Ezio Ferrante
L’attention des analystes navals des années vingt se tourne avant tout vers une appréciation globale du terrible conflit qui vient de se terminer. La guerre navale a vu l’affirmation de nouveaux moyens militaires tels que le sous-marin, l’avion, qui remettent en cause la primauté traditionnelle et indiscutée des grands bâtiments de ligne cuirassés ; les amiraux italiens en avaient été les tenants en fervents disciples de Mahan, répudiant, en leur temps, les théories de l’amiral Aube et de la Jeune Ecole.
A l’encontre de telles opinions, la guerre navale dans l’Adriatique est essentiellement devenue une guérilla navale dans laquelle les « grandes unités », qui n’étaient même pas à l’abri dans leurs bases (destruction au port des cuirassés italiens Benedetto Brin et Leonardo Da Vinci, autrichiens Wien et Viribus Unitis), avaient fini par jouer le rôle de pivot stratégique, de fleet in being, en restant dans une quasi inactivité1. La redéfinition de la doctrine d’emploi des moyens navals et la discussion du rôle futur des grandes unités de combat – surtout en fonction des nouvelles formes d’offensive sur mer apparues clairement durant le conflit – sont au cœur du débat2. Même si, finalement, la vieille idéologie basée sur la guerre d’escadre, et sur le rôle principal dévolu au bâtiment de ligne qui en découle, est difficilement admise par les officiers de marine italiens bien qu’elle ait pour objectif la conquête de la maîtrise de la mer.
Romeo Bernotti se pose en défenseur des bâtiments de ligne, approuvant leur absence dans les opérations navales en Adriatique. Il rappelle qu’« au moins ces grandes unités avaient rempli leur rôle de toujours, celui de paralyser leurs semblables chez l’ennemi, et il serait hasardeux d’affirmer que, sans cet équilibre, ces grandes unités seraient restées indemnes ». En revanche, Alberto Da Zara, dans un article au titre évocateur : « Sopra, soto ed in alto »3, n’hésite pas à affirmer que pendant la guerre, « la maîtrise de la mer, première condition pour assurer la victoire sur terre, reste à celui qui a le plus de navires et le plus de canons ».
En réalité, comme nous l’enseigne l’histoire, toute guerre présente des caractéristiques propres, lesquelles, au-delà des inévitables innovations et applications techniques, ne peuvent faire abstraction d’une série de variables géopolitiques et géostratégiques qui évoluent lentement.
Une chose a été d’affronter la marine austro-hongroise dans une zone aussi étroite que l’Adriatique, une autre serait de déployer les forces navales italiennes en Méditerranée, avec toutes les inconnues et les variables possibles en fonction des dispositions prises par les forces en présence au moment d’un éventuel conflit armé. Ainsi, les contradictions de la pensée navale italienne, c’est-à-dire la surestimation de l’importance du sous-marin et de l’avion et immédiatement après, parallèlement, la réévaluation des grands bâtiments de ligne, seront destinées à exercer une influence sur les choix successifs de la politique navale, ou plutôt aéronavale, que l’on fonde sur une puissante flotte sous-marine, et une aviation « douhetiste’’ ; cela se manifeste plus en paroles qu’en faits, plus dans la forme qu’au fond, avec le très dangereux « corollaire » de la suppression de la soi-disant aviation auxiliaire, comme nous le verrons. A partir du début des années trente, le réarmement naval est axé sur la refonte/reconstruction des grands cuirassés déjà presque obsolètes, plutôt que sous la forme de constructions (car, pendant le conflit 1915-1918, en Italie, il n’a été construit ni cuirassé ni croiseur et les quatre dreadnoughts du type Caracciolo de 35 000 tonnes n’ont jamais été lancés).
Outre la discussion sur la « stratégie des moyens », toujours incertaine, car liée fonctionnellement aux choix politiques et stratégiques de la Nation, un second aspect important du débat, après un conflit, réside dans l’importance des communications maritimes en temps de crise et en temps de guerre. Dans ce sens, en fait, les résultats du premier conflit sont connus de tout le monde : 49 millions de marchandises ont transité par le détroit de Gibraltar contre 2 millions par le canal de Suez et cela grâce à un énorme effort de la marine marchande italienne, sans parler de la participation des marines alliées à la lutte anti-sous-marine4. Une situation alarmante qui ne pourra que devenir plus dangereuse au moment de la naissance du conflit suivant.
