LA PENSÉE NAVALE ITALIENNE APRÈS 1945

Ezio Ferrante

 

La désastreuse issue de la guerre et les polémiques passionnées relatives à sa conduite politico-militaire qui s’ensuivirent, le changement radical dans les relations internationales et le profond bouleversement de la « volonté de puissance » nationale domine le contexte au sein duquel se meut la pensée navale italienne dans l’immédiat après-Seconde Guerre mondiale. Les vicissitudes dramatiques du conflit, avec la double défaite infligée par les ex-ennemis anglo-américains et les ex-alliés allemands, seront vécues pendant longtemps comme le syndrome de la « fin de l’identité militaro-nationale du système du pays lui-même », et entraîneront un désintérêt pour les problèmes militaires.

Les nouveaux scénarios de la stratégie

Dans un contexte que même la presse américaine de l’époque n’hésitait pas à décrire, avec autant de réalisme que de manque d’égards, comme « l’effondrement de l’Italie en tant que puissance mondiale », dans un monde qui ne semble plus être le leur, réapparaissent timidement en uniforme de la marine, les plus éminents représentants de la pensée navale des décennies précédentes que sont Romeo Bernotti, Oscar di Giamberardino et Giuseppe Fioravanzo ; ils sont des « revenants » à leur façon, comme aurait dit Victor Emmanuel III, car ils appartenaient respectivement aux classes 1877, 1881, 1891. Leurs œuvres critiques en matière de stratégie navale avaient eu, en leur temps, un large écho international1 et maintenant, dans leur analyse rénovée, ils se risquent à interpréter les nouvelles dimensions de la stratégie mondiale. Leur engagement critique s’oriente donc dans deux directions bien précises : d’une part, selon une approche historique approfondie, il tend à illustrer et vérifier les événements de la récente guerre navale italienne2, tandis que, d’autre part, il essaie de redéfinir progressivement la signification d’une stratégie navale. « Dans cet après-guerre sombre, confus et plein de lassitude », Giamberardino, dans Il prossimo conflitto mondiale3, émet l’opinion que « la riposte anglo-américaine prévisible à l’invasion de l’Occident par les Russes serait celle d’une formidable manœuvre stratégique en tenaille, navale et aérienne, depuis la Baltique jusqu’à la mer Noire, de façon à étrangler le colosse moscovite par une offensive aérienne dans la région de l’Oural, séparant ainsi l’Europe de l’Asie ». Du fait de la situation des puissances occidentales en possession de la maîtrise de la mer, l’opposition navale soviétique ne pourra s’exercer que dans des limites étroites, le long de ses côtes, en se bornant à n’utiliser que des sous-marins et des croiseurs corsaires sur les autres théâtres d’opération. En d’autres termes, « la guerre russo-anglo-américaine du point de vue stratégique se présente comme la lutte entre la terre et la mer dans l’immensité des steppes et l’immensité de la mer, (alors que) l’ours moscovite (avec sa première offensive terrestre qui lui aurait permis d’occuper l’Allemagne et l’Italie) ne pourrait que s’arrêter sur les côtes et attendre que la baleine anglo-américaine vienne vers lui avec ce que nous pouvons appeler aujourd’hui power projection ashore, (si bien que,) comme l’océan des mers est sous l’empire des navires et des avions, l’océan des terres pourrait être sous celui des énormes escadres de puissants appareils aériens en tant que masse principale d’attaque, (en vue d’acquérir la maîtrise de l’air) ».

Ce facile enthousiasme à la Douhet est rapidement refuté et tempéré par Giambenardino4 qui précise : « Toute conception particulière et indépendante de chacune des trois forces armées doit être considérée comme révolue et arbitraire (¼ ). La conception d’une guerre aérienne indépendante qui ne se ferait pas en étroite collaboration avec les manœuvres stratégiques de l’armée et de la marine » doit être écartée pour respecter le principe de concentration des efforts5.

Dans l’immédiat après-guerre, les penseurs navals italiens, dans le sillage de leurs « précédentes professions de foi », adoptent donc les principes théoriques de la guerre intégrale et, en conséquence, ceux de la géographie stratégique intégrale6 estimant erroné le caractère décisif de la guerre aérienne7.

À propos de la remise sur le tapis de cette brûlante question, Bernotti se montre plus en retrait que dans l’essai Questa crisi mondiale8 et réexamine le problème en partant de son fondement historique pour en analyser les futurs développements :

La supposition qui voudrait que l’aéronautique ait le pouvoir d’apporter toute seule la victoire était fondée sur l’interprétation unilatérale des résultats de la Seconde Guerre mondiale, attribuant au bombardement aérien l’importance d’un facteur décisif ; par conséquent, supposant a fortiori que cela serait censé être certain, même dans la guerre atomique. Il est sans doute vrai que, dans la Seconde Guerre mondiale, le bombardement stratégique fut l’un des éléments du succès, mais il serait très exagéré de le considérer comme l’unique facteur déterminant. (…) La Seconde Guerre mondiale fut totale et intégrale, menée intensément sur des fronts terrestres continentaux et d’outre-mer, comme aussi sur mer contre les lignes de communication. (…) La guerre du futur sera essentiellement comme celle du passé : une lutte entre les forces armées dans leurs multiples formes ; tout particulièrement, la stratégie de l’Occident dépendra de la liberté avec laquelle on utilisera les mers. L’hégémonie en Méditerranée aura plus que jamais une importance fondamentale pour la défense européenne. Il reste évidemment le recours aux armes nucléaires qui ne peuvent ni défendre, ni vaincre, seulement détruire. En fait, ce recours est la solution militaire absolue.

