Chapitre 1 – Le renouveau de l’édifice doctrinal

Après la guerre du Vietnam, le nom de Clausewitz va véritablement émerger au sein de la communauté militaire américaine. Ce n’est pas un hasard. En effet, après le conflit vietnamien, les forces américaines vont d’abord connaître une période de perte de confiance. Perte de confiance qui se manifesta par un mauvais moral mais aussi par une diminution de la visibilité de l’institution au sein de la société américaine. Les budgets vont également refluer. Mais dès 1976, des officiers vont tenter de prendre les choses en main. On assiste alors à un mouvement de réforme doctrinal qui prend son point de départ au sein de l’U.S. Army. C’est dans ce contexte que plusieurs théoriciens classiques de la stratégie vont être redécouverts. Clausewitz occupe une place de choix parmi ces derniers. Parallèlement, la pensée du Prussien est remise au premier plan par quelques historiens militaires. La convergence de ces événements va permettre à Clausewitz de gagner une réelle notoriété outre-Atlantique.

Mais avant d’étudier la diffusion des idées de Clausewitz, il convient de s’interroger sur le mouvement de réforme doctrinal américain. Celui-ci constitue un contexte nécessaire à notre analyse.

Section 1 – Le FM 100-5 de 1976

L’échec de la politique étrangère et de la stratégie américaine en Asie du Sud-Est va avoir un certain nombre de conséquences dans l’évolution doctrinale des forces armées de ce pays. Cette évolution est d’abord le fruit d’une critique portant sur de multiples dimensions relatives aux problèmes de sécurité. D’emblée, on peut citer quelques-uns des points mis en relief par la réflexion stratégique. Tout d’abord, la guerre du Vietnam a été marquée par l’imprécision, et l’ambiguïté, dans le choix des objectifs. Cette imprécision est elle-même liée à une difficulté de comprendre la nature – éminemment politique – des guerres limitées. Plus techniquement, l’approche managériale, principalement symbolisée par l’équipe MacNamara, est accusée d’avoir causé des « surcharges » en portant trop d’attention aux détails du – ou plutôt, dans le – conflit. En fait, l’entièreté de l’utilisation de la composante conventionnelle de la flexible response est mise en cause. Les militaires accuseront les intellectuels de la défense de cet état de fait.[1] A un échelon moins élevé, les fréquentes rotations, sur base individuelle et non pas par unité, sont aussi blâmées. Cette technique empêcha la création d’une cohésion interne suffisante au sein des groupes primaires.[2]

A la lueur de l’échec vietnamien, une forte crise de confiance va entamer le moral des forces armées. Cette crise est inévitablement renforcée par les restrictions budgétaires qui émanent du Congrès – à lire également dans le contexte de la détente. Ce contexte entraîne la transformation de l’armée de conscription qui devient professionnelle, et donc plus réduite en effectifs. Or, ce passage ne s’exécute pas sans problèmes dans une institution déjà gangrenée par des problèmes raciaux, l’abus de stupéfiants et le manque de discipline.[3] En politique étrangère, le syndrome vietnamien se traduira aussi par la naissance d’un sentiment néo-isolationniste. Toutefois, les Etats-Unis veillent à conserver un engagement ferme vis-à-vis de l’O.T.A.N.

La guerre israélo-arabe de 1973 et l’invasion soviétique de l’Afghanistan en 1979, seront deux coups de semonce. Ils sortiront le pouvoir politique et les officiers de leur léthargie. De ces événements naîtra le TRADOC – Training and Doctrine Command – et l’édition du manuel FM 100-5, Operations en 1976 sous l’égide du général DePuy.[4] On assiste alors à un mouvement de réforme doctrinal « salvateur ». On peut aussi avoir une deuxième lecture, plus fonctionnelle, de l’action du général DePuy ; à l’arrière plan des considérations purement doctrinales, DePuy désirait aussi donner à l’armée un instrument doctrinal pour faire valoir des demandes financières auprès du Congrès.

Les jalons contextuels qui ont permis l’apparition du nouveau manuel ayant été posés, il convient maintenant de se demander en quoi le renouveau doctrinal méritait tant de considérations. En fait, le point focal du développement du FM 100-5 relève principalement d’une question : comment vaincre une invasion du Pacte de Varsovie en Europe avec des moyens matériels numériquement inférieurs. Par rapport à cette question, une première constatation s’impose. La pensée du général DePuy est toute orientée vers la probabilité d’une attaque de type blindée – mécanisée en Europe. Il se montre par contre très sceptique quant à l’apport des expériences vietnamienne et coréenne. Un seconde constatation en découle, il s’agit de la prééminence de l’Allemagne lorsque l’Europe est évoquée. L’Allemagne est perçue comme la pièce maîtresse du dispositif O.T.A.N. D’après ce raisonnement, on comprend mieux l’intérêt porté par DePuy à l’homologue germanique du TRADOC et les multiples contacts entre les deux organismes. On constatera aussi des similitudes entre le manuel HDv 100/100, Command and Control allemand et le F.M. 100-5 de 1976. Les manuels allemand et américain font montre d’une grande cohérence d’approche ; tous deux postulent une défense de l’avant en Allemagne. Cette forme de défense était par ailleurs la seule admise politiquement dans ce pays.[5]

Détaillons ensuite le contenu du nouveau manuel opérationnel. Premièrement, le manuel dénote une approche « prescriptive » et « mathématique » du combat – des ratios de force y sont inclus. Deuxièmement, le manuel place en premier plan le rôle des forces blindées et mécanisées, comme on l’a déjà indiqué. Le TRADOC analysa donc statistiquement pas moins de 1.000 batailles de chars en vue de confirmer l’hypothèse qu’il était possible de gagner une bataille avec moins de moyens que l’ennemi.[6] Troisièmement, le manuel met l’accent sur la défense active. La défense active vise à la stabilisation du front aussi près que possible de la frontière, en vue de protéger le territoire O.T.A.N. La stabilisation devait permettre de gagner du temps en attendant l’arrivée de renforts. Les troupes en renfort devaient ensuite pratiquer des rocades – donc insistance sur la mobilité – à l’arrière de la ligne principale de défense partout où le front est menacé de pénétration. Ces rocades auraient permis de renforcer les unités sur place et leur donner la possibilité de passer à la contre-offensive. Quatrième constatation, la doctrine forme un édifice théorique à même d’intégrer les armes modernes – missiles sol-sol, hélicoptères, etc. – dans un ensemble cohérent. Cinquième remarque, le manuel de 1976 va permettre l’éclosion de divers autres documents pratiques sur le combat dit how to fight. Le FM 100-5 devient la clef de voûte de l’édifice doctrinal.