Dans l’affaire de Corfou en 1923, au moment le plus aigu de la crise, on envisage sérieusement un conflit avec l’Angleterre ; Mussolini, qui demande au grand amiral Thaon di Revel, ministre de la Marine, combien de temps l’Italie pourrait tenir dans cette guerre, s’entend répondre laconiquement et sur un ton dramatique : quarante-huit heures5. Au lendemain de l’affaire, le problème des communications maritimes, qui ne peut pas être ainsi négligé dans l’élaboration théorique de la problématique
maritime, est remis à l’ordre du jour. En témoignent les deux monographies « Per l’Efficienza dell’Italia » du commandant Alfredo Baistrocchi et « Il Potere marittimo ei rifornimenti dell’Italia in guerra » du commandant Guido Po. Pour le premier, « la guerre du futur sera essentiellement une guerre des Nations, une guerre des machines, une guerre d’industrie, une guerre des ressources internes », en définitive « une guerre dans laquelle tous les hommes seront des combattants ». Dans un tel contexte, la fonction principale de la Marine italienne sera celle « d’assurer la protection de ceux des trafics commerciaux dont dépend la vie de la Nation », tout en luttant contre le trafic commercial ennemi, en protégeant les côtes contre les attaques de l’adversaire.
De la même manière, Guido Po pense que la guerre sera gagnée par celui des deux adversaires qui, détenant la puissance sur mer, aura la possibilité de recevoir, plus longtemps que l’autre, son approvisionnement par mer ; cette affirmation caractérise, une fois de plus, la fonction de bouclier qu’assure la Marine italienne pour la protection du commerce maritime national afin de garantir à l’Italie la sécurité de son approvisionnement par mer « nécessaire à la Nation pour subsister et à l’armée pour combattre ». A la lumière de l’importance fondamentale du ravitaillement en temps de crise, l’auteur n’hésite pas à envisager une reformulation du concept de « maîtrise de la mer » lequel, selon lui, ne peut être entendu désormais que comme « maîtrise des communications maritimes ».
Le rôle stratégique que joue la marine marchande dans la poursuite de l’effort militaire sera, en un certain sens, le mot d’ordre dominant le débat sur la stratégie navale entre les deux guerres mondiales ; ce débat s’est poursuivi avec toute une série d’interventions parmi lesquelles quelques années plus tard, celle de l’amiral Romeo Bernotti, pour qui, avant tout, dans une perspective stratégique, « se manifestent les liens étroits entre les deux marines militaire et marchande ; la première ayant pour principale mission de défendre et de protéger l’autre et aussi de s’attaquer au trafic commercial maritime ennemi ; d’où la potentialité même de la marine marchande qui est un élément important des possibilités mêmes de l’action militaire ».
L’issue traditionnelle du débat sur la stratégie des moyens et la valorisation stratégique de la marine et des trafics commerciaux représentent les deux aspects fondamentaux du débat critique des années d’entre les deux guerres ; l’importance théorique de ce débat nous conduit à privilégier le rapport entre maîtrise de la mer et maîtrise de l’air qui apparaît en Italie durant la période.
Maîtrise de la mer ou maîtrise de l’air | ||
La publication en 1921 de l’ouvrage du général Giulio Douhet, Il dominio dell’aria, avec sa conception de l’emploi exclusif, indépendant et décisif de l’avion dans une guerre future, ne pouvait susciter, chez les penseurs navals du moment, que des réactions critiques à propos des implications de l’ouvrage pour la maîtrise de la mer elle-même ; mais cela ne concernait pas la légitimité de l’aviation auxiliaire (aéronautique navale) dans les comparaisons du caractère « totalisant » de l’armée de l’air et de celui de son action finale dont Douhet était le prophète.
