Lors d’un très récent colloque à l’École Militaire, M. Jean Claude Mallet reconnaissait lui-même que le passage à l’armée de métier requérait qu’on trouve un substitut au lien armée-nation, à certains égards mis en cause par la disparition de la conscription. Lien mythique, disent certains, en rappelant que le service militaire au sens strict n’a guère chez nous plus d’un siècle ! Mythe citoyen, peut-on leur rétorquer, qui à travers la Révolution, la nation en armes, Jaurès, les grandes guerres, a cimenté l’identité nationale et façonné une certaine idée de la France républicaine qu’on peut appréhender de voir aujourd’hui abandonnée.
Le service militaire a d’ailleurs été un puissant facteur d’intégration sous la IIIe République et, après une pause où le problème ne se posait plus dans les mêmes termes, était susceptible de le redevenir à l’heure des fractures internes. À ce titre, on peut se demander si, sur le plan subjectif de la complicité du pays et de son armée, comme sur le plan objectif, de la sécurité des citoyens et notamment du terrorisme, la mutation vers une armée professionnelle ne constitue pas un très sérieux manque à gagner.