Contrairement à ce que l’on aurait pu imaginer, ce manuel n’a pas fait l’unanimité, loin de là. Il est vrai qu’il a, indirectement, assuré une fonction stratégique, voire même de politique étrangère, qui ne lui était pas dévolue. Il a clairement débordé son rôle opérationnel. La forme que devait prendre la défense de l’O.T.A.N. aurait dû impliquer un nombre beaucoup plus important de décideurs. Le manque de consultation au niveau politique est donc évocable. Sur ce point, la personnalité du général DePuy peut être mise en cause. Il était décrit comme une personne autoritaire et peu encline au consensus. Néanmoins, dans la situation de quasi-déliquescence de l’U.S. Army, l’action « forte » de cet officier était probablement un moindre mal pour certains.

Mais la critique a aussi porté son attention au niveau purement opérationnel. Le système de rocade que l’on retrouve dans la défense de l’avant nécessite de disposer de réserves importantes. Or le manque de réserves américaines sur le théâtre européen hypothéquait la mise en oeuvre de ces opérations.[7] On reprocha également au manuel d’être trop exclusivement axé sur des perspectives tactico-techniques et non réellement opérationnelles. Le FM 100-5 confie une responsabilité excessive à la puissance de feu et à la défense statique. Le rôle de la manœuvre passe au second plan. Les rocades sont surtout des déplacements et non des vraies manœuvres selon le sens traditionnel que l’on donne à ce mot. Elles n’impliquent pas directement la pratique d’enveloppement, ni l’attaque de points faibles. Quant à la notion d’offensive, elle n’est pas assez mise en évidence. Une critique supplémentaire jugera que le manuel est de peu d’utilité pour le combat en dehors de la zone O.T.A.N. Cela constitue bien une faiblesse pour une nation comme les Etats-Unis. Et pour terminer, il est reproché au manuel de ne pas incorporer ce que d’aucuns considèrent comme les fondements des opérations : les principes de la guerre.[8]

Entre-temps, la pensée stratégique soviétique a subi des mutations importantes. La doctrine militaire de l’U.R.S.S. a été longtemps reconnue au travers de l’ouvrage Stratégie militaire du maréchal Sokolovsky. Cette doctrine ne reconnaissait pas officiellement la rupture introduite par l’avènement des armes nucléaires ; elle souscrivait à une rapide montée aux extrêmes en cas de conflit entre l’Est et l’Ouest. A la fin des années 70, cette doctrine est supplantée par celle, dite d’Orgakhov, du nom du chef d’état-major de 1977 à 1984, qui prend en compte la rupture stratégique introduite par l’apparition de l’arme nucléaire et tente de réintroduire la possibilité de guerres conventionnelles.[9] Dans la foulée de cette nouvelle doctrine, le concept des groupes de manœuvre opérationnels voit le jour. Les groupes de manœuvre opérationnels doivent mener des opérations rapides d’infiltration en profondeur dans le dispositif O.T.A.N. grâce à l’emploi massif de moyens blindés, mécanisés et aérotransportables. Les troupes qui ont percé doivent ensuite passer à l’encerclement et la destruction des unités O.T.A.N. sur leur chemin. On compare rapidement cette pensée à la Blitzkrieg. Un des enjeux est la neutralisation des armes nucléaires tactiques sur le territoire des nations de l’O.T.A.N. et la possibilité de placer les alliés devant un « fait accompli ».[10]

Quelques analystes civils américains vont initier un débat relatif à l’adéquation entre la doctrine de l’U.S. Army, et plus largement des forces O.T.A.N., et l’apparition du concept de groupes de manœuvre opérationnels. Leurs travaux procèdent globalement d’une question : comment réagir face à une attaque potentielle du Pacte de Varsovie en Europe ? Parmi ces analystes civils, on retrouvera Edward N. Luttwak, John J. Mearsheimer, Richard K. Betts, Samuel P. Huntington, etc. La revue International Security servira largement de chambre d’écho à leurs réflexions.

Reprenons pour commencer les idées de Edward N. Luttwak. Pour Luttwak, le Pacte de Varsovie dispose de la supériorité numérique en Europe, alors que les Etats-Unis et leurs alliés ont l’ascendant en matière de technologie. Par conséquent, l’O.T.A.N. devrait dépasser le paradigme de la guerre d’attrition et donner plus de poids à ses armes modernes en vue de pratiquer ce qu’il nomme la manœuvre relationnelle – relational-maneuver. La manœuvre relationnelle est définie comme la recherche des faiblesses de l’ennemi et leur exploitation par le mouvement des unités sur le champ de bataille en vue d’appliquer la juste quantité de puissance de feu là où elle est indispensable. De plus, la manœuvre relationnelle doit autant jouer dans la sphère physique que psychologique. A l’opposé, le modèle d’attrition est basé sur des quasi-règles de proportionnalités numériques, induisant un rapport direct entre l’effort et le résultat. La manœuvre relationnelle consiste en fait à employer la technologie et le mouvement comme levier compensateur de la faiblesse numérique de l’O.T.A.N.[11]

Samuel P. Huntington se montrera favorable aux idées de Edward Luttwak et de l’école manœuvrière, car un renforcement de la composante conventionnelle de l’O.T.A.N. s’avère un élément indispensable au renforcement parallèle de la doctrine des représailles graduées – flexible-response.[12]

