Introduction

Marion Trévisi et Philippe Nivet

Cet ouvrage réunit l’ensemble des communications du colloque organisé, en novembre 2007, à Amiens par le centre d’histoire des sociétés, des sciences et des conflits de l’Université de Picardie, sur le thème des femmes et la guerre de l’Antiquité à 1918. Notre objectif fut de réunir un grand nombre de chercheurs, historiens majoritairement, pour faire le point sur cette vaste et passionnante question du rapport des femmes aux conflits armés, civils ou militaires. Question le plus souvent délaissée ou oubliée, notamment par l’historiographie française qui s’y est rarement intéressée et n’a pas produit de synthèse dans une chronologie large, de l’Antiquité au xxe siècle[1]. Certes, depuis la fin des années 1980 et surtout dans les années 1990, l’histoire contemporaine s’est intéressée à ce sujet, du fait de la féminisation progressive des armées et de l’impact des deux grandes guerres mondiales sur la place et le rôle des femmes dans les sociétés occidentales[2]. De même, l’historiographie de la Révolution française a dévoilé depuis quelques années le rôle des femmes dans les combats guerriers et politiques de cette période de trouble[3]. Sinon, les études ne concernent que quelques exemples de grandes guerrières célèbres, dont les faits de guerre sont relatés comme des anecdotes de l’histoire et surtout des exceptions[4].

S’il n’y a que peu de travaux historiques sur ce sujet, c’est parce que les historiens sont influencés par les représentations sexuées traditionnelles des hommes au front et des femmes à l’arrière, véhicu­lées depuis l’Antiquité dans nos sociétés occidentales[5]. Ces représenta­tions culturelles s’appuient sur le cliché de la nature non violente (et faible) des femmes incapables de combattre, de donner la mort puisque leur rôle « naturel » est de donner la vie, image issue des traités de médecine de l’Antiquité et renforcée par des siècles de christianisme. Cliché que Yannick Ripa a retrouvé, dans le contexte de la guerre d’Espagne, dans le discours des phalangistes, apôtres de la violence qui firent longtemps de la douceur des femmes dite constitutive un argu­ment rédhibitoire pour refuser la création d’une section féminine, incapable d’intégrer la violence dans sa dynamique. Pour ces derniers qui réactivent, en la fortifiant, l’identité féminine imposée par l’Espa­gne catholique, les femmes en armes symbolisent la transgression ultime des frontières de sexes ; le soutien féminin à leur cause doit reposer sur la douceur, le renoncement et l’abnégation féminines et ils voient dans la participation de femmes aux combats républicains le basculement des rouges du côté de l’animalité : les femmes sont jugées plus cruelles que les hommes et leur violence analysée comme la traduction d’une sexualité débridée, stimulée par le marxisme[6].

L’indifférence des historiens sur ce sujet serait donc fondée sur ce constat (erroné) que les femmes ne font pas partie du monde viril de la guerre, qu’elles n’ont rien à y faire, sauf à en souffrir[7]. De plus, reconnaître que les femmes puissent être des combattantes et des guerrières (intégrées ou non aux armées), c’est remettre en cause nos standards du masculin et du féminin, nos idéaux de non violence attachés à la « nature » féminine[8]. Si les femmes sont associées au monde de la guerre, c’est traditionnellement pour encourager les soldats dans leur tâche de défense de leur famille, comme un idéal de société à défendre, comme justification du sacrifice des hommes ou comme victimes. Un grand nombre d’études s’arrête à cette vision réductrice du lien entre les femmes et le monde de la guerre.

Or, il nous est apparu, comme Arlette Farge l’exprime à propos de la série de gravures de Watteau sur les « Fatigues de la guerre », que la femme est une « évidence » dans le contexte des guerres du xviiie siècle représentées par le peintre, mais aussi vraisemblablement dans toutes les guerres précédentes et suivantes[9]. C’est une évidence car les femmes n’échappent pas aux guerres ; elles les vivent comme les hommes et ne font pas que les subir passivement. Elles réagissent forcément à ce contexte de violence, volontairement ou non. Si la guerre est une activité principalement masculine, elle touche tout le monde et les femmes sont donc présentes dans la guerre, dans l’acte guerrier même et dans les armées, comme à l’arrière. D’ailleurs, pour­quoi en seraient-elles exclues quand tout un contexte les y conduit ? Cette absence dans les textes ou les représentations s’explique princi­palement par le discours sexué des auteurs relatant les guerres ; discours masculin qui oublie souvent d’évoquer ces femmes sauf à travers des fantasmes (les amazones) ou des clichés (l’infirmière dévouée ou la résistante)[10].