Mais la véritable importance de l’œuvre de Bernotti réside, au-delà de son approche générale, dans l’accent mis sur la politique italienne de défense au lendemain de la signature du Pacte Atlantique : « le point de vue national doit passer après le point de vue européen, à son tour subordonné au point de vue mondial, dans le cadre du Pacte Atlantique et de la Communauté européenne de Défense (CED)« 9. Les problèmes particuliers de défense des nations indépendantes doivent être considérés dans le contexte plus large de la situation générale politico-stratégique. À l’époque de la guerre froide, « guerre virtuelle avec un risque constant de dérapage vers la guerre totale« , il est nécessaire pour l’Italie de présenter un programme d’idées sans se mettre en vedette, mais aussi sans adopter une attitude de renoncement ; dans ce programme la Marine doit d’abord se soucier de, «  défense du trafic maritime dans les eaux nationales en accord avec les obligations de l’OTAN« .

L’atlantisme s’affirme comme l’axe de la stratégie navale italienne, et fait naître en Italie un débat critique tournant essentiellement autour de la stratégie des moyens (mise en accord des moyens techniques avec les objectifs politico-stratégiques) et dans lequel la solution du problème aéro-maritime national prend soudain un relief particulier.

Les termes de ce dernier problème sont exposés d’une façon particulièrement claire par Bernotti : la persistance de la législation des années vingt, axée sur le monopole de l’armée de l’Air sur tous les aéronefs, entraîne la disparition de fait d’une quelconque stratégie intégrée au niveau des interforces, tant nationales qu’internationales (de nos jours, au niveau « joint » plutôt que « combined« ). Cela se passa de cette façon dans la Seconde Guerre mondiale et cela aura aussi lieu dans le conflit futur, auquel l’Italie participera dans le contexte des engagements atlantiques10. D’où l’exigence absolue de mettre sur le tapis la question importante du porte-avions, écartée en 1923, tardivement reprise en 1941 et tout simplement oubliée dans l’après-Seconde Guerre mondiale, alors que l’aviation embarquée est l’unique arme capable d’assurer l’indispensable appui aérien dans le combat naval. À cause des thèses de Douhet, la flotte italienne est contrainte d’opérer sans aviation, la possession de cette arme essentielle lui est interdite. Bernotti Cette constatation rappelle à Bernotti la remarque pleine de justesse de l’amiral Castex : « Dans le même ordre d’idées, pourquoi ne pas admettre qu’il est aussi logique d’interdire l’artillerie à la Marine ?« . L’illustre amiral conclut par ces mots : « La thèse de Douhet sombre dans l’enfantillage« 11.

Le débat technico-opérationnel, repris avec vigueur en particulier par Bernotti, sur la nécessité de créer une aviation navale, sera destiné à se prolonger durant les trois décennies suivantes par toute une série de travaux critiques (parmi lesquels citons en particulier, pour sa valeur documentaire et celle de ses propositions, l’essai des amiraux Mario Angelotti et Ubaldo Bernini)12. La conclusion sera en faveur de la Marine, après diverses propositions depuis la constitution de groupes d’hélicoptères jusqu’à l’idée du croiseur porte-aéronefs Garibaldi ; la loi du 26 janvier 1989 prévoit enfin l’acquisition d’une composante aérienne à aile fixe par la marine.

Le débat sur l’aviation navale, loin des controverses théoriques qui avaient caractérisé, dans la période d’avant-guerre, la polémique entre maîtrise de la mer et maîtrise de l’air, se situe dans un plus vaste contexte, celui de la stratégie des moyens, tourné vers le renouvellement de la flotte italienne en fonction de ses missions opérationnelles au sein de l’Alliance Atlantique qui provoque l’intérêt des analystes navals dans la période d’après la Deuxième Guerre mondiale, une fois surmontées les conditions contraignantes imposées à la Marine par le traité de paix. En cas de conflit, la mission de la marine italienne concernera essentiellement le contrôle des zones maritimes qui lui sont désignées ainsi que la défense des communications maritimes en liaison avec les forces navales alliées. Donc, un plan simple, direct, qui n’admet pas, dans la réalité de la confrontation bipolaire du moment et des constantes restrictions budgétaires des programmes navals, de « déséquilibres financiers » d’aucune sorte ; à la rigueur, il serait question de vérifier les limites et les possibilités réelles de ce plan d’une façon réaliste et concrète par une analyse des fins et des moyens.