John J. Mearsheimer, lui, est opposé au choix d’une stratégie manœuvrière. Il en admet la teneur au niveau tactique, mais pas au niveau opérationnel. Cette approche serait trop risquée sur un terrain comme celui de l’Europe Centrale. De plus, l’amalgame des unités O.T.A.N. complique encore les choses car toutes ne sont pas préparées à ce type d’opérations. La position de l’Allemagne est aussi évoquée. Choisir un modèle manœuvrier implique de disposer d’espace qui ne pourrait se trouver que sur le sol de la R.F.A. Cela entraînerait inévitablement des dommages civils, industriels, etc. Il est peut probable que l’Allemagne accepte une telle défense.[13] Par ailleurs, John J. Mearsheimer relativise la possibilité pour les Soviétiques de mener une offensive suffisamment efficace sur le modèle de la Blitzkrieg. Il base son analyse sur des comparaisons numériques et conclut que tout au plus, le Pacte de Varsovie pourrait obtenir une victoire limitée, comme une portion du territoire de l’Allemagne de l’Ouest, option qu’il juge très peu attractive.[14] Quoi qu’il en soit, il semble que c’est bien l’école manœuvrière qui l’ait remporté à en juger par l’édition de 1982 du FM 100-5. Malgré tout, selon Richard K. Betts, il convient de prendre un certain recul par rapport aux arguments manœuvriers du mouvement de réforme militaire. La question n’est pas tant de choisir soit la manœuvre, soit l’attrition – la puissance de feu reste un élément fondamental pour lui. C’est un équilibre entre les termes qui doit être trouvé.[15]

Section 2 – Le FM 100-5 de 1982

Notons rapidement qu’en 1979 survient la Révolution iranienne qui joua un rôle important dans le changement de l’administration Carter par celle de Reagan. Cette dernière était plus prompte à consacrer les deniers de l’Etat à la remilitarisation.[16] L’échec de l’opération Eagle Claw, qui consistait à récupérer les otages américains en Iran, semble avoir focalisé le changement de la part de l’électorat américain. De même, cette période correspond à l’invasion soviétique en Afghanistan. On assiste à ce que d’aucuns appelleront un nouveau nationalisme américain.[17] Comme le fait remarquer Stanley Hoffmann, [e]n fait, tout au long des années 1978 et 1979, les rapports entre les deux grands se sont détériorés, et dans les milieux américains qui s’intéressent aux affaires du monde, une vaste contre-offensive s’est développée contre l’optimisme de Carter, contre son intention originelle de reléguer au second plan les rapports avec l’URSS et contre la politique de détente commencée par Nixon et Kissinger […].[18] L’effet se fait ressentir sur l’ensemble des moyens dont dispose le Pentagone : les forces nucléaires tactiques, les forces de déploiement rapide, et les forces conventionnelles. De plus, l’administration Reagan initie le programme Star Wars.[19]

Parallèlement, au sein de l’armée de terre américaine, les insuffisances du FM 100-5 conduisent à une procédure de révision à partir de nouvelles conceptions qui germaient déjà dans l’esprit de certains en 1978. Il s’agit de considérer l’option d’opération menée dans la profondeur du dispositif ennemi – à l’aide de moyens technologiques et de vecteurs à longue portée. Le but est de n’opposer qu’une résistance suffisante à contenir l’adversaire sur le front, et de concentrer ses ressources sur les échelons suivants.[20] Un des premiers pas officiel de la rénovation du document est posé par la publication du document Battlefield Development Plan par le TRADOC en 1978. Le texte, qui avait vu naissance sous l’impulsion du général Donn A. Starry, maintenant à la tête du TRADOC, demandait aux soldats de ne plus penser en termes de branches d’organisations mais selon des fonctions et concepts nouveaux.[21] Approximativement au même moment, l’étude Division 86 était lancée. Cette étude était largement mise en relation avec le Battlefield Development Plan, et incluait les opérations menées par des divisions légères, des corps d’armée et des échelons au-dessus des corps d’armée. Ce projet devait stimuler la réflexion doctrinale de l’armée. Plus tard il mua en Army 86 Study, après demande du général Meyer, chef de l’état-major de l’U.S. Army. Enfin, le général Meyer lança officiellement, en 1980, la révision du FM 100-5.[22]

La tâche de révision incombait au TRADOC, en collaboration avec le Combined Arms Center de Fort Leavenworth, ce dernier dirigé par le lieutenant général Williaw R. Richardson.[23] En 1981, Don A. Starry baptise le projet. Celui-ci prend le nom de AirLand Battle. Ce terme indique non seulement la relation avec les forces aériennes, mais met aussi l’accent sur toute combinaison d’éléments terrestres et aériens dans le cadre d’opérations utilisant avant tout le feu et la manœuvre. L’option retenue est celle d’attaques de l’ennemi dans la profondeur de son dispositif et l’exploitation des moyens technologiques pour y parvenir.[24] La tâche de réécriture du FM 100-5 était principalement confiée à trois officiers : le lieutenant-colonel Huba Wass de Czege, le lieutenant-colonel L.D. Holder et le lieutenant-colonel Richmond B. Henriques.[25]

L’armée de terre américaine se dirigeait vers des conceptions nettement plus opérationnelles et surtout vers l’extension du champ de bataille et l’utilisation de « fenêtres de vulnérabilité » permettant des actions malgré la supériorité numérique adverse. Dans la même lignée, l’intervention soviétique en Afghanistan servit de point focal à une nouvelle réflexion sur les conflits en dehors de la zone O.T.A.N. La 9th Division fut établie comme modèle de développement d’équipements légers facilement déplaçables à travers le monde.[26] Tirant leçon de la rédaction du manuel de 1976, les auteurs de la nouvelle doctrine cherchèrent à s’assurer un consensus autour de leurs idées avant de les diffuser, non seulement dans les cercles militaires mais aussi au sein du gouvernement et du Congrès.[27] Ainsi, il sera demandé à Edward N. Luttwak et Bill Lind de donner leur opinion sur le brouillon du manuel. Le manuel sera officiellement présenté au vice-président George Bush et aux membres du caucus du mouvement des réformateurs militaires du Congrès Newt Gingrich de Géorgie et G. William Whitehurst de Virginie.

Dans le manuel, les ratios de forces étaient abandonnés, les forces morales davantage mises en évidence de même que l’art opérationnel. De plus, le concept de victoire sur le champ de bataille était réaffirmé. L’aspect managérial découlant de l’influence de MacNamara passa au second plan. Comme pour l’édition de 1976, de nombreux contacts eurent lieu entre les écrivains du FM 100-5 et l’armée allemande de manière à assurer la compatibilité avec le HDv 100/100.[28] Le FM 100-5 était aussi influencé par un manuel écrit en 1941 par George C. Marshall, impressionnant de par sa clarté.[29] Fluidité, innovation, pensée indépendante, flexibilité, adaptabilité servirent largement de maîtres mots à la doctrine mettant en évidence la force de « l’homme Occidental ».[30]

Section 3 – Le FM 100-5 de 1986

Une nouvelle édition du manuel FM 100-5 eut encore lieu en 1986. Elle donnait plus d’importance au concept de conflit de basse intensité et aux forces légères.[31] Comme pour la version précédente, le manuel était rédigé comme un cadre de pensée, et non pas comme un livre de recettes.[32] Globalement, les changements de la nouvelle édition n’étaient pas très importants. L’édition de 1986 est dans la droite ligne de celle de 1982.

