ouvriers doivent jouir », le 13 février 1748, à Versailles .
[70] A.N., AD VI 16, « ordonnance du grand-maître de l’artillerie portant fixation du nombre des atteliers des salpestriers de la ville et faubourg de Paris; et règlement pour leurs fonctions », le 25 août 1701.
[71] A.N., G-7 1297, mémoire du fermier des poudres et salpêtres (1708).
[72] A.N., G-7 1298, mémoire sur la ferme des poudres (février 1710).
[73] S.H.A.T., série A-1 3779, lettre de Louvois , le 28 novembre 1689, à Versailles .
[74] S.H.A.T., fonds artillerie 4w662, mémoire sur l’évolution des prix du salpêtre de 1728 à 1750.
[75] A.N., AD VI 16, « résultat pour la fourniture, vente et débit des poudres et selpêtres, pendant neuf années, à commencer du premier janvier 1725, au profit de François-Pierre Ducayet », le 29 août 1724, à Fontainebleau.
[76] S.H.A.T., fonds artillerie 4w662, mémoire des salpêtriers de Paris (1728).
[77] Une telle demande n’était pas saugrenue. En 1723, les salpêtriers parisiens avaient obtenu une somme de 500.000 livres tournois.
[78] S.H.A.T., fonds artillerie 4w662, arrêt du conseil du roi du 8 janvier 1732.
[79] S.H.A.T., fonds artillerie 4w662, mémoire des salpêtriers de Paris (1754).