Malheureusement, la controverse dialectique entre Douhet et les penseurs navals s’est très souvent focalisée sur le problème technique de l’aviation auxiliaire (avec en appendice l’inévitable question des porte-avions) ; ou sur l’inconciliable contradiction entre les deux maîtrises, celle de la mer et celle de l’air, perçues comme étant parfaitement étrangères l’une à l’autre. Une lecture critique des œuvres de Douhet, depuis celles, moins notables, qui précèdent chronologiquement la Grande guerre jusqu’à celles plus connues des années vingt, montre comment la problématique de la maîtrise de la mer est un objet d’étude et de réflexion de la part de l’auteur de la maîtrise de l’air, plus que Douhet lui-même ne voulait le faire apparaître, comme s’il reflétait toute une série d’analogies, depuis les plus infimes jusqu’à celles qui présentent la plus grande consistance théorique. Examinons ces analogies d’après différents plans de détail ; avant tout, vient immédiatement à l’esprit l’outil de combat : le bâtiment de ligne. Comme ce dernier, l’avion « doit être, au plus haut point, en accord avec les exigences techniques selon quatre critères : armement, protection, vitesse, rayon d’action » ; et, ajoute Douhet lui-même, étant donné l’analogie des buts recherchés (même dans des domaines différents), il ne pouvait en être autrement ». A l’instar de la Marine militaire et de la Marine marchande, il faut « créer une aviation civile capable au besoin, de se transformer en une puissante aviation militaire ». Le principe fondamental est que « la surface se défend à partir de l’air comme les côtes se défendent à partir de la mer ». Si, en effet, « les côtes ne se défendent pas des attaques venant de la mer en disposant le long d’elles des navires et des canons, mais si la terre exerce la maîtrise de la mer en interdisant celle-ci à l’ennemi, les côtes sont hors de son atteinte » et, si « la surface terrestre représente les côtes de l’océan atmosphérique », alors « les conditions sont absolument semblables puisque la surface terrestre est à l’abri des actions ennemies non pas en installant sur toute son étendue des canons et des avions, mais en interdisant à son adversaire de voler, c’est-à-dire en exerçant la maîtrise de l’air ». Réfléchissant sur l’effet du couple armée de l’air-flotte sur la résistance de l’ennemi dans la lutte pour les productions ou les destructions, l’amiral Maltzahn, cité par Bernotti, avait écrit : Quand l’ennemi bloque nos ports, il ne fait pas tort qu’à la côte seule, mais à tout le pays. Ses navires s’arrêtent là où la mer cesse, mais le poing ganté de fer de la puissance maritime fait sentir son effet bien plus loin que la côte parce qu’il s’en prend aux bureaux des marchands, aux centres nerveux de l’industrie comme aussi aux demeures des ouvriers 6. Douhet lui-même ne fait aucune difficulté pour reconnaître les enseignements de la première guerre mondiale : Dans les deux camps on ne chercha à faire rien d’autre qu’agir contre les résistances des nations adverses. Il fut un temps où l’Entente craignit de perdre la guerre à cause de l’action des sous-marins allemands. Si cela n’eut pas lieu, ce fut essentiellement parce que les constructions des chantiers navals à la disposition de l’Entente réussirent à compenser les pertes en navires marchands dues aux sous-marins et ensuite à l’emporter sur ces pertes 7. L’unique enseignement de ce type d’analogie, selon Douhet, est que, dans le domaine maritime, on peut s’attaquer surtout aux résistances adverses d’ordre matériel tandis que, dans le domaine aérien on investit toutes les résistances, qu’elles soient matérielles ou morales ; tandis que les forces navales provoquent l’écroulement de l’adversaire après une action prolongée et d’une manière indirecte, les forces aériennes, elles, peuvent le faire directement, rapidement et d’une façon décisive ; c’est là, affirme Douhet, la différence fondamentale « entre la guerre du passé et la guerre du futur ». L’analyse des conditions dans lesquelles se développera probablement la guerre aérienne et la guerre navale du futur est particulièrement intéressante. Douhet écrit : « La guerre aérienne n’admet pas les attitudes défensives, mais seulement celles qui sont offensives » selon le principe qu’il faut « infliger à l’ennemi les plus graves dommages et cela le plus rapidement possible », à la condition de subir par la suite les attaques de l’ennemi dans une conception de la guerre dans laquelle