Un point particulier mérite attention dans cette édition, car plus encore que dans sa version de 1982, les rédacteurs du manuel ont véritablement « pillé » les classiques de la stratégie. Sun Zi, Jomini et Clausewitz sont les principaux noms repris mais l’ombre de Liddell Hart plane aussi sur le guide. Sun Zi colore la doctrine avec les notions de surprise, de manœuvre et de combats menés en position numériquement inférieure. Liddell Hart est présent au travers de Sun Zi et de son analogie de l’offensive et de la rivière en crue. Clausewitz apporte les idées de friction, de point culminant, de centre de gravité et de volonté – will. Ensuite, le concept de points décisifs inspiré par Jomini est repris et combiné au centre de gravité clausewitzien. La notion d’Auftragstaktik (voir infra) – bien qu’elle n’apparaisse pas formellement – reste aussi dans l’ombre du document.[33]

Section 4 – Le FM 100-5 de 1993

Le manuel de 1993 se caractérisait, par rapport à ces prédécesseurs, par l’introduction du concept O.O.T.W. – Operations Other Than War ou opérations autres que la guerre – la reconnaissance de la multipolarité du monde, et l’insistance sur la projection des forces.[34] On y retrouve également beaucoup plus de références à l’apparition des techniques modernes de communication, contrôle, renseignement, ordinateurs, etc. Et lorsque l’on évoque la pleine dimension du combat, il s’agit maintenant non seulement des trois dimensions classiques mais également de la dimension non matérielle, qui deviendra le cyberspace. Parallèlement, l’impact de la pensée des futurologues Alvin et Heidi Toffler se fait nettement ressentir dans le discours stratégique américain à partir de ce moment.[35]

Alvin et Heidi Toffler se sont fait connaître au travers de plusieurs ouvrages de vulgarisation tentant de cerner l’évolution du monde. Pour les deux auteurs, le monde a subi à une révolution agricole, ensuite une révolution industrielle et vit actuellement la troisième vague, forme de nouvelle révolution qui prend appui sur les développements des ordinateurs et des moyens de communication.[36] Ces évolutions techniques devraient amener des changements importants au niveau social, entre autres dans la répartition et la structuration du pouvoir, probablement moins formellement hiérarchisé et plus centré sur la spécialisation et l’habilité.[37] Le travail des Toffler est qualifié de matérialiste et évolutionniste. Ils sont également les auteurs d’un ouvrage sur l’avenir de la guerre. Traduit en français sous le titre Guerre et contre-guerre, ce livre reprend le schéma de la troisième vague ; les auteurs mettent en relation chaque grande révolution – agricole, industrielle, moderne – avec un type de guerre. Comme futurologues, ils prédisent qu’un style nouveau de conflits émerge, conflits liés à l’évolution technique de notre monde. Les guerres futures seront, selon eux, caractérisées par une application plus « chirurgicale » de la force, et surtout une diminution des massacres militaires, qu’ils jugent rédhibitoires à l’ère industrielle. Une grande partie de l’ouvrage est également consacré aux armes non létales. D’après les Toffler, l’ouvrage a démarré suite à une rencontre avec le général Don Morelli, un des membres du TRADOC. Il semblerait que la rédaction de l’ouvragelivre soit le fruit d’une « demande » du chef d’état-major de l’armée de terre, le général Gordon R. Sullivan et du commandant de l’époque du TRADOC, le général Frederick M. Franks. [38]

Section 5 – Le FM 3-0 de 2001

Une nouvelle édition du FM 100-5 vient de voir le jour en juin 2001. La publication était initialement prévue pour l’année 1998. Elle est maintenant baptisée FM 3-0, Operations.[39] Une pré-version (draft) du document avait été postée sur l’Internet à partir du 4 avril 1997.[40] Le document avait été placé sur la toile afin de recevoir toutes les critiques possibles, soit par courrier, fax ou e-mail.

Ce document contenait un certain nombre de références à Clausewitz et à d’autres penseurs classiques : Ardant du Picq pour la notion d’esprit de corps, Raymond Aron pour la polarisation des adversaires en vue de faire valoir leur intérêt national, Clausewitz pour sa définition de la guerre et le principe d’économie des forces, Jomini et l’importance du moral, Sun Zi et la connaissance de soi-même et de l’adversaire, J.F.C. Fuller et les principes de la guerre (onze prévus : Offensive, Maneuver, Massed Effects, Economy of Force, Simplicity, Surprise, Unity of Effort, Exploitation, Security, Morale), etc. Globalement, le manuel en construction reflétait une importance accrue accordée au rôle de l’information, aux armes non létales, aux menaces asymétriques et aux opérations dites opérations autres que la guerre – O.O.T.W.

Finalement, cette dernière version reprend les concepts de centre de gravité, principes de la guerre et points décisifs. L’impact de la pensée classique se ressent encore dans le manuel. Parallèlement à la révision du FM 100-5, son pendant des opérations autres que la guerre, le FM 100-20, devait également être réévalué. Ce dernier manuel existe depuis 1981. A cette époque, son titre était conflit de basse intensité – Low Intensity Conflict. Une discussion sur la division des tâches des deux manuels était en cours.[41]

Section 6- La doctrine des autres armes

Dans la foulée des développements doctrinaux de l’U.S. Army, l’U.S. Navy et l’U.S. Air Force vont aussi attacher plus d’importance à leur doctrine. Notons également que depuis la fin de la guerre froide, la doctrine interarmées – joint – a tendance à se formaliser. Ce trait se manifeste de plus en plus au travers de l’édition de différents manuels et de publications dans diverses revues, non des moindres, le Joint Forces Quarterly. Le rôle de la National Defense University joue aussi un rôle non négligeable dans cette évolution.

a. La doctrine de l’U.S. Navy

Longtemps, l’U.S. Navy n’a pas réellement eu de doctrine. En lieu et place de celle-ci, la Navy faisait usage de plans d’urgence – contingency plans.[42] Mais à partir des années 70, la stagnation doctrinale prend fin. Assez logiquement pour cette époque, l’U.S. Navy élabore une doctrine centrée sur un conflit potentiel contre l’Union soviétique.