C’est ce que, par exemple, se propose de faire l’amiral Virgilio Spigai dans son essai Il problema navale italiano13, dans lequel il fustige la politique navale à courte vue du moment conçoit, d’une manière simpliste, la flotte comme un simple et pur moyen de défense en cas de conflit au lieu de ce qu’elle devrait être : « un instrument de la plus grande efficacité à utiliser dans toutes les occasions, que ce soit en paix comme en guerre » ; cette politique ne se soucie même pas d’assurer avec un budget de misère l’existence d’une flotte de défense crédible.

Quant au coefficient de protection (rapport qui doit toujours être fait entre le déplacement total de la flotte de guerre et le tonnage global de la flotte marchande), il est de 0,1 et, suivant l’analyse de l’auteur, le plus faible de toute l’histoire nationale.

Par ailleurs, le niveau de l’armement de l’Italie, dans tous les secteurs, est incroyablement modeste et, comme l’observe avec peine l’amiral, « modeste au point que si tous les pays étaient armés comme nous, on ne risquerait pas d’avoir la guerre« . Étant donné la réalité des relations internationales et les engagements souscrits par l’Italie, l’unique issue pour une saine politique navale « sera celle qui consistera à la planifier au moyen d’un organe adéquat permanent et à traduire en lois le coefficient de protection » considéré comme indispensable pour assurer la crédibilité sur mer de la nation elle-même.

L’essai de Spigai, avec son ardeur polémique profonde et sa réserve dans la forme14, acquiert un intérêt particulier par son ouverture vers une série de cahiers de doléances15 des analystes navals à propos de la nécessité de conserver la cohésion de la flotte à un niveau indispensable pour qu’elle remplisse ses missions fonctionnelles (en réalité 105 000 tonnes de déplacement au lieu des 210 000 tonnes prévus par Spigai) ; elle trouvera sa concrétisation politico-financière avec la loi navale pluriannuelle de 1975 (avec l’engagement de mille milliards par décennie) qui a défini jusqu’à nos jours, au cours desquels un débat similaire s’est inévitablement rouvert, le rythme des constructions navales militaires en Italie. L’attention des critiques navals est constamment attirée par les grands thèmes de l’énergie nucléaire et par ses applications au domaine naval, dans une série de contributions plus orientées vers l’information que vers des propositions, comme le prouvent toute une suite d’interventions16 à ce sujet.

En revanche, la réédition de l’ouvrage célèbre de l’amiral di Giamberardino, Arte della guerra in mare17, incluant une « refonte totale imposée par l’âge nucléaire« , conduira l’auteur, du point de vue de la stratégie globale, à tirer des conclusions opérationnelles quant à un conflit futur ;

Si les destructions initiales provoquées par l’offensive aérienne russe et par la contre-offensive de l’OTAN en réponse aux premières, malgré leur atrocité, n’ont pas amené la fin du conflit, il serait alors bon d’envisager d’autres opérations avec la totalité des forces terrestres et navales dans une stratégie vraiment cohérente appliquée aux grands espaces, non pas pour foudroyer d’un coup l’ennemi mais pour mener contre lui une action probablement de longue durée. Alors, ce serait la puissance navale qui jouerait le rôle de facteur de durée, l’élément de cohésion étroite de la puissance militaire de l’Occident (…). Il serait facile de prévoir aussi une autre colossale bataille anti-sous-marine de longue durée dans l’Atlantique, comme celle de la dernière guerre, avec des prolongements en Méditerranée, en mer Rouge, dans l’océan Indien et dans le Pacifique ; en somme dans toutes les mers du monde.

C’est un scénario dont Giamberardino ne néglige pas de tirer des leçons dans des termes théoriques :

Pour la première fois, la théorie de Mahan sur le facteur économique déterminant de la puissance maritime n’a pas la même valeur pour les deux adversaires (…) ; c’est d’une part, pour l’un, la capacité et la force de dominer la mer, tandis que l’autre peut à peine tenter de l’empêcher sans qu’il lui soit possible de le remplacer dans son domaine ; d’autre part, c’est l’avantage de celui qui est presque inattaquable vu l’étendue de son propre territoire (sinon par l’offensive aérienne stratégique appuyée énergiquement par les porte-avions et les unités lance-missiles), il n’a pas les dispositions et la nécessité pressante du grand commerce maritime.

Dans l’analyse des caractères de la guerre future, Giamberardino fait une large place aux inévitables « surprises » techniques et opérationnelles, mais aussi à celles de nature plus spécialement politique : il affirme que c’est davantage de l’effondrement de la résistance de l’homme que pourra venir la fin des hostilités ; ce n’est pas une nouveauté, car déjà Clausewitz disait : « La guerre, étant une des activités de l’homme, est entièrement fondée sur la faiblesse humaine et dirigée contre cette dernière« . Mais lequel des deux adversaires ressentira le plus facilement l’écroulement moral ?18