le facteur temps finit par représenter le critère le plus important. La guerre aérienne tendra ainsi à se concrétiser dans une série d’actions offensives contre la surface pour une part, et pour l’autre, avec l’avantage qu’aura l’armée aérienne la plus forte à bénéficier d’une grande liberté de manœuvre. Cette primauté de l’offensive semble être la caractéristique de la guerre aérienne, où elle est aussi bien le fait du plus fort que du plus faible, à l’inverse de ce qu’on observe dans la guerre navale ; ces deux actions se distinguent seulement par le degré de l’offensive et, d’après le paramètre de la liberté de mouvement, cette action se montre d’exécution peu aisée. Le plus faible pouvait facilement se dérober devant l’ennemi ou se résigner à rester à l’abri dans ses bases (encore qu’avec l’apparition de l’aviation, ces bases ne soient plus aussi sûres que par le passé) et « une base qui n’est plus sûre n’est plus une base ». Douhet observe, avec une pointe de malice : « Dans la Grande Guerre, le plus faible fut toujours cherché, mais jamais trouvé » 8. Le point de vue opposé est représenté par le capitaine de frégate Giuseppe Fioravanzo : démontant de fond en comble les éléments du discours tenu par Douhet, il insiste sur l’analogie avec la thématique maritime ; comme pour la maîtrise de la mer, la maîtrise de l’air conquise par le plus fort peut toujours être contestée, au moins partiellement, du fait qu’il existe des forces aériennes ennemies appuyées par une défense active et passive locale bien organisée ; il sera donc pareillement difficile de débusquer ces forces si elles sont à l’abri dans des bases souterraines ou dans des abris naturels. Le temps passant, il pourrait arriver encore que les forces aériennes qui, à l’origine, avaient la suprématie s’affaiblissent peu à peu à la suite d’une inévitable usure ou de pertes graves, pour finalement devenir inférieures à celles de l’adversaire ; ainsi, si ce dernier s’est contenté d’attendre en connaissance de cause, la supériorité pourrait changer de camp et le parti qui était le plus faible en viendrait à la bataille : « C’est ainsi que cela se passe dans la guerre sur mer » 9. Cette affirmation a gêné Douhet au plus haut point. Il se hâte aussitôt d’observer que : Cela ne se passe pas ainsi aujourd’hui. Sur mer, il est non seulement possible, mais aussi facile de “conserver à l’abri” ses propres forces de manière qu’il soit impossible à l’ennemi non seulement de les “débusquer”, mais de leur donner une sévère leçon. Sur mer, il est absolument impossible d’agir contre tout ce qui participe à la vie et contre tous les moyens de lutte d’une force navale ennemie. Sur mer, à moins de courir de très graves risques à cent contre un, il n’est pas possible d’attaquer des zones habitées ou des centres industriels convenablement protégés… en revanche, dans la guerre aérienne, si l’on n’exclut pas aussi la possibilité de garder ses forces aériennes à l’abri, il conviendrait de faire de même pour tout ce qui permet à ces forces de vivre ainsi que pour tous leurs moyens ce qui est manifestement encore moins facile et moins pratique… Donc, les conditions dans lesquelles les deux luttes, celle pour la maîtrise de la mer et celle pour la maîtrise de l’air se déroulent sont semblables jusqu’à un certain point. Mais le différend entre Fioravanzo et Douhet est mieux perceptible dans leur évaluation réciproque de leurs conceptions de chacune de ces maîtrises, celle de la mer et celle de l’air et dans la signification que chacun donne à l’aphorisme de Douhet : « résister en surface pour faire masse dans l’air » 10. Pour Douhet, la maîtrise de l’air est « la situation dans laquelle se trouve celui qui est capable de voler face à un ennemi incapable d’en faire autant ». En d’autres termes, « avoir la maîtrise de l’air signifie se trouver en mesure d’empêcher l’ennemi de voler tout en conservant pour soi cette faculté » de façon à « briser les résistances matérielles et morales de l’adversaire, ce qui revient à dire de le vaincre indépendamment de toute autre circonstance ». Naturellement, « c’est l’empêcher de voler », ce qui ne veut pas dire « que même les mouches de l’adversaire ne pourraient pas voler » et il revient à l’analogie maritime à ce propos en disant « qu’il est possible d’affirmer qu’on a conquis la maîtrise de la mer même si l’ennemi possède encore des barques qui naviguent ». La lutte décisive est donc celle qui a lieu dans l’air, pour laquelle