Cette période correspond en effet au développement de la puissance navale de l’U.R.S.S. L’amiral Gortchkov symbolise alors l’amélioration de la marine soviétique. Les forces amphibies soviétiques gagnent en stature. Traditionnellement considérée comme une puissance continentale, l’U.R.S.S. défie véritablement l’O.T.A.N. Sa stratégie vise en premier lieu le tiers monde et s’accorde à la doctrine Brejnev. Le défi soviétique prendra fin vers 1985.[43]

Quoi qu’il en soit, la doctrine de la marine américaine sera avant tout le résultat de réflexions découlant de la pensée de Alfred Thayer Mahan et de Julian Corbett. Elle met l’accent sur la capacité à vaincre l’ennemi et non sur la dissuasion ; le rôle de l’offensive y occupe une place prépondérante. Il s’agit d’un trait particulier de longue date de la Navy.[44]

Pendant les années 80, la stratégie de l’U.S. Navy est à replacer dans le contexte de l’escalade horizontale. Le but est, en passant à l’offensive, d’obliger les forces soviétiques à combattre là où l’attaquant le décidera et d’étendre le conflit géographiquement, mais pas en intensité.[45] A l’époque est créé un organe de développement de la doctrine : le Center for Naval Studies, qui sera rebaptisé Naval Doctrine Command en 1993. L’U.S. Navy se retrouva avec une doctrine du nom de Forward Maritime Strategy – stratégie maritime de l’avant – aussi appelée The Maritime Component of National Military Strategy – la composante navale de la stratégie nationale.[46] Le principal manuel opérationnel de l’US Navy est intitulé NDP (Naval Doctrine Publication) 1, Naval Warfare. La dernière édition date de mars 1994.[47] Ce manuel contient des concepts hérités de la pensée stratégique classique comme les principes de la guerre ou la notion de centre de gravité. Le nom de Sun Zi figure également dans le texte à propos du rôle de la manœuvre dans le combat. On notera que NDP 1 est complété d’une bibliographie recommandant la lecture des ouvrages de Liddell Hart, Corbett, Mahan, Sun Zi et Clausewitz.

b. La doctrine de l’U.S. Air Force

Pendant longtemps, la doctrine de l’U.S. Air Force a été embryonnaire. Rappelons que cette arme n’acquit son indépendance qu’en 1947 – auparavant, elle était intégrée au sein de l’U.S. Army. Cette indépendance est ressentie comme précaire car l’U.S. Navy, le Corps des Marines, et dans une moindre mesure l’U.S. Army, disposent tous de leurs moyens aériens. La défense du concept d’Airpower peut être comprise comme le moyen de perdurer, de se donner une raison d’être, de la force aérienne.[48] Une très grande partie de la réflexion stratégique de cette Arme tourne donc toujours autour de ce concept.

Le principal manuel opérationnel de l’U.S. Air Force des années 80 était nommé AFM 1-1, Basic Aerospace Doctrine of the United States Air Force. Parallèlement aux révisions successives du FM 100-5 de l’U.S. Army, l’édition de 1979 de ce manuel est révisée en 1984, elle le sera aussi en 1992. Ce document contient une liste des principes de la guerre qui servent de véhicule au commandement centralisé recherché par les forces aériennes. AFM 1-1 sera critiqué à plusieurs égards. Ainsi, il n’accorde pas assez d’attention aux conflits de basse intensité et les interrelations entre offensive et défense y sont insuffisamment discutées. Bref, on lui reproche sa tonalité jominienne, trop « prescriptive ».[49] Actuellement, ce manuel a été rebaptisé AFDD 1, Air force Basic Doctrine.[50]

On peut globalement affirmer que l’évolution doctrinale de l’U.S.A.F. suit celle de l’U.S. Army. Comme l’armée de terre, l’U.S. Air Force fera grand usage des classiques de la stratégie, dont Clausewitz. Notons en particulier que le rôle du centre de gravité clausewitzien attirera beaucoup les planificateurs de l’arme aérienne.[51]

c. La doctrine du Corps des Marines

Depuis les années 90, considérons également l’important effort du Corps des Marines en vue de se doter d’une véritable doctrine. Celle-ci se révèle être largement influencée par Clausewitz mais aussi par Sun Zi et Liddell Hart. A cela s’ajoutent des considérations pionnières sur les théories de la complexité (voir infra).

Le point de départ de la rénovation doctrinale du Corps des Marines prend racine dans l’édition du manuel FMFM 1, Warfighting publié en 1989. Le manuel avait été rédigé par John Schmidt sous la direction du commandant Alfred M. Gray. Il était destiné à tous les membres du Corps des fusiliers. Actuellement, le manuel FMFM 1 a été remplacé par le manuel MCDP 1-2, Campaigning. Néanmoins, le premier document constituait une bonne introduction à la lecture de la nouvelle série de publications, dite MCDP pour Marine Corps Doctrinal Publications, qui le suivront. En effet, ces manuels partagent une forte coloration clausewitzienne revue par les concepts non linéaires. Le tout fait largement ressortir l’enseignement de l’officier prussien en matière de relation politico-militaire et de frictions. Les MCDP représentent le niveau le plus élevé dans la hiérarchie des manuels du Corps des Marines. Ils ont été développés à partir d’avril 1996, sur demande du général Paul K. van Riper, commandant du Marine Corps Development Command (M.C.D.C.).[52] Nombre de ces documents font référence à la pensée stratégique de Clausewitz et reprennent des concepts classiques comme les principes de la guerre ou le centre de gravité.