Vaste sujet donc que celui des femmes et de la guerre qui touche à l’histoire militaire, du genre aussi bien qu’à celle des représentations et des mentalités. De plus, la guerre prend des formes variées (guerres d’armées ou civiles, guérillas, guerres politiques) ce qui induit des rapports différents des femmes à ces types de « guerre »[11]. Les femmes peuvent plus facilement devenir combattantes dans un contexte de guerre civile que dans celui d’une guerre de militaires entre armées professionnelles. Ainsi, ce livre a pour ambition de combler en partie ces vides et ces silences sur le rôle des femmes au sein des guerres de l’Antiquité au début du xxe siècle en s’attachant aussi bien aux représentations qu’aux réalités, aux clichés et à leur survivance qu’aux faits historiques reconnus. Comment les femmes participent-elles aux guerres, volontairement ou non ? Quelles images leur sont associées dans un contexte de violence et quel statut réel ont-elles ? Quelle évolution historique peut-on mesurer dans ce statut ? La seconde guerre mondiale et les guerres de la fin du xxe siècle et du début du xxie ont été exclues de l’étude, car elles constitueraient à elles seules un sujet de colloque. En effet, comme le souligne Emmanuel Reynaud, si « le trait le plus constant de la différenciation sexuelle des activités dans la société humaine a sans doute été, jusqu’à ces derniers temps, de carac­tériser l’activité guerrière comme étant le propre de l’homme et la procréation et la prise en charge des jeunes enfants comme celui de la femme, cette vision tranchée de la spécificité sexuelle a été remise en cause dans les démocraties par la conjonction des bouleversements qu’ont respectivement connus, depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, le maniement de la violence armée, les pratiques vis-à-vis de la procréation et la perception des différences sexuelles. Que ce soit au plan du rôle et de la fonction du militaire, de la différence des sexes face à la guerre ou de la parentalité, les changements intervenus au cours des dernières décennies ont été tels que la connotation sexuelle des activités guerrières et procréative, auparavant si bien établie, est devenue plus floue »[12].

L’ensemble des communications de ce colloque donne des éléments de réponse à ces questions générales, en s’articulant autour de trois grands axes : le premier est celui de la participation active des femmes aux guerres comme combattantes réelles ou fantasmées, parti­cipation le plus souvent considérée comme une transgression des rôles sexuels et sociaux ; le deuxième est celui des femmes participant aux « marges » des conflits, comme espionne ou intermédiaire mais surtout comme suiveuse (soignante, nourricière), et enfin, le troisième est celui des femmes subissant les conséquences des guerres, comme victime des combats ou des situations découlant des combats.

Les communications réunies au sein du premier axe, celui d’une participation active des femmes aux combats ou au contexte de guerre, s’attachent à la figure de la guerrière, de la combattante. Figure com­plexe car souvent réduite à une image, à une posture comme Jeanne d’Arc qui ne cesse de se revendiquer comme une femme en « armes » ayant combattu pour son roi alors que ses juges passent sous silence ses faits de guerre et ne la traitent qu’en sorcière possédée par le diable (Xavier Hélary). De même, les 80 femmes engagées dans les armées révolutionnaires, évoquées par Dominique Godineau, ont vécu les mêmes combats que les hommes, ont été blessées comme eux (et même décorées pour une minorité d’entre elles pour leur courage), et pourtant elles n’apparaissent pas dans l’iconographie de l’époque comme des soldats, mais plutôt comme des militantes de clubs. Jamais représentées en train de combattre ou dans l’attaque, sauf quand elles sont carica­turées en amazones par les contre-révolutionnaires, elles ont échoué dans la reconnaissance de leur rôle de « braves » car les révolution­naires les ont cantonnées à leur rôle traditionnel, refusant la remise en cause de la répartition sexuée des rôles entre hommes et femmes qui aurait pu découler de cette guerre révolutionnaire. Depuis l’Antiquité, les hommes ont donc du mal à reconnaître aux femmes une capacité à combattre, à être violentes, même quand elles l’ont été. Ils s’accordent parfois à leur reconnaître un certain courage (une andréia) comme Kyanè, fille de Philippe II de Macédoine, demi-sœur d’Alexandre décrite comme une héroïne « virile » par Polyen (Nadine Bernard) ou comme Artémise d’Halicarnasse combattante aux côtés de Xerxès dans la bataille de Salamine et admirée par Hérodote pour son « audace virile » (Geneviève Hoffmann), mais parallèlement ils condamnent cette transgression morale que représente la femme guerrière, qui est alors souvent comparée à une barbare cruelle et hystérique, comme Olympias, mère d’Alexandre, condamnée par Diodore de Sicile pour sa cruauté, ou Teuta, reine régente d’Illyrie qui ose s’opposer à Rome dans une violence névrotique, hors norme, typique des femmes selon Polybe (Nadine Bernard). De l’Antiquité au Moyen Âge et jusqu’à l’époque moderne, seules des reines, des princesses ou des femmes de haut rang peuvent être reconnues, dans les discours masculins, comme combattantes « légitimes » en cas d’absence ou de deuils de leurs maris ; elles défendent alors logiquement l’honneur de leur lignée en remplaçant les hommes. Ces combattantes ne sont pas des « rebelles » qui bouleversent l’ordre établi ; elles reproduisent les modèles mascu­lins en perpétuant le principe dynastique (Nadine Bernard) ou en défendant leurs terres, leurs villes et châteaux comme Gérauda de Lavaur lors de la croisade cathare (Gwendoline Hancke). D’ailleurs, leurs faits d’armes sont vite évoqués, sans détail, parce qu’ils restent « anormaux », exceptionnels et donc peu significatifs dans l’esprit des narrateurs. On ne sait donc rien ou si peu, sur leur façon de combattre (avec quelles armes ?), sur leur stratégie de guerrière, sur leur capacité à commander des troupes pour les plus nobles d’entre elles…Ces fem­mes sont minoritaires et marginales, en nombre comme dans l’esprit de leurs contemporains ; elles sont donc traitées en tant que marginales car elles pénètrent dans les frontières du monde masculin. En outre, leur transgression n’est tolérée que parce qu’elles abandonnent le combat dès qu’elles le peuvent, quand les hommes sont à nouveau présents ou que la contrainte a disparu ; les révolutionnaires de 1792 ont la même attitude que les auteurs antiques (Hérodote à propos d’Artémise) : la femme combattante est louée quand elle cesse le combat et qu’elle retourne à des activités « pacifiées » de femme, laissant la violence aux hommes sans remettre l’ordre du monde en cause (Dominique Godi­neau, Geneviève Hoffmann).