Douhet réaffirme : « c’est celle qu’il m’intéresse de remporter et non l’autre. Quant à l’autre (celle livrée sur terre ou sur mer), il me suffit d’y résister ». C’est pour cette raison que la guerre, dans sa complexité, doit obéir au principe « résister sur terre pour faire masse dans l’air ». En face d’une telle pétition de principe, Fioravanzo rétorque en invoquant une question préliminaire : Pour moi, officier de marine, le concept de maîtrise de l’air tel qu’il est conçu et défini par le général Douhet, non seulement ne semble pas être matière à discussion, mais apparaît comme une extrapolation évidente ou, pour mieux dire, une extension du concept de maîtrise de la mer. En raisonnant ainsi, Fioravanzo ne se rend probablement pas compte qu’il ne fait rien d’autre que faire état, au plan de la maîtrise de la mer, de considérations que Douhet avait déjà exprimées dans un texte peu connu de 191511 ; s’y attaquant à la maîtrise de la mer au plan spéculatif, il avait avancé ces concepts qu’il transposa en les paraphrasant dans sa conception de la maîtrise de l’air (pour cela il partit du concept de maîtrise absolue et de la primauté de l’offensive, jusqu’au caractère rapidement résolutoire de la guerre navale). Mais la pensée de Douhet en 1921 n’est plus celle de 1915 et Fioravanzo rappellera que cela est dû aux changements de l’histoire, que la toute récente expérience de la guerre mondiale semblera confirmer tout court (*), à savoir : que la mer est perçue « comme le facteur déterminant » de la guerre elle-même. Avec cette grille de lecture analogique, Fioravanzo pousse la critique jusqu’au cœur de l’aphorisme de Douhet : « résister en surface pour faire masse dans les airs », réinterprété au sens de « résister sur le terrain et faire masse sur mer et dans les airs ». En fait, dans les considérations du commandant Fioravanzo, si « résister sur terre » signifie « tenir fermement son poste », résister sur mer et résister sur terre ont exactement la même signification qui est « d’agir avec succès grâce à une supériorité quantitative, qualitative ou même opérationnelle » et certainement pas, remarque ironiquement Fioravanzo, « tenir fermement avec ses navires immobilisés dans les ports comme le firent les Empires centraux, parce que cela est mieux défini par la formule : « renoncer passivement à l’action ». En d’autres termes, il faut « faire masse sur mer et dans les airs » et « résister sur le terrain ». L’action sur mer assure aussi l’approvisionnement (étant donné qu’il n’existe aucun substitut aérien à la fonction économique des voies maritimes) laquelle permet à la nation de résister directement matériellement et indirectement moralement ; l’action aérienne, elle, assure directement la défense nationale matériellement et moralement ; la défense militaire sur terre s’oppose à l’occupation du territoire, condition sine qua non pour survivre et continuer à combattre… c’est pourquoi, pour l’Italie : “faire masse dans les airs” signifie aussi “faire masse sur mer” et si, en faisant cette double opération, nous réussissons à assurer l’approvisionnement par mer ainsi que l’activité en toute quiétude dans le pays, autant que la poursuite de la lutte contre l’ennemi dans ces centres de résistance, alors, nous créerons, pour nos forces armées, toutes les conditions favorables et morales pour qu’elles maintiennent leur action. C’est ce que Fioravanzo exprime d’une manière peut-être un peu lyrique, mais cependant plus réaliste qu’on ne pourrait le penser à première vue, en disant : « pour donner sur le sol ce coup de talon de l’héroïque fantassin qui témoigne d’une manière définitive que tous les objectifs sont à notre portée ». Par conséquent, loin de retenir dans son sens absolu la guerre aérienne comme décisive dans les conflits futurs, Fioravanzo, avec quelque bonne volonté, arrive à la considérer comme décisive « uniquement jusqu’à un certain point » et pense qu’une fois qu’on jouit de la « maîtrise de l’air », on peut disposer d’un reste de forces aériennes capables de provoquer la défaite finale de l’adversaire. La différence s’accentue tout particulièrement à propos de l’aspect exclusif de la guerre aérienne, indépendant de toute autre considération, selon la formulation de Douhet. Fioravanzo insiste sur le rapport d’interdépendance de la Marine et de l’Air dans la guerre du futur qui, selon lui, sera inévitablement « une guerre intégrale » dans laquelle ce qu’il appelle « la contrainte maritime » prendra une signification particulière telle que tout adversaire « l’exercera différemment suivant ses forces et selon sa situation géographique par rapport à l’ennemi ». Romeo Bernotti, à cette époque contre-amiral12, insiste aussi sur le principe de la coopération aéromaritime et retient les raisons pour lesquelles il existe des formes d’emploi de l’arme de l’air situées entre l’aviation indépendante proprement dite et l’aviation auxiliaire, là où « à l’ancien concept de guerre terrestre et maritime, on substitue les concepts de guerre aéroterrestre et de guerre aéromaritime ». Face aux théories de Douhet, à ses concepts « absolus et dogmatiques », lesquels généralisent au maximum, les penseurs navals revendiquent la conception intégrale de la guerre et la nécessaire interdépendance de la conduite de la guerre sur mer et de la conduite de la guerre sur terre et dans l’air, « afin que, par les opérations coordonnées avec les trois armes, on obtienne le résultat le plus décisif ». Ils indiquent, au nom du réalisme, les dangers que la guerre aérienne indépendante finirait par faire peser sur l’état de préparation des forces armées, sur leur compréhension et leur confiance réciproques. A cet aspect central d’une controverse qui dura une décennie, s’ajoute toute une série d’autres aspects complémentaires qui n’étaient pas moins importants sur l’action de la Marine en et hors Méditerranée ; et notamment la structure même des forces navales que Douhet, d’accord avec sa théorie, voudrait voir composées « de petites unités très rapides, de sous-marins et de poussière navale » ; ce serait une espèce de réédition des vieilles thèses des « petites marines », lesquelles, quarante années auparavant, avaient vu s’affronter, dans les rangs même de la Marine, Ferdinando Acton et Benedetto Brin. C’est une marine destinée à ne jouer qu’un rôle strictement défensif, alors que, de leur côté, les penseurs navals affirment avec force l’impérieuse nécessité d’exercer la maîtrise en Méditerranée pour assurer les communications maritimes en temps de crise et en temps de guerre : et aussi la non moins impérieuse nécessité de s’opposer au sea denial dans l’océan avec la perspective d’une action contre les communications maritimes de l’ennemi, avec aussi la pleine conscience que, si une vedette MAS a pu couler par un coup heureux le Szent Istvan, il est sûr qu’une marine uniquement composée de ce type de vedettes ne pourrait mener à rien de sérieux. Telles sont donc les conclusions d’un débat structuré qui, en un certain sens, finit par ressembler au « nuage » de Polonius, lequel, selon la vulgate, « ressemble à un éléphant, à un chameau et enfin pourrait bien être autre chose, sauf ce qu’il est vraiment ». Quant au bilan, les acteurs eux-mêmes se sont montrés quelque peu sceptiques à la fin. Selon Fioravanzo, « l’illustre général s’est contenté de s’en tenir toujours à des affirmations, mais n’a jamais démontré quoi que ce soit, se bornant à exiger de ses contradicteurs des démonstrations que ses affirmations refusaient ». Selon Douhet lui-même, « la longue discussion développée et pourtant abandonnée, comme cela arrive dans toute controverse où chacun reste ferme sur ses positions respectives, a au moins démontré le grand intérêt de la question que pose cette controverse : quelle forme de guerre sera celle du conflit futur ? » La guerre, une fois déclarée, n’allait pas permettre l’action indépendante de l’armée de l’air préconisée par Douhet, du fait de l’absence même d’une armée pouvant se définir comme telle – du moins en Italie -, mais contraindre l’aviation à adopter une forme de coopération active avec les forces navales et les forces terrestres (comme cela avait aussi été prévu par certains), sans que malheureusement, il existât des moyens de vol parfaitement appropriés pour de telles actions, des appareils efficaces, sans parler des déficiences des armes, de l’organisation et de l’entraînement, de la très grave absence de porte-avions et d’aéronavale, avec toutes les conséquences désastreuses qui devaient en découler13. C’est donc un bilan qui ne peut que laisser inquiet après un débat stratégique qui avait pour but, comme le dit André Glucksmann14, non seulement de « voir », mais aussi de « prévoir » la guerre du futur, avant que les « paradoxes » d’hier ne deviennent les « lieux communs » d’aujourd’hui. |
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Confrontation de deux stratégies : offensive ou défensive ?