Section 7 – La Révolution dans les Affaires Militaires

Il existe depuis les années 90 une nouvelle réflexion stratégique aux Etats-Unis. Cette réflexion a pris le nom de Révolution dans les Affaires Militaires (R.M.A.) ou, en anglais, Revolution in Military Affairs. En fait, le terme est loin d’être aussi nouveau que l’on puisse penser. Le terme R.M.A est déjà cité dans les années 70 sur base des réflexions soviétiques. A cette époque, le concept impliquait que les Soviétiques se dotaient de moyens en vue de surprendre l’ennemi et, en corollaire, de raccourcir la durée des conflits. Selon cette approche, la frontière entre l’arrière et le front devait s’effacer davantage encore. Parallèlement, la structure des armées devait s’adapter à cette évolution.[53]

La R.M.A. américaine des années 90 diverge toutefois de celle des Soviétiques. Nul doute que l’assise principale de cette approche doit être recherchée dans l’utilisation toujours plus importante des technologies modernes. C’est en particulier l’émergence de nouveaux systèmes de communication-commandement-contrôle, la navigation par satellites, le traitement informatisé des informations, etc. qui donnent ses fondements à la R.M.A. Cette technologie a provoqué le développement de nouveaux concepts, dont la valeur reste discutée (et discutable). Il en est ainsi des frappes chirurgicales ou des armes dites non létales. Les tenants de la R.M.A., qui se présentent volontiers comme des « disciples » des Toffler, postulent que tout changement dans la façon dont on produit la richesse entraîne inévitablement un changement dans la façon dont on pratique la guerre. Mais au-delà de ces considérations étroitement matérielles, les penseurs américains ont tenté d’élargir le paradigme de la R.M.A. et de le transposer, principalement, aux niveaux stratégique et opérationnel. Ce mouvement entend renouveler la façon de concevoir l’utilité politique du militaire. Il vise également à retarder l’émergence de compétiteurs armés potentiels à moyen et à long terme et à donner une forme – to shape – à l’environnement mondial.[54] L’accent est posé sur l’intégration des composants militaires, économiques, diplomatiques et informationnels.[55]

C’est aussi à partir de cette base qu’a pu émerger une pensée sur les nouvelles menaces, pensée qui était elle-même développée sous le couvert de la notion de Operations Other Than War, mais aussi sur des phénomènes qui ne ressortent pas directement de la lutte entre êtres humains : famines, menaces écologiques, épidémies, catastrophes démographiques, pathologies sociales à grande échelle, etc.[56] Notons que le concept de R.M.A. englobe l’ensemble des développements doctrinaux des forces armées américaines et ne limite pas son applicabilité à une seule Arme.

Trois remarques s’imposent par rapport à la R.M.A. La première consiste à se demander si on assiste réellement à une révolution ou simplement à une évolution dans les affaires militaires. La réflexion sur la R.M.A. est touffue, elle touche à une multitude de sujets et donne l’impression que chaque auteur a une interprétation particulière de sa signification – ou de son absence de signification. A certains égards, on peut se demander si la R.M.A. ne tente pas seulement de faire du neuf avec du vieux rafistolé. Il est très difficile d’appréhender les facteurs de rupture des facteurs de continuité à ce niveau. Les menaces transnationales que le nouveau cadre de pensée évoque régulièrement ne sont pas propres à la fin de la guerre froide. Peut-être sont-elles plus visibles, mais elles préexistaient néanmoins à la chute du Mur de Berlin. Il existe en fait un débat quant à savoir si une véritable révolution dans les affaires militaires a éclo ou s’il s’agit simplement une Révolution Technique Militaire – Military Technical Revolution. Une véritable R.M.A. devrait contenir des éléments de changements radicaux et pressants dans les objectifs politiques, stratégiques et sociétaux. On peut se demander s’ils sont tous réellement présents, et en quelle mesure ils sont radicaux.[57] Ensuite, notre deuxième remarque porte sur le lien entre le contenu de la R.M.A. et son objectif. Un des objectifs avoués de la littérature gravitant autour du concept de la R.M.A. est de donner une forme au monde – to shape. Vu la grande prodigalité avec laquelle les informations sur cette révolution sont disponibles – entre autres sur l’Internet – on peut se poser la question de savoir si une des fonctions principales de ces textes n’est pas justement de former les esprits comme le ferait une quelconque propagande. Ces documents auraient, en une certaine mesure, un rôle de self-fullfiling prophecy et leur usage serait à la fois interne et externe – pour les acteurs stratégiques américains et non américains. Enfin, notre troisième remarque porte sur la situation mondiale depuis la fin de la guerre froide. La fin des blocs Est-Ouest a laissé un vide conceptuel dans la façon d’appréhender les relations internationales et stratégiques. Il est vrai que les élaborations sur base de la R.M.A. cherchent à dépasser le champ de référence de ces cinquante dernières années. Mais, de ce point de vue, on peut s’interroger sur la nécessité de faire table rase de l’édifice stratégique théorique élaboré durant cette période. La R.M.A. n’a-t-elle pas trop rejeté au profit de la nouveauté ?

Après ce « détour », il convient d’indiquer que le développement de la R.M.A. va actuellement de pair avec une importance moindre accordée à la pensée stratégique classique. La vision matérialiste des choses prend bien souvent le dessus sur le monde des idées. On verra que, malgré tout, les réflexions stratégiques les plus récentes sur Clausewitz le placent en regard des théories non linéaires, comme dans la doctrine du Corps des Marines. Mais, de manière générale, la réputation du Prussien tend à s’éclipser au profit de Sun Zi – plus facile à lire et plus aisément adaptable à la notion de cyberwarfare.

[1] Mayer L.A. & Stupak R.J., « The Evolution of Flexible Response in the Post-Vietnam Era », Air University Quarterly Review, novembre-décembre 1975, pp. 18-19.

[2] Luttwak E.N., « The Decline of American Military Leadership », Parameters, décembre 1980, pp. 82-88 (article initialement publié dans Commentary en 1980).

[3] A ce sujet, les mémoires du général Schwarzkopf constituent un bon témoignage. Schwarzkopf H.N. (written with Petre P.), It Doesn’t Take a Hero – The Autobiography, New York, Bantam Books, 1992, 530 p.

[4] Romjue J.L., « AirLand Battle: The Historical Background », Military Review, mars 1986, pp. 52-55.

[5] Herbert P.H., Deciding What Has to Be Done: General William E. DePuy and the 1976 Edition of FM 100-5, Operations, Fort Leavenworth Papers, n°16, Combat Studies Institute, Fort Leavenworth, juillet 1988, pp. 21 ; 30 ; 35 ; 62 ; 66.