Le débat culturel naval

Comme nous avons pu le constater dans ce rapide examen, les analystes italiens envisageaient le « problème naval » à l’époque de la guerre froide essentiellement en termes de défense, selon le couple binaire stratégie des moyens (obtention selon un plan préétabli, des hommes et des moyens nécessaires à la poursuite de l’objectif militaire), stratégie opérationnelle (planification, coordination et emploi des moyens mis à disposition selon des modalités tactiques convenant à la poursuite des objectifs préétablis). Néanmoins, général, on ne négligeait pas la dimension proprement théorique axée sur la redéfinition de la signification et du contenu des études stratégiques. C’est encore une fois Bernotti qui, dans son article « La strategia come studio »19, pose clairement le problème. Si l’on admet que « les principes fondamentaux de la stratégie sont de simples vérités évidentes qui subsistent bien que nous puissions changer les moyens militaires ; de tels principes immuables constituent – selon Castex – un bagage très léger » pour qui se propose la difficile tâche de fixer les critères d’exécution de la conduite de la guerre. Il sera nécessaire au chercheur (à qui on demande d’avoir des connaissances techniques, autant qu’intellectuelles ou spirituelles) de partir toujours de « tels axiome et postulats, de données qui déterminent ce qu’est la guerre, en raisonnant scientifiquement et avec une méthode déductive et inductive, mais aussi avec l’Histoire pour guide en mettant en rapport les moyens avec les objectifs et précisant un ensemble de critères généraux appropriés aux conditions de chaque époque« .

Il ne faut pas penser que le secours des études historiques à l’étude de la stratégie aurait perdu toute utilité pratique, car la critique historique représente toujours « l’élément stimulant de l’imagination en ce quelle développe la capacité de concevoir et de s’orienter face aux nouvelles possibilités de l’époque dans laquelle nous vivons« .

L’époque contemporaine est caractérisée par l’interdépendance et l’interpénétration des problèmes politiques et militaires : « Les considérations stratégiques ont une influence sur la politique du temps de paix et inversement ; même en période de guerre chaude, la politique continue à exercer son influence sur la stratégie » ; par l’interdépendance dans les trois champs d’action air, terre, mer ; par l’interpénétration entre tactique et stratégie à cause de l’augmentation des rayons d’action des armes. En d’autres termes, selon Bernotti, la guerre doit être considérée dans son ensemble !

La méthodologie proposée par Bernotti (analyse théorique du problème stratégique sur des bases historiques) représente le difficile banc d’essai des chercheurs italiens qui, le plus souvent, préfèrent axer leurs recherches sur la critique historique tout court20, apprenant tout au plus à commenter et à discuter les aspects théoriques en accord avec ce qui apparaît (ou se découvre ou se redécouvre) original au niveau international dans cette « globalisation de la culture » qui finit par caractériser toujours plus le monde contemporain.

Par exemple, commentant les travaux du général Beaufre21, le capitaine de vaisseau Flamigni, professeur adjoint de stratégie à l’Institut de guerre navale de Livourne (le premier institut de formation de la marine italienne créé par Bernotti en 1921), affirme avec force et avec des accents dignes de Bernotti que la stratégie est « une philosophie qui fournit une méthode de pensée nécessaire à la définition du problème politique et à la solution (par les stratégies partielles) du problème lui-même » ; il souligne en particulier ce qu’ont de fonctionnel les études historiques grâce à l’étude de la stratégie, à condition que celle-ci ne soit pas « l’unique élément d’étude« . Il faut qu’on se mette à faire des études stratégiques dans les divers « domaines qui ont de l’intérêt » : politique, économique, diplomatique, etc. En d’autres termes, il s’agit de considérer la stratégie militaire non seulement dans une optique de moyens, mais aussi dans un contexte général de stratégie totale, selon la propre terminologie du général Beaufre. Il affirme ensuite22 que la stratégie « est un tout qu’on ne peut scinder et qui englobe toutes les capacités potentielles de l’État« . La stratégie globale est faite de stratégies partielles selon les moyens employés (militaires, économiques, techniques, psychologiques, idéologiques et sociaux) « qui peuvent exister s’ils sont étudiés un à un, mais qui ne doivent pas être isolés du contexte général« .

Pour Flamigni, la stratégie militaire est l’ »art du commandant en chef militaire dans sa double fonction de conseiller militaire du pouvoir politique et de commandant des forces militaires« . Sa première fonction est donc la formulation de la stratégie globale, pour fournir au pouvoir politique les solutions militaires appropriées pour satisfaire aux objectifs politiques. Sa deuxième fonction, secondaire, est autant la préparation des moyens (stratégie des moyens) que la planification, la coordination et la conduite des opérations (stratégie opérationnelle). Une brillante synthèse qui, en un certain sens, prélude aux interventions publiques des plus hautes autorités navales, au niveau du chef d’état-major, qu’on observe constamment à partir du milieu des années quatre vingt, à l’occasion des sessions du Centro Alti Studi Difesa, l’institut de niveau le plus élevé en matière de formation nationale interarmes, sessions régulièrement signalées dans la Rivista Marittima23. C’est la référence fondamentale sur les coordonnées d’action politico-stratégique de la Marine, en face de quoi les interventions de quelques officiers de réserve ou plus rarement de chercheurs civils n’ont pu, tout au plus, que proposer de simples commentaires ou suggestions à titre personnel. Dans l’analyse des rapports de « la pensée du chef », Basil Liddell Hart n’avait-il pas écrit que « le chef ne raisonne pas seulement en termes de stratégie, mais aussi de  » grande stratégie « , c’est-à-dire qu’il raisonne à un niveau supérieur, là où les actions politiques et militaires se conjuguent« 24 ?