Il faut attendre les conflits et les armées du xxe siècle pour que les femmes prennent une place de combattante reconnue en dépassant le stade de la posture ou de l’intervention ponctuelle et exceptionnelle dans un monde masculin. La violence devient alors « possible » pour les femmes dans les mentalités contemporaines. Ainsi, jusqu’au xxe siècle, la femme guerrière garde une image globalement négative, celle d’une amazone combattant les hommes et inversant les rôles sexuels. La figure de l’amazone antique connaît une immense postérité dans tout le monde occidental de l’Antiquité jusqu’à nos jours ; elle fonc­tionne comme un fantasme masculin de femme dominante asservissant les hommes à sa volonté. Au xixe siècle, deux auteurs allemands péren­nisent cette image de l’amazone, soit sous forme d’un fantasme histo­rique du matriarcat antique chez Bachofen dans le Mutterrecht, soit sous forme d’un fantasme esthétique et érotique de femme dominatrice dans tous les romans de Sacher-Masoch (Julie Mazaleigue). Ces fan­tasmes ont eu beaucoup d’échos chez les penseurs contemporains et même chez les premières féministes qui utilisent l’image de l’amazone pour justifier une guerre sociale des sexes. Cependant, chez ces deux auteurs, les amazones restent tributaires de l’imaginaire masculin et finissent toujours par être dominées par les hommes, soit dans la mort, soit dans l’amour. En contrepoint à l’image négative de l’amazone, existe dans la culture occidentale celle plus positive de Judith, héroïne biblique sauvant sa ville de Béthulie assiégée par les Assyriens en décapitant leur chef Holopherne et en redonnant courage aux juifs pour massacrer les étrangers les assiégeant. Si la violence de Judith est acceptable, c’est parce qu’elle ressemble à un sacrifice religieux et qu’elle est justifiée par le triomphe de la foi face aux barbares. L’icono­graphie de Judith au château Renaissance d’Ancy-le-Franc, présentée ici par Marie Houllemare, sert un autre triomphe de la foi, pas celui des juifs sur les Assyriens, mais celui des catholiques sur les protestants dans le contexte des guerres de religion de la fin du xvie siècle. En effet, la Judith peinte en chef de guerre en 1573-1574 dans ces neuf toiles du château est une allégorie du triomphe de la vraie foi catholi­que sur l’hérésie des protestants, assimilés ici aux Assyriens ; sa violence et celle des juifs massacrant les Assyriens justifient alors les massacres de la Saint-Barthélemy et l’extermination des hérétiques par des « guerriers de dieu ».

Combattre les armes à la main, légitimement ou non, n’est pas la seule forme de participation des femmes aux guerres civiles ou mili­taires ; certaines font partie des « à côtés » ou des marges des combats, en s’engageant dans des missions d’espionnage, en étant négociatrices ou médiatrices, et en suivant les armées.

Les femmes ont souvent servi d’espionnes ou de sources de renseignement, car du fait de leur « nature » faible et douce, les hommes s’en méfiaient moins. Même si, en théorie, elles ont été long­temps rejetées de tout service de renseignement, en pratique, on les retrouve dans les archives comme dans l’Italie des États-Républiques aux xiie, xiiie et xive siècles (Aude Cirier). Ainsi, la ville de San Gimignano envoie en 1267 une vingtaine de femmes chez ses ennemis impériaux à Sienne et à Pise pour récolter des informations, alors que Sienne paie quelques femmes pour s’introduire dans l’armée florentine et empoisonner les soldats avec une poudre. Si les sources sont difficiles à trouver au Moyen Âge et à l’époque moderne sur les prati­ques secrètes de l’espionnage, elles sont plus importantes à l’époque contemporaine grâce au développement des services secrets à la fin du xixe siècle et pendant la première guerre mondiale en Europe. Dans toute la littérature de l’entre deux guerres, les clichés se multiplient sur les espionnes, notamment après l’affaire Mata Hari, figure idéale de la traîtresse, mais c’est pendant la guerre 1914-1918, provoquant l’occu­pation allemande de la Belgique et d’une partie de la France du Nord, que de vrais réseaux de renseignement et d’espionnage se sont consti­tués sous l’initiative de femmes, comme Louise de Bettignies et Marie Léonie Van Houtte pour le Nord de la France et Edith Cavell en Belgique (Olivier Forcade). Non seulement elles ont fourni aux Anglais des informations sur la localisation de l’artillerie allemande, mais elles ont aussi sauvé des soldats anglais blessés en organisant leur éva­cuation. Arrêtées et condamnées à mort, elles sont reconnues comme des victimes et même des martyres, mais rarement comme des combat­tantes.

Sans prendre les armes ni devenir espionnes, les femmes peuvent aussi participer aux conflits par leur action de négociatrice, de média­trice ou de résistante, action non violente mais qui n’est pas sans risque pour leur sécurité. C’est le cas de Mahaut, comtesse d’Artois, présentée ici par Christelle Balouzat-Loubet, qui résiste à la révolte de la noblesse artésienne en 1315-1319 par son pouvoir de négociation auprès du roi et par la ruse. Accusée de mauvais gouvernement par ses nobles, cette veuve combative défend son honneur de seigneur diffamé tout en se présentant devant le roi arbitre comme « un bon prince », soucieux de paix et faisant face à une révolte injustifiée. Elle se fait passer pour victime tout en résistant avec pugnacité à tout accord pendant quatre ans ; elle va jusqu’à braver le roi et ne cède à son arbitrage que sous la contrainte. Elle utilise les pleurs, théâtralise la scène de signature de la paix pour avoir la compassion du public alors qu’elle a tout arrangé avec le roi auparavant. Avec un grand talent politique de simulation, elle montre qu’après quatre ans de conflit sans victoire, elle signe la paix sans perdre la face devant ses ennemis. Elle a utilisé sa féminité pour ruser au sein des négociations alors qu’en réalité elle tentait de manipuler le roi en jouant sur la raison et les sentiments. Pendant les guerres de religion en France au xvie siècle, des femmes de haut rang ont aussi utilisé leur « prétendue » faiblesse de femme et de victime pour peser sur la Cour et pour négocier la défense de leur mari emprisonné ; elles ont servi de médiatrice et de négociatrice pour leur clan, comme la duchesse de Guise, Catherine de Clèves, soutenant la cause de son mari Louis de Gonzague auprès de la reine mère Cathe­rine de Médicis (Nicolas Leroux). Au nom de la défense de leur lignage et de la foi catholique, certaines telles Marie de Batarnay, veuve Joyeuse, ou Catherine de Lorraine, duchesse de Montpensier, ont levé des fonds pour soutenir le parti de la Ligue dans sa résistance armée au roi Henri III. De médiatrices, les princesses de la maison de Lorraine passent dans la résistance après les assassinats du duc et du cardinal de Guise en 1588 ordonnés par le roi Henri III ; Catherine de Clèves, veuve du duc de Guise, en appelle à la vengeance du peuple, à la justice du Parlement de Paris et même au jugement du pape contre le roi de France. Avec la duchesse de Montpensier, elle fait imprimer des pam­phlets contre le roi assassin et cruel ; ces princesses réclamant ven­geance au nom de leur lignage meurtri, utilisent comme moyen de propagande et de résistance les mots et les lettres, « les armes de mon sexe » selon la Montpensier.

Encore sur les « marges » des conflits mais en contact plus direct avec eux que les espionnes ou les négociatrices, on trouve les femmes qui suivent les armées pour nourrir les soldats et laver leur linge ou pour les soigner dans leurs campements ou au sein d’hôpitaux plus ou moins improvisés. Les suiveuses ont depuis le Moyen Âge une mau­vaise réputation : souvent assimilées à des prostituées, alors qu’un grand nombre ne sont que les femmes légitimes ou les concubines de soldats, elles sont décriées par les autorités militaires qui les accusent de tous les maux (notamment les maladies sexuelles des soldats) et ne cessent de les chasser (Marion Trévisi). Elles rendent pourtant de grands services aux armées (et pas seulement des services « sexuels ») ; les cantinières-vivandières et les blanchisseuses assurent toute une logistique matérielle que l’armée a du mal à mettre en place avant la fin du xixe siècle, apportant ainsi un peu de confort et de réconfort aux petits soldats comme aux officiers. Comme les infirmières militaires n’existent pas vraiment avant le début du xxe siècle, ce sont les suiveuses, femmes de soldats ou cantinières qui s’improvisent infir­mières soignantes sur les champs de bataille, sans aucune reconnais­sance officielle de l’armée. Les frontières sont floues entre les diffé­rentes catégories de suiveuses (prostituées, cantinières, blanchisseuses, femmes de soldat), ce qui explique leur image globalement négative de « catin » de l’armée. Aux marges des combats – même si parfois elles doivent prendre les armes pour se défendre –, elles sont généralement traitées comme des marginales par l’administration, alors que les sol­dats reconnaissent leur utilité et même leur courage, dans de nombreux témoignages.

Nous retrouvons d’autres femmes de « courage », à la marge des combats, dans les hôpitaux civils et militaires ; ce sont les sœurs hospitalières qui soignent avec dévouement les soldats blessés (Marie-Claude Dinet). Lors des guerres de Trente Ans et de la Fronde, les filles de la Charité de Vincent de Paul se sont sacrifiées en Lorraine et à Calais pour soigner les soldats contagieux et blessés ; beaucoup en sont mortes. Dans des hôpitaux surchargés, elles gèrent la pénurie de linge, de denrées et de médicaments comme à Lille en 1745 après la bataille de Fontenoy ; elles subissent aussi le bombardement de leurs hôpitaux comme lors du siège de Lyon en 1793 où elles tentent d’évacuer les malades dans la panique générale. Leur sens du sacrifice, issu de leur formation spirituelle et médicale, et leur combativité face à l’adversité sont d’ailleurs mis en scène de façon héroïque dans des ex voto, où elles sont glorifiées dans leur action collective ou individuelle. Contrai­rement aux suiveuses, leur image est très positive, car elles sont recon­nues comme des auxiliaires de la nation combattante au cours du xixe siècle. Leur œuvre se poursuit au xxe siècle, notamment lors de la première guerre mondiale, où elles accueillent dans leurs établisse­ments les réfugiés de Belgique et des Flandres, comme les bénédictines du Saint-Sacrement de Rouen qui reçoivent une quarantaine d’enfants belges et organisent au mieux leur séjour en leur donnant des cours en plus de la nourriture et du logement (Nadine-Josette Chaline). Les religieuses hospitalières ont aussi aidé la Croix Rouge dans les soins aux soldats blessés et malades près du front ; on en a compté environ 10 000 actives et disponibles en France pendant le conflit 1914-1918, dont certaines ont été décorées de la légion d’honneur comme sœur Gabrielle Rosnet qui a résisté aux autorités allemandes qui voulaient détruire son hôpital à Clermont-en-Argonne.

Sans participer aux combats, ni même à leurs marges, les femmes, à l’arrière, ont toujours vécu les guerres, plus précisément les conséquences des guerres. En temps de guerre, le quotidien est boule­versé : le mari absent, les nouvelles responsabilités des femmes dans la gestion des biens, des terres et de la famille, les difficultés matérielles qui s’accroissent, la peur des soldats ou des bombes… Les femmes n’ont pas fait que subir passivement les conflits et leurs conséquences ; elles ont dû réagir face aux agressions des soldats ou simplement face aux bouleversements de leur vie.

La femme, victime de guerre, est un cliché datant de l’Antiquité et des premiers rapts et viols de femmes pendant les conflits ; un cliché repris ensuite comme une évidence tout au long de l’histoire et malheu­reusement fondé sur des faits réels. Les violences sexuelles contre les femmes sont tellement ordinaires en temps de guerre que les mémoria­listes n’en parlent même pas ou très peu tout au long de l’Antiquité, du Moyen Âge et même de l’époque moderne. Il faut attendre la période contemporaine pour que les témoignages se multiplient et pour que les historiens puissent les considérer comme un objet d’histoire. Sylvie Joye évoque ici les femmes butins de guerre à la fin de l’Antiquité et au début du Moyen Âge; elles étaient « raptées » par les vainqueurs et contraintes à un nouveau mariage « par capture ». Elles faisaient donc partie du butin du pillage des villes, comme un « trésor » à conquérir, surtout la femme du roi vaincu qui était la plus recherchée par le roi vainqueur pour marquer sa prise de pouvoir mais aussi pour profiter d’un nouveau réseau familial dans une volonté de fusion, notamment des barbares avec Rome à la fin de l’Antiquité. Ce fut le cas de Galla Placidia, fille de l’empereur Théodose Ier emmenée lors du sac de Rome en 410 et épousée ensuite par le roi Goth Athaulf pour parvenir au pouvoir impérial. De même, Radegonde, princesse thuringienne capturée par Clotaire, devint sa femme après la conquête de la Thuringe en 531 par les Francs. De victime de rapt et probablement de viol, elle passe ensuite au statut de reine franque. Ces mariages par capture, même s’ils sont issus d’une conquête violente, permettent aux femmes de survivre à la prise de pouvoir et même d’acquérir parfois un statut supérieur à celui qu’elles avaient lorsqu’elles étaient libres. Il ne faut cependant pas qu’elles proposent d’elles-mêmes le mariage, la soumis­sion comme une stratégie de survie ; elles doivent rester passives pour que le conquérant puisse montrer sa nouvelle puissance. La mésaven­ture de Romilda, veuve du duc de Frioul dans l’Italie du vie siècle, qui s’est livrée au roi barbare pour sauver ses filles du viol et sa ville d’un pillage trop dur, en est un bon exemple ; considérée comme une « putain » parce qu’elle se donne comme butin, elle est violée par douze hommes puis meurt empalée.

Si les mariages par capture ne se pratiquent plus à l’époque moderne, les viols de guerre continuent et restent toujours considérés comme un « mal nécessaire » ou une fatalité par les officiers et les autorités militaires. En effet, pour éviter les désertions de soldats, les chefs les laissaient piller les provinces conquises en argent, nourriture, alcool et femmes. C’était une forme de « solde » que les soldats s’octroyaient avec l’assentiment de leurs supérieurs. Stéphanie Gaudil­lat Cautela nous rappelle cependant qu’en France au xvie siècle, le viol est considéré par les droits civil et militaire comme un crime « mons­trueux », passible de la peine de mort parce qu’il attaque l’honneur des familles et le mariage. Ce crime monstrueux n’est pourtant que peu poursuivi tellement il est banal, surtout en temps de guerre. On en trouve peu de traces dans les archives judiciaires et un peu plus dans les mémoires, chansons, canards ou chroniques qui relatent tous la brutalité et la cruauté des soldats comme un lieu commun, qu’ils soient en pays ennemi conquis ou dans leur propre pays en temps de paix. Les soldats violeurs sont peu poursuivis car ils sont protégés par l’armée et par le roi, qui leur donne souvent des lettres de pardon pour éviter qu’ils ne désertent. Ils ne sont cependant pas pardonnés par la justice royale quand la fille était vierge ou de haut rang et quand elle en est morte ; sinon, le plus souvent, ils ne paient qu’une légère amende en dédommagement de l’honneur perdu de la fille. Toutefois, le viol de guerre n’était pas au xvie siècle une stratégie militaire pour atteindre l’ennemi dans son orgueil individuel et national, comme il a pu l’être lors de la première guerre mondiale (les viols faisant partie des atro­cités commises par les armées allemandes en Belgique et en France) et plus récemment lors du conflit en ex-Yougoslavie[13], au Rwanda ou au Congo. Il a simplement pu parfois être pensé comme une punition pour des villes résistantes, comme à Nuits en 1576 où Condé laisse ses hommes se défouler en récompense de leur victoire difficilement acquise. En outre, lors des guerres de religion, le viol a un sens religieux : les catholiques ont violé et torturé sexuellement des femmes protestantes pour dévoiler leur lubricité, leur paillardise. Hérétiques, elles en devenaient les « putains » de Satan et devaient donc être traitées comme telles. Les viols ne sont pas ici considérés comme des crimes de guerre, mais des crimes sexuels pour des péchés sexuels.

Les violences sexuelles ne sont pas les seules violences que les femmes supportent en temps de guerre ; elles doivent parfois subir d’autres humiliations, comme celle de l’occupation de leur pays, ville, voire maison par les conquérants étrangers. C’est le cas du Nord et d’une partie de l’Est de la France lors de la guerre 1914-1918, évoqué ici par Philippe Nivet et David Bellamy. Philippe Nivet rappelle que, dans les dix départements français occupés par les Allemands, la popu­lation était majoritairement féminine et que ce sont donc les femmes qui ont souffert en premier de cette occupation. Grâce à leurs témoi­gnages et aux interrogatoires des rapatriés, nous mesurons mieux l’impact de la guerre et de l’occupation sur la vie de ces femmes : pénuries alimentaires engendrant une mauvaise santé générale, travail forcé avec déportations en Allemagne pour les travaux agricoles (com­me les 20 000 femmes de Roubaix, Tourcoing et Lille déportées en 1916), perquisitions et réquisitions… Le Journal de Marie Masquelier, jeune fille de bonne famille cultivée et curieuse, habitant près de Lille en zone occupée, présenté par David Bellamy, nous donne un excellent aperçu de toutes les souffrances féminines pendant la grande guerre. Marie voit la guerre de près, les tranchées, les blessés, les combats ; elle souffre avec toutes les autres femmes des bombardements, de leur bruit et de la peur panique face au canon. Elle évoque les conditions de vie très dures et la terreur instaurée par l’occupant allemand : la faim, le froid sont des conséquences des pillages et des réquisitions allemands. Ce qui motive sa haine des Allemands et son patriotisme ardent, c’est aussi l’humiliation de devoir les loger chez elle pendant plus de six mois ; elle les décrit alors comme des barbares sanguinaires enlevant les jeunes filles françaises, sentant mauvais, se comportant grossiè­rement comme des « goulafres » ou des « porcs », et n’ayant pas la même religion qu’elle. Elle se réfugie alors dans des prières patrioti­ques pour la destruction totale de l’Allemagne, dans l’exaltation du drapeau français, des actes de résistance et dans la condamnation des faits de collaboration. Sa culture de guerre est identique à celle des hommes, avec l’expérience unique de l’occupation que ceux de l’arriè­re ne peuvent pas comprendre selon elle. La résistance à l’occupation passe pour Marie Masquelier dans l’écriture de ce journal, qu’elle cache tout au long de la guerre des fouilles des Allemands. D’autres femmes résistent en portant les couleurs du drapeau français, en chan­tant La Marseillaise lors des travaux forcés, en refusant ces derniers, en cachant des soldats alliés et en les faisant passer en Hollande avec de faux papiers, ou encore en montant de vrais réseaux de renseignement et d’information pour les Anglais (Philippe Nivet). Ces actes de résis­tance, qui les conduisent pour certaines à la mort comme Louise de Bettignies ou Edith Cavell et pour d’autres en prison, prouvent que les femmes ne font pas que subir les guerres et l’occupation de leur pays et qu’elles dépassent l’image cliché de victime de guerre. Et même si la reconnaissance de ces faits de résistance fut très limitée après guerre, à cause de l’omniprésence de la figure de l’ancien combattant, cela fut une première étape avant la deuxième période d’occupation allemande entre 1940 et 1945 et la participation importante des femmes aux réseaux de résistance. De même, Philippe Nivet rappelle que l’occu­pation allemande en 1914-1918 a créé (avant celle de 1940-1945) des situations de collaboration des femmes avec les occupants et des rapprochements affectifs et sexuels. Des mariages, des enfants sont nés de ces rapprochements entre « ennemis », ce qui est une autre forme d’adaptation des femmes à la situation de guerre.

En dehors du cas particulier des conditions de vie des femmes en zone occupée, la Grande Guerre, première guerre totale du xxe siècle, a modifié la vie de toutes les Françaises, mariées ou non, pendant quatre longues années où elles ont dû apprendre de nouveaux rôles auparavant réservés aux hommes, comme celui de gestionnaire des biens, de « chef » de famille ou de travailleuse salariée. Clémentine Vidal-Naquet évoque les stratégies des femmes mariées pour réduire la distance entre elles et leurs maris au front, pour apprivoiser l’absence et gérer à distance le couple. Des femmes s’adaptent à leur nouvelle situation de solitude, remplacent les hommes dans la gestion des fermes, des boutiques ou même des entreprises, dans le travail des champs, tout en cherchant à conserver leur rôle ancestral de gardienne du foyer, de pilier de la famille et de la maison. Elles écrivent à leurs maris pour demander des conseils, des vérifications de comptes sans chercher à les évincer dans leur rôle de chef ; elles donnent des nouvelles de toute la famille, leur rappelle les anniversaires, les fêtes comme en temps de paix. Leurs lettres sont aussi un moyen pour garder une intimité de couple malgré la distance, pour faire survivre un lien conjugal mis à mal par l’absence. Malgré la censure, elles osent parfois parler de leur amour, de leur désir sexuel frustré, de leur manque et de l’angoisse de la mort de l’être aimé. Certaines, sans l’avouer à leur conjoint, cherchent à obtenir leur retour ou leur affectation à l’arrière en écrivant des lettres aux autorités militaires où elles se plaignent de l’absence devenue insupportable de leur mari ; sinon, elles essaient d’obtenir le droit d’aller les voir au front pour quelques jours, au nom de leur chagrin d’épouse délaissée. Elles tentent d’apitoyer les institu­tions, même si le plus souvent leur gestion de la souffrance et de la distance reste silencieuse et intime.

Si la guerre bouleverse les rapports de couple, elle modifie également les rapports familiaux et la place de la mère dans la famille. Manon Pignot s’intéresse ici aux nouveaux rôles maternels dus à la guerre 1914-1918, à la mutation de la figure maternelle grâce à un transfert de l’autorité du père à la mère. C’est à travers l’expérience enfantine du conflit qu’on peut mesurer ces changements. Tout d’abord, la mère est le premier médium du choc de la guerre pour les enfants : les larmes de la mère face au départ de l’homme, le chagrin maternel en cas de deuil constituent la première expérience de la souffrance pour les enfants. Ensuite, c’est la mère qui véhicule un discours de guerre moralisateur et culpabilisant pour les enfants ; ils doivent être sages car leur père se sacrifie pour eux, pour toute la nation. En zone occupée, la mère se doit d’être un modèle de force et de courage pour protéger son foyer, ses enfants des occupants ; elle devient une femme forte empêchant le pillage des biens familiaux, résistant au travail forcé des Allemands. Les petites filles semblent plus impressionnées par ce rôle de femme forte, ressemblant à un homme, que les petits garçons ; elles s’identifient à une figure maternelle qui se masculinise peu à peu à cause des nouvelles responsabilités à assumer : le travail à la maison et en dehors, la gestion de l’argent, l’entretien du foyer… Un peu dépossédées de leurs attributs féminins par les circons­tances de la guerre, elles le sont aussi par des pères qui changent, en demandant des nouvelles de la santé des enfants, en donnant des conseils de nourriture et d’éducation. D’ailleurs, ceux qui rentrent ont parfois du mal à retrouver leur place de père autoritaire ; les enfants ne les connaissent plus dans ce rôle car l’autorité est devenue aussi un attribut féminin, maternel. Le retour du père perturbe un nouvel équi­libre familial ; il est même parfois « encombrant » pour ses enfants comme pour sa femme. La parentalité se redéfinit alors, avec pour certaines familles un partage de l’autorité et une « modernisation » des pères qui commence, et pour d’autres un retour plus ou moins difficile à la « normalité du passé ».

 


[1]    Alors qu’en anglais, la bibliographie est foisonnante : voir notamment Women and War : a historical Encyclopedia from Antiquity to Present, ABC Clio, 2006, dir. Bernard Cook et Linda Grant de Pauw, Battle Cries and Lullabies :Women in War from Prehistory to the Present, University of Oklahoma, 1998.

[2]    La première en France à s’y intéresser fut Françoise Thébaud pour la grande guerre (voir Françoise Thébaud, La Femme au temps de la guerre de 14, Paris, Stock, 1986), puis Emmanuel Reynaud, Les Femmes, la violence et l’armée. Essai sur la féminisation des armées, Paris, Fondation pour les Études de Défense Nationale, 1988 (dans une perspective essentiellement d’étude sociologique des femmes dans les armées en temps de paix), L. Capdevilla, F. Rouquet, F. Virgili et D. Voldman (dir.), Hommes et femmes dans la France en guerre (1914-1945), Paris, Payot, 2003, et enfin pour faire le point sur les deux guerres mondiales, le numéro spécial de la revue Guerres mondiales et conflits contemporains, n° 198, 2000, dirigé par Chantale Antier et Marianne Walle. Dans le volume De la violence et des femmes (Albin Michel, 1997), dirigé par Cécile Dauphin et Arlette Farge, une partie s’intitule « Cruauté, viols et guerre au xxe siècle ». Elle comprend trois contributions : « Armes d’hommes contre femmes désarmées : de la dimension sexuée de la violence dans la guerre civile espagnole » (Yannick Ripa), « Les bombardements aériens : une mise à mort du guerrier (1914-1945) » (Danièle Voldman), « Guerre et différence des sexes : les viols systématiques (ex-Yougoslavie 1991-1995) » (Véronique Nahoum-Grappe). En anglais, la bibliographie est encore plus importante, citons seulement Women and War in the 20th century : Enlisted with or without Consent, ed. by Nicole Ann Dombrowski, New York, Garland, 1999 et Lucy Noakes, Women in the British Army. War and the Gentle Sex, 1907-1948, Portsmouth University, Routledge, 2008. Et sur les conséquences violentes des guerres contem­poraines sur les femmes, voir De la violence, séminaire de Françoise Héritier, Paris, Odile Jacob, 1996, et le numéro spécial « Femmes et guerres » de la revue Confluences, Méditerranée (n° 17), 1996.

[3]    Voir les travaux de Dominique Godineau, Catherine Marand-Fouquet, M.–F. Brive et ceux de Jean-Clément Martin (C. Marand-Fouquet, La Femme au temps de la Révo­lution, Paris, Stock, 1989 ; M-F. Brive, Femmes et Révolution, Toulouse, Presses du Mirail, 1990-1991 ; D. Godineau, Citoyennes tricoteuses, Aix-en-Provence, Alinéa, 1988 ; J-C. Martin, « Femmes et guerre civile, l’exemple de la Vendée, 1793-1796 », Clio, 1997, n° 5, pp. 97-115 et La Révolte brisée : femmes dans la Révolution française et l’Empire, Paris, Armand Colin, 2008).

[4]    Voir la synthèse de Micheline Cuenin, « La femme et la guerre (1516-1660) », dans Présences féminines, Ian Richmond et Constant Venesoen (dir.), Seattle, Papers on French Seventeenth-Century Literature, 1987. Elle évoque de grandes guerrières à partir de textes littéraires et de mémoires ou chroniques d’époque. Les historiennes féministes des années 1970 et 1980 se sont intéressées aux « amazones » guerrières pour remettre en cause les rôles sexués de la société, voir J.B Ehlstein, Women and War, New York, Basic books, 1987.

[5]    Voir l’éditorial de Dominique Godineau et Luc Capdevilla dans le numéro spécial de Clio, Armées, n° 20, 2004, qui rappellent que les femmes sont interdites d’armée car elles doivent procréer et aussi le livre de Josuaha S. Goldstein, War and Gender. How Gender Shapes the War System and Vice Versa, Cambridge, 2001, qui tente de résoudre l’énigme de “l’universal gendering of war”.

[6]    Yannick Ripa, art. cit., p. 138.

[7]    Dominique Godineau ajoute qu’en même temps qu’on dénie la fonction guerrière aux femmes, on leur dénie une fonction politique (idem). Sur le silence des historiens au sujet des femmes dans les guerres, voir l’article d’Eliane Viennot, « Les femmes dans les troubles du 16e siècle », Clio, 1997, n° 5, pp. 92-93.

[8]    Soulignons toutefois que ces standards sont remis en cause par certains auteurs, comme Margaret Mead, qui estime que le danger de l’emploi des femmes dans les uni­tés de combat ne tient pas à leur inaptitude à tuer, mais résiderait plutôt dans leur trop grande propension à tuer dans les situations conflictuelles (cité par Emmanuel Reynaud, op. cit., p. 164).

[9]    Arlette Farge, Les Fatigues de la guerre, Paris, L’Arbre à lettres, 1996.

[10]  La bibliographie sur la figure de la guerrière amazone est impressionnante. Voir notamment P. Samuel, Amazones, guerrières et gaillardes, Bruxelles, 1975 ou encore J. Weelwright, Amazons and Military Maids, Londres, 1989.

[11]  Sur les guerres civiles, voir le numéro spécial de Clio, Guerres civiles, n° 5, 1997.

[12]  Emmanuel Reynaud, op. cit., p. 162.

[13]  Pour la première guerre mondiale, voir Stéphane Audoin-Rouzeau, L’Enfant de l’ennemi, 1914-1918, Paris, Aubier, 1995 et pour l’ex-Yougoslavie, Véronique Nahoum-Grappe, « Guerre et différence des sexes : les viols systématiques (ex Yougos­lavie), 1991-1995 », dans De la violence et des femmes, op. cit., pp. 159-186.

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