[6] Starry D.A., « A Tactical Evolution – FM 100-5 », Military Review, août 1978, pp. 2-11.

[7] Romjue J.L., « AirLand Battle: The Historical Background », art. cit., pp. 52-55.

[8] Jones A., « The New FM 100-5: A view From the Ivory Tower », Military Review, février 1978, pp. 27-36 ; Swain R.M., « On Bringing Back the Principles of War », Military Review, novembre 1980, pp. 40-46.

[9] Collet A., Histoire de la stratégie militaire depuis 1945, Paris, PUF, 1994, pp. 63-64.

[10] Voir par exemple : Holden G., The Warsaw Pact – Soviet Security and Bloc Politics, New York, The United Nations University / Basil Blackwell, 1989, pp. 73-85 ; Doerfel S., « De la nécessité de relever le défi sur le plan stratégique », Revue internationale de défense, n°3, 1984, pp. 251-255 (article initialement publié dans la Military Review en mai 1982, « The Operational Art of the AirLand Battlefield ») ; Donelly C.N., « Le groupe de manœuvre opérationnel soviétique – un nouveau défi lancé à l’OTAN », Revue internationale de défense, n°9, 1982, pp. 1177-1186.

[11] Luttwak E.N., « The Operational Level of War », International Security, hiver 1980-81, pp. 61-79 ; id., « The American Style of Warfare and the Military Balance », Survival, mars-avril 1979, pp. 57-60.

[12] Huntington S.P., « Conventional Deterrence and Conventional Retaliation in Europe », International Security, hiver 1983-1984, pp. 32-56.

[13] Mearsheimer J.J., « Maneuver, Mobile Defense, and the NATO Central Front », International Security, hiver 1981-82, pp. 104-122.

[14] Id., « Why the Soviets Can’t Win Quickly in Central Europe », International Security, été 1982, pp. 3-39.

[15] Betts R.K., « Conventional Strategy – New Critics, Old Choices », International Security, printemps 1983, p. 150 ; voir aussi l’échange de lettres entre R.K. Betts et E.N. Luttwak: Luttwak E.N., « Correspondance – Attritional, Relational Maneuver, and the Military Balance », International Security, automne 1983, pp. 176-179 ; Betts R.K., « Correspondance – Thesis, Antithesis, Synthesis? Reply to Luttwak », International Security, automne 1983, pp. 180-182.

[16] Notons au passage que nous n’avons trouvé aucune référence montrant un rapport entre Ronald Reagan et Clausewitz, mais lors d’une allocution à l’Académie militaire de West Point le 28 mai 1981, il mentionna Sun Zi. Cité par : Tashjean J.E., « The Classics of Military Thought: Appreciations and Agenda », Defense Analysis, septembre 1987, p. 247.

[17] Gurfinkiel M., « Une Amérique nationaliste », dans Carrère d’Encausse H. et de Rose Fr. (présenté par), Après la détente, Paris, Hachette, 1982, pp. 506-512 (article initialement paru dans Politique Internationale, Printemps 1981).

[18] Hoffmann S., La nouvelle guerre froide, Paris, Berger-Levrault, 1983, pp. 10-11.

[19] Sur la remilitarisation américaine, voir par exemple : Posen R. & Evera S. van, « Defense Policy and the Reagan Administration », International Security, été 1983, pp. 3-45 et Lefeber W., America, Russia and the Cold War (1945-1984), (fifth edition), New York, Knopf, 1985, pp. 284-315.

[20] Romjue J.L., « AirLand Battle: The Historical Background », art. cit., p. 53.

[21] Id., « The Evolution of AirLand Battle Concept », Air University Review, novembre-décembre 1985, p. 6.

[22] Romjue J.L., « AirLand Battle: The Historical Background », art cit., p. 54.

[23] Le général Starry sera remplacé par le général Glenn K. Otis lors du processus de rédaction du nouveau manuel. Id., « The Evolution of AirLand Battle Concept », art. cit., p. 12.

[24] Starry D.A., « Extending the Battlefield », Military Review, mars 1981, pp. 31-50.

[25] Romjue J.L., art. cit., p. 54.

[26] A cet égard, voir par exemple: Morelli D.R. & Ferguson M.M., « Le conflit de faible intensité – Une perspective opérationnelle », Revue internationale de défense, n°9, 1984, pp. 1219-1220. Les deux auteurs étaient membres du TRADOC lors de la rédaction de l’article. Voir aussi, Berry F.C., « La 9e division d’infanterie motorisée – le « cobaye » de l’U.S. Army », Revue Internationale de défense, n°4, 1984, pp. 1224-1229 ; Lopez R., « La future division légère de l’U.S. Army – un élément clé de la « Rapide Deployment Force » », Revue internationale de défense, n°2, 1982, pp. 185-192.

[27] Romjue J.L., From Active Defense to AirLand Battle: The Development of Army Doctrine 1973-1982, TRADOC Historical Monograph Series, juin 1984, p. 58 et p. 66.

[28] Nous nous sommes renseignés quant à savoir si le manuel HDv 100/100 VS-NfD, Truppenführung (TF) contenait des références explicites à Clausewitz et si « un canal d’influence » pouvait être décelé à partir de là. Le manuel ne contient aucune référence directe à Clausewitz, ni à aucun autre penseur classique. De la même manière, il n’inclut pas d’exemples historiques comme les éditions du FM 100-5 d’après 1976. Il semblerait que la seule notion directement héritée de Clausewitz que l’on puisse trouver dans le manuel est celle du centre de gravité – Schwerpunkt. Ces informations proviennent de l’édition de 1987 du HDv 100/100. Notons que ce manuel doit être révisé sous peu. Source : correspondance personnelle, Herr Engelmann, Bundesministerium der Verteidigung, 15 décembre 1998 ; Adjudant-Chef Ooghe, Attaché Belge à la Défense, Bonn, 18 décembre 1998. Dans un article de la Military Review, le lieutenant colonel Gertmannn Sude, de l’armée allemande, affirmait que conceptuellement le manuel FM 100-5, tout comme son homologue allemand le HDv 100/100, est fortement lié aux idées de Clausewitz. Sude G., « Clausewitz in US and German Doctrine », Military Review, juin 1986, p. 47. John L. Romjue met en évidence que malgré tout, le manuel HDv 100/100 n’était que d’application limitée pour les contingences mondiales des U.S.A. Romjue J.L., From Active Defense to AirLand Battle: The Development of Army Doctrine 1973-1982, op. cit., pp. 59.

[29] Ibid., p. 43.

[30] Id., « The Evolution of AirLand Battle Concept », art. cit., pp. 4-15.

[31] Holder L.D., « Doctrinal Development, 1975-1985 », Military Review, pp. 50-52.

[32] Holly J.W., « The Forgotten Dimension of AirLand Battle », Military Review, août 1985, pp. 18-25.

[33] Galloway A., « FM 100-5: Who Influenced Whom? », Military Review, mars 1986, pp. 46-51 ; Romjue J.L., « AirLand Battle: The Historical Background », art. cit., pp. 52-55 ; Newell C.R., « Exploring the Operational Perspective », Parameters, Autumn 1986, pp. 19-25.

[34] TRADOC Pamphlet 525-51, Military Operations – Force XXI Operations, Chapter 3, Land Operations, Department of the Army, HQ U.S. Army Training and Doctrine Command, Fort Monroe, VA 236551-5000, août 1st 1996.

[35] Franks F.M., « Full-Dimensional Operations: A Doctrine for an Era of Change », Military Review, décembre 1993, pp. 5-10.

[36] Toffler A., La 3ème Vague, (The Third Wave, traduit de l’américain par M. Deutsch), Paris, Denoël, 1980, 623 p.

[37] Id., Les nouveaux pouvoirs, (Powershift: Knowledge, Wealth and Violence at the Edge of the 21st Century – 1990, traduit de l’anglais – Etats-Unis – par Charpentier A., avec la collaboration de Meunier D., Chatelain E., Chicheportiche J., Diacon E.), Paris, Fayard, 1991, 859 p.

[38] Id. & H., Guerre et contre-guerre, (War and Anti-War – 1993, traduit de l’américain par P.-E. Dauzat), Paris, Fayard, 1994, 431p. ; Swain R.M., « War and Anti-War (book reviews) », Military Review, février 1994, p. 77.

[39] Headquarters, Department of the Army, FM 3-0, Operations, Washington D.C., 14 juin 2001.

[40] L’U.R.L. du document était : http://www-cgsc.army.mil/cdd/f465.htm.

[41] Fastabend D., « The Categorization of Conflict », Parameters, été 1997, pp. 75-87 ; Shultz R.H. Jr., « Low-intensity conflict – Future challenges and lessons from the Reagan years », Survival, juillet-août 1989, pp. 359-373.

[42] Voir par exemple : Clayton J.D., « American and Japanese Strategies in the Pacific War », dans Paret P.(dir.), Makers of Modern Strategy from Machiavelli to the Nuclear Age, Oxford, Clarendon Press, 1986, pp. 703-731 ; Matloff M., « The American Approach to War, 1919-1945 », dans Howard M. (dir.), The Theory and Practice of War, Londres, Cassel, 1965, pp. 215-243 ; Weigley R.F., The American Way of War – A History of United States Military Strategy and Policy, Indiana, 1977, Bloomington, 584 p.

[43] Collet A., Histoire de la stratégie militaire depuis 1945, op. cit., pp. 64-69.

[44] Voir à ce propos : Heigmann R., « Reconsidering the Evolution of the US Maritime Strategy 1955-1965 », The Journal of Strategic Studies, septembre 1991, pp. 299-336.

[45] Friedman N., « US Maritime Strategy », International Defense Review, vol. 18, n°7, 1985, pp. 1071-1075.

[46] Hattendorf J.B., « The Evolution of the Maritime Strategy: 1977 to 1987 », Naval War College Review, automne 1988, pp. 7-28 ; David Ch.-Ph., « Le culte de l’offensive », dans David Ch.-Ph. (et collaborateurs), Les études Stratégiques – approches et concepts, Montréal, Méridien / FEDN / Centre Québécois de Relations Internationales, 1989, pp. 269-338.

[47] Naval Doctrine Publication (NDP) 1, Naval Warfare, 28 mars 1994, (voir le site : http://www.nwdc.navy.mil/).

[48] Voir : Mowbray J.A., « Air Force Doctrine Problems 1926-Present », Airpower Journal, hiver 1995, pp. 21-41.

[49] Fabyanic T.A., « War, Doctrine, and A.F.M. 1-1 », Air University Review, hiver 1985, pp. 14-29.

[50] AFDD 1, Air Force Basic Doctrine, Air Force Doctrine Document, septembre 1997.

[51] Possehl W.A., « To Fly and Fight at the Operational Level », Airpower Journal, hiver 1988, pp. 20-28.

[52] Bassford Ch., « Doctrinal Complexity: Nonlinearity in Marine Corps Doctrine », dans Hoffman F.G. & Horne G. (dir.), Maneuver Warfare Science, United States Marine Corps Combat Development Command, 1998 (voir site : http://www.clausewitz.com/).

[53] Lamov N.A. (Soviet Army), « Scientific-Technical Progress and the Revolution in Military Affairs », Military Review, juillet 1974, pp. 33-39.

[54] Metz S. & Kievit J., Strategy and the Revolution in Military Affairs: from Theory to Policy, juin 1995, U.S.A.W.C., S.S.I. ; Report of the Quadrennial Defense Review, (William S. Cohen, Secretary of Defense), mai 1997

[55] Chilcoat R.A., Strategic Art: The New Discipline for 21st Century Leaders, octobre 1995, U.S.A.W.C., S.S.I.

[56] Kipp J.W., The Revolution in Military Affairs and its Interpreters: Implications for National and International Security Policy, Foreign Military Studies Office, Fort Leavenworth, août 1996.

[57] Sullivan B.R., « The Future Nature of Conflict: A Critique of « The American Revolution in Military Affairs » in the Era of Jointry », Defense Analysis, août 1998, pp. 91-100. Voir aussi : Johnsen W.T., « The Report of the National Defense Panel », dans Tilford E.H. Jr. (dir.), World View: The 1998 Strategic Assessment From the Strategic Studies Institue, février 26, 1998, p. 29 ; Tritten J.J. & Donaldo L., A Doctrine Reader – The Navies of United States, Great-Britain, France, Italy and Spain, The Newport Papers, 9th, Naval War College, Newport, décembre 1995, 151p. (Luigi Donaldo est un amiral en retraite de la marine italienne).

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