Théoriquement, le référant idéologique est constitué essentiellement par la théorie de Mahan, laquelle, en Italie, a toujours eu du succès malgré les inconvénients inévitables dus aux traductions tardives25. C’est un Mahan non pas interprété littéralement mais « revisité » en fonction des exigences prévisibles de la guerre froide sur mer où la « maîtrise de la mer » n’a pas son caractère de prééminence et n’est pas déterminante. La mission mahaniennne se manifeste par le maintien du libre usage des voies de communications maritimes permettant la circulation des approvisionnements et le passage des renforts venant des États-Unis et destinés aux théâtres d’opérations d’Europe et de Méditerranée. Et cela dans un contexte où le concept stratégique ne dépend plus, comme à l’époque de Mahan, de l’affrontement direct entre un certain nombre de navires armés de la même façon, pouvant être utilisés en un lieu déterminé et à un moment donné, mais essentiellement de la supériorité de concentration de systèmes d’armes appropriés, interdisant à l’adversaire de faire de même26.

De grands personnages aujourd’hui disparus ont dominé la scène culturelle de la période d’avant-guerre et, comme nous avons essayé de le montrer, ont aussi joué un rôle de premier plan dans l’immédiat après-guerre ; il s’agit de Giamberardino, Bernotti et Fioravanzo (disparus respectivement en 1960, 1974 et 1975). Dans le domaine de la critique historique, on « redécouvre » progressivement la tradition et la pensée militaire et navale italienne que les événements dramatiques de la guerre avaient peu à peu chassées de la mémoire27.

Au seuil du troisième millénaire

D’une façon qui aurait sans doute beaucoup plu à Sun Zi – le célèbre maître de la stratégie de l’ancienne Chine28 -, la troisième guerre mondiale a été gagnée sans avoir à être livrée. Dans son brillant et satirique pamphlet au titre provocateur : La Vittoria dell’Italia nella terza guerra mondiale, le diplomate Ludovico Incisa di Camerata29 montre que l’Italie va s’imposer dans cette guerre. Malgré la politique extérieure italienne calquée sur une politique intérieure déficiente, avec les rôles que lui a confiés l’OTAN, d’abord celui de la défense de son flanc sud dont elle a le commandement (qui est aussi l’objectif final de l’ultime tentative de l’URSS voulant étendre sa domination sur tout l’Occident), puis sa décision d’installer à Comiso, en Sicile, des missiles intermédiaires Cruise et Pershing. Cette dernière démarche était un défi à la politique soviétique qui recherchait à bâtir un équilibre militaire européen en sa faveur, lequel aurait entraîné l’autofinlandisation de l’Europe. L’Italie, en fait, avait contribué à déjouer définitivement la menace soviétique et, en conséquence, se trouvant parmi les vainqueurs de la guerre froide, aurait, à titre de récompense, « récupéré une position géopolitique privilégiée » dans le contexte méditerranéen.

En réalité, le théâtre méditerranéen, une fois évacuées les idées velléitaires maximalistes liées au souvenir du Mare Nostrum que Mahan appelle « Manifest destiny of Italy« , n’a jamais été oublié par la stratégie navale italienne, et surtout pas dans les heures les plus difficiles des premiers temps de l’après-guerre30. Tout au plus, il avait été pensé essentiellement en termes de défense et avec l’idée de contenir l’adversaire, déterminé particulièrement par la confrontation bipolaire dans laquelle la conflagration s’étendait « du haut vers le bas »31. Dans le monde de la post-guerre froide, la région méditerranéenne (la soi-disant Méditerranée au sens large) dans laquelle les flottes soviétique et américaine ont cessé de s’affronter, est, en revanche, repensée dans une optique de sécurité collective à l’enseigne de la coopération internationale.

L’Italie, « puissance moyenne régionale ayant des intérêts économiques mondiaux », dans le passage d’une conception statique à une conception dynamique de la politique de défense et dans une synergie favorable entre les trois politiques extérieure, économico-commerciale et sécuritaire, tend à se doter d’une présence internationale appropriée, « en premier lieu, précisément, dans sa zone géopolitique (la Méditerranée au sens large) ; mais aussi là où cela s’avère nécessaire pour des raisons valides de politique internationale, aussi hors de cette zone, pour le maintien de la paix et de la stabilité internationale ainsi que pour des raisons de caractère humanitaire« 32.

Un tel contexte implique un renouvellement, conceptuel et opérationnel, des moyens navals eux-mêmes, des programmes d’opérations dont les éléments sont encore une fois formulés dans toute une série d’interventions directes du chef d’état-major de la Marine33. C’est une fois arrivé à ce point capital qu’on peut penser une « nouvelle » stratégie navale qui tendra à donner une plus grande flexibilité et une capacité de projection plus forte aux moyens militaires interforces appuyant depuis la mer les des éléments interforces à terre.

Naturellement, la « maîtrise par la mer » ne doit pas se comprendre comme « fonction de coopération collatérale ou temporaire », comme elle pouvait l’être dans la guerre intégrale ; au contraire, exercer la « maîtrise par la mer » est la « véritable combinaison des efforts déployés dans tous les théâtres d’opérations (depuis les systèmes de contrôle jusqu’à la guerre électronique, depuis l’artillerie jusqu’à la force amphibie, depuis l’aéronef embarqué jusqu’au missile mer-sol), pour contrôler depuis la mer les opérations conduites à terre« .

À une époque fortement marquée par l’indiscutable thalassocratie occidentale, cette formulation de la doctrine navale officielle de la marine italienne, implique avec la superposition de la « maîtrise par la mer » à la traditionnelle « maîtrise de la mer », un changement radical du cadre général de référence théorique ; la référence à Mahan est rendue caduque par la découverte de la doctrine de sir Julian Corbett. Ce n’est pas un hasard si son œuvre, Some Principles of Maritime Strategy, datant de 1911, a été traduite en italien en 1995 par l’Ufficio Storico della Marina. D’autre part, le fait de reconnaître la Méditerranée au sens large comme zone essentielle d’intérêt national ouvre la voie au renouveau des études de géopolitique et de relations internationales34 ; alors que la « géopolitique du passé avait essentiellement un caractère spatial et physique, privilégiant les éléments tels que la distance, l’importance, les ressources naturelles et la position géographique, la nouvelle géopolitique, elle, englobe l’économie, les structures productrices, sociales et culturelles, la psychologie des peuples, la démographie et les perspectives mondiales telles que l’écologie et le développement« 35.

Tandis que l’Italie, avec le triple « cercle concentrique » de sa propre politique extérieure (atlantique, européenne, méditerranéenne), cherche à redéfinir son rôle géopolitique dans le nouvel ordre mondial, encore insaisissable et en devenir, mettant en avant les engagements internationaux de « peace-keeper » et les devoirs de « constabulary » confiés aux forces navales par les institutions du nouveau droit de la mer, on ne peut qu’exprimer le vœu d’une reprise « originale » de la pensée navale nationale qui ne sera plus fondée tout court36 sur la stratégie des moyens et sur la stratégie opérationnelle ; elle ne serait pas non plus une forme adultérée des autres théories qui s’expriment essentiellement sous la forme de commentaires et de propagande critique. « J’ai passé toute ma vie à tenter de découvrir ce qu’il y avait de l’autre côté de la colline ! » Cette pensée « métaphorique » du duc de Wellington pourrait être le soutien indispensable des analystes navals de l’avenir, à la recherche d’une méthode originale pour essayer de voir « derrière la colline », c’est-à-dire derrière le rideau des événements et des faits transitoires.

 

 

 

 

 

 

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Notes:

 

1 Je ne peux que renvoyer à mes essais et, en particulier, à « Il pensiero stratogico navale in Italia », Rivista Marittima (qui sera dorénavant notée RM), supplément n° II/1988, et à « La pensée navale italienne entre les deux guerres », dans Hervé Coutau-Bégarie (dir.), L’évolution de la pensée navale VI, pp. 153-177.

2 En particulier, rappelons les écrits de l’amiral Fioravanzo publiés dans le recueil La Marina nella seconda guerra mondiale de l’Ufficio Storico della Marina Militate, dont l’amiral était le directeur. Le azioni navali nel Mediterraneo (1959-1960, 2 vol.) ; La Marina dall’8 settembre 1943 alla fine del conflitto (1962) ; La difesa del traffico con l’Africa settentrionale (1964) ; Il conflitto (1972-1975-1978, 3 vol.) ; enfin, nous pouvons rappeler Storia del pensiero tatico navale (1973). En ce qui concerne Bernotti, signalons La guerra sui mari nel conflitto mondiale, Livourne, Tirrena, 1947-1950, 3 vol., et Storia della guerra nel Mediterraneo, Rome, Vito Blanco, 1960. Di Giamberardino a écrit La Marina nella traiedia nezionale, Rome, Danesi, 1947, ainsi que la série d’articles sur les transports d’approvisionnement de l’Afrique du Nord, dans RM, nos 1, 2 et 3 de 1948.

3 Rome, Danesi, 1947.

4 Dans « Strategia dei Grandi Spazi », RM, n° 4, 1948, pp. 5-11.

5 À propos de cette polémique, voir mon « Giulio Douhet e i pensatori navale », dans La figura e l’opera di G. Douhet. Atti dei Convegno, Caserta, Società di Storia Patria di Terra di Lavoro, 1988, pp. 245-257.

6 Analysée par Fioravanzo dans Il Mare et la Strategia dei Grandi Spazi, Livourne, Istituto di Guerra Marittima, 1955-1956, dans lequel il expose les fondements d’une géographie stratégique intégrale « conditionnant, en temps de paix, la politique internationale et la préparation des forces pour soutenir cette politique et, en temps de guerre, la conduite des opérations« .

7 Fioravanzo lui-même, commentant, dans la RM, nos 8 et 9, 1954, l’ouvrage de A. de Seversky (Air Power : Key to Survival, trad. italienne 1953), reconnaît le changement d’époque que le second conflit mondial a entraîné dans la puissance aérienne : « un temps intégrant complètement les puissances maritime et terrestre« , se trouvant être maintenant « l’arme destructrice par excellence » avec des fonctions décisives si, selon lui, on complète le célèbre « bombardement stratégique » par des « opérations de troupes aéroportées ».

8 Livourne, Tirrena, 1954.

9 Sur le débat italien avec la CED, en particulier, rappelons F. Marenco, « Communità europea di difesa : mera utopia o grosso affare per tutti gli europei ? », RM, nos 7 et 8, 1970.

10 « Si la puissance maritime s’est transformé en puissance aéromaritime, il s’ensuit qu’une Marine sans une aviation propre ne peut être efficace. C’est une vérité qui coule de source, que tout le monde reconnaît, mais l’Italie feint de l’ignorer et de ne pas vouloir la comprendre. Le fait que l’Italie ne trouve pas l’issue pour sortir de cette situation chronique… interdit aux alliés de faire confiance à notre nation ; ils ne viennent pas à notre aide au moment où nous nous réarmons, même si notre politique militaire est globalement rationnelle. » op. cit., pp. l37-138.

11 Bernotti, p. 131, reprend la citation de Castex tirée de l’article « La pure doctrine », Revue des forces aériennes françaises, XII, 1948.

12 Il problema aeronavale italiano. Aspetto storici e attuali, Livourne, Belforte, 1981.

13 Rome, Vito Bianco, 1963. Du même auteur, voir aussi « I fronti del potere navale », RM, n° 2, 1960.

14 « En hommage à la parfaite neutralité politique des forces armées italiennes, cet ouvrage est absolument apolitique. Il ne s’occupe pas de politique au sens que l’on donne couramment en Italie à ce mot : partitisme ou philopartitisme avec une certaine tendance à l’idée de parti. » (ibid., p. 7).

15 En français dans le texte (ndt).

16 Nous rappelons, toujours à titre d’exemple, L. Musumeci, « L’énergie atomica e il potere marittimo » ; R. Bernotti, « Conseguenze strategiche dell’era nucleare », et S. Roccotelli, « La propulsione nucleare oggi », parus respectivement dans RM nos 5 et 6, 1954, n° 12, 1965, et nos 11 et 12, 1971. Y ajouter, sur les accords nucléaires secrets franco-italiens, la contribution récente d’Achille Albonetti, « Storia segreta della bomba atomica italiana ed europea », Limes. Rivista italiana di geopolitica, 1998-2, pp. 157-171.

17 Rome, Ministère de la Défense-Marine, 1958 ; les deux précédentes éditions remontent aux années 1937 et 1938 par l’Ufficio Storico della Marina.

18 Pour une analyse plus détaillée, voir « Caratteristiche della possibile guerra futura » (pp. 52-58), dans lequel on développe les concepts déjà abordés dans Il prossimo conflitto mondiale ; il s’insère dans la ligne de pensée qui a, par la suite, été celle de personnages aussi notables que B.H. Liddell Hart, John Hackett, Shelford Bidwell – dont les œuvres traduites en italien ont bénéficié d’une vaste diffusion (respectivement : La prossima guerra, La terza guerra mondiale, Una storia futura, La terza guerra mondiale, Milan, 1960 et 1979, Rome, 1981).

19 RM, n° 3, 1960, pp. 5-12.

20 En français dans le texte (ndt).

21 «  » Appunti su introduzione alla Strategia  » du général A. Beaufre », RM n° 12, 1970 ; le texte du général français date de 1965 (Paris, Colin) et a été traduit en italien l’année suivante (Bologne, Il Mulino, 1966). Voir en outre le travail de A. Flamigni et M. Calttich, « A proposito di  » Appunti su introduzione alla Strategia  » del générale Beaufre », RM, n° 3, 1971.

22 Dans l’article « Che coss’e la Strategia ? », RM, n° 7, 1984.

23 Voir mon essai « La Rivista Marittima dalla fondazione ai nostri giorni. La stora, gli autori, le idee », supplément à la Revue Marittima, n° 7, 1986, pp. 101-sq.

24 La prossima guerra, op. cit. , p. 21.

25 Du corpus des œuvres mahaniennes, n’ont été traduits que récemment en italien : L’influenza del potere marittimo sulla storia (1660-1783), Rome, Ufficio Storico della Marina, 1994 ; L’importanza del potere marittimo per gli interessi degli Stati Uniti, Rome, Forum di Relazioni Internazionale, 1996 ; Strategia navale, Rome, Forum di Relazioni Internazionale, 1997, avec une intéressante introduction de l’amiral Fernando Sanfelice di Monteforte. L’amiral Castex a eu une certaine influence, mais n’a pas été traduit, jusqu’au travail en cours sous la direction de l’amiral Vezio Vascotto, les deux premiers tomes des Théories étant parus sous le titre Teorie strategiche, Rome, Forum di Relazioni Internazionale, 1999.

26 Signalons les travaux de P.P. Ramoino, Il Pensiero di Mahan e la sua influenza nella storia del pensiero strategico, Livourne, IGM, 1982, et de A. Flamigni, « Alcune considerazioni sui potere marittimo », RM, n° 12, 1989, et Evoluzione del potere marittimo nella storia, Livourne, IGM, 1992.

27 Je renvoie à mes essais : « Il Potere marittimo. Evoluzione ideologico en Italia (1861-1939) » et « Il pensiero strategico navale in Italia », suppléments à la Revista Marittima, n° 10, 1982 et n° 11, 1988, « Potere marittimo », dans Storia militare d’Italia (1796 1975), Rome, Editalia, 1990, pp. 189-204 et « Giulio Rocco, précurseur oublié », dans Hervé Coutau-Bégarie (dir.), L’évolution de la pensée navale III, pp. 85-96 ; P.P. Ramoino, Alcune note sul Pensiero strategico del Machiavelli, Alcune note sul Pensiero di Clausewitz, Qualque nota sul Pensiero di Jomini, Livourne, IGM, 1982 et 1988 ; A. Flamigni, « Appunti su Clausewitz », RM, n° 10, 1982.

28 C’est le penseur militaire le plus traduit en Italie. Parmi les plus récentes éditions de l’Arte della Guerra, rappelons celles de Thomas Cleary (Rome, Ubaldini, 1990), Riccardo Fracasso (Rome, Newton Compton, 1994) et Leonardo Vittorio Arena (Milan, Rizzoli, 1997). On souhaiterait que les œuvres de Mahan, de Castex et de Corbett aient le même succès !

29 Bari, Laterza, 1996.

30 Je renvoie mes essais : « Il Mediterraneo nei primi anni Cinquanta : problemi di politica e strategia navale », dans E. di Nolfo, R.H. Rainero et B. Vigezzi (ed.), L’Italia e la politica di potenza in Europa (1950-1960), Settimo Milanese, Marzorati, 1992, et « Il Mediterraneo nella Coscienza nazionale », supplément à la Revista Marittima, n° 6, 1987.

31 Dans le sens où « les diverses nations se situent par rapport aux deux superpuissances en tant que pays alliés, satellites, clients, neutres, non alignés (et) les leaders d’un pays pouvaient faire un tel choix basé sur des considérations de sécurité, sur des calculs d’équilibre des pouvoirs ou sur leurs préférences idéologiques« , ainsi que le note bien Samuel B. Huntington, dans Lo scontro delle Civiltà e il nuovo ordine mondiale, véritable best-seller international traduit en 23 langues, qui a provoqué en Italie un vaste débat critique (trad. italienne Milan, Rizzoli, 1997).

32 « Un cadre qui, à partir du Liban en 1982, passe par l’opération Desert Storm en 91, la mission Airone au nord de l’Irak, la mission Pellicano en Albanie en 1991-1993, la mission Ibis en Somalie en 1992 et 1994, la mission Albatros au Mozambique de 1993 à 1994, les missions IFOR et SFOR en Bosnie en novembre 1995 et, pour finir, l’opération ALBA (en 1997) qui a vu la participation de 50 000 de nos soldats, marins et aviateurs… où pour la première fois l’Italie a assumé le rôle de pays guide dans une coalition multinationale européenne« . Amiral Guido Venturoni, « L’adattamento dell’Alleanza atlantica nel contesto evolutivo della sicurezza europea », conférence à l’Istituto Alti Studi Difesa, 26 juin 1997.

33 En particulier, rappelons les Rapports annuels sur l’état de la Marine militaire italienne (à partir de 1993), moyen de communication externe entre la Marine et l’opinion publique, « une mise au point traditionnelle dans le panorama toujours plus riche de l’information sur des thèmes de sécurité« , comme l’a défini l’amiral Angelo Mariani, chef d’état-major général de 1994 à 1998, compte rendu objectif de ce qui est arrivé dans l’année précédente, inséré dans un contexte de réflexions qui tendent à rendre compréhensible la liaison entre l’activité des forces armées et la représentation la plus générale de la politique étrangère et de sécurité.

34 A. Flamigni, « Rinascita delle Geopolitica », Rivista Militare, n° 4, 1992 ; A. Flamigni et Carlo Jean, « Ancora sulla geopolitica », RM, n° 7, 1993, ; Carlo Maria Santoro, « La geopolitica del Mediterraneo », Affari Esteri, n° 109, hiver 1996 ; Carlo Jean, « La rivoluzione geopolitica del dopoguerra fredda », Affari Esteri, n° 113, hiver 1997.

35 « Un renouveau de la pensée géopolitique, considéré non pas comme une recherche du « sens » de l’histoire ou comme une prédiction du futur, mais comme une enquête sur l’influence de l’air du temps sur les décisions politiques apparaît de la plus grande importance pour la réalisation des intérêts nationaux et des lignes générales de l’action provenant du développement en vue de les matérialiser« , comme l’affirme avec force le général Carlo Jean dans son article « La riscoperta della geopolitica », RM, nos°7 et 8, 1992 ; du même auteur, voir aussi Geopolitica, Bari, Laterza, 1995.

36 En français dans le texte (ndt).

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