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Les pièces maîtresses de la pensée stratégique navale durant notre période sont La guerra sul mare e la guerra integrale de Giuseppe Fioravanzo, déjà rencontré, et L’Arte della guerra in mare d’Oscar di Giamberardino15. Ces textes, par les théories qui y sont énoncées, ont été considérés comme traitant respectivement de la « défense » et de l’ »offensive ».
Fioravanzo, partant de l’idée que la stratégie doit s’occuper « de tout ce qui concerne la conception et la conduite des opérations », distingue deux principes, l’un essentiel (qui est de détruire, chez l’ennemi, la volonté de combattre), l’autre opérationnel (affronter l’ennemi dans des conditions relativement avantageuses) dans une vision globale de la guerre intégrale, distincte d’une interdépendance permanente de toutes les forces armées, parce que la guerre est une, dans sa conception et dans son exécution, et que la guerre sur mer n’en est qu’un aspect. Dans ce cadre général, l’auteur fait rentrer sa conception de la défense stratégique sur mer : si, sur terre, la protection de ses propres communications signifie avant tout empêcher l’ennemi de les attaquer, les meilleurs critères stratégiques pour atteindre un tel objectif lui semblent être ceux de la défense stratégique, de la défense qui se transforme en offensive dans une situation d’avantages relatifs tant en position qu’en force. Une défense qui s’exprime dans le traditionnel concept de « fleet in being », que Fioravanzo traduit librement par « flotte capable d’efficacité », c’est-à-dire une flotte capable de combattre quand elle le veut, ou bien quand l’occasion est favorable. Di Giamberardino a une opinion diamétralement opposée à celle de Fioravanzo dans l’ouvrage16 où il expose sa théorie de l’offensive stratégique : L’objectif de l’offensive sur mer ne peut se concevoir que si la flotte ennemie est réunie et qu’à condition d’être plus forts numériquement et en puissance, ou encore en profitant de la division de l’ennemi, alors qu’on est plus faible mais qu’en dépit de cette faiblesse, on n’en est pas moins entreprenant et audacieux. De cette façon, cela n’a plus de sens de parler de rechercher l’ennemi sur mer, de manœuvre en ligne de file conduisant à la décision, de la volonté d’affronter l’ennemi dans une lutte à outrance, parce que l’objectif est toujours le même : la destruction de la flotte adverse. Face à de telles prémisses, Fioravanzo se montre très critique, que ce soit à propos de la défense stratégique qu’il définit comme un vrai jeu de mot conceptuel et opérationnel qui, tout au plus, sert à faire durer plus longtemps la guerre, mais pas à la terminer, ou à propos de la « fleet in being » laquelle, souligne Giamberardino, non sans quelque malice, « est apparue à certains comme l’œuf de Colomb, avec effet assuré, pour mettre hors de cause une marine plus forte des forces inférieures ». Giamberardino peut, à la limite, admettre que l’on parle de défense, mais à condition de l’entendre toujours dans un sens dynamique et actif ; sans cela, à la longue, une flotte qui se considère « in being », sans entreprendre à l’occasion des opérations où elle montre sa force contre la flotte adverse, prouve ainsi qu’elle renonce à l’action et finit inévitablement par être considérée comme absolument inutile et, conséquence plus grave, l’ennemi « pourrait se comporter comme si elle n’existait pas ». La théorie de la défense de Fioravanzo et celle de l’offensive de Giamberardino ne font rien d’autre que traduire en termes abstraits ce fossé qui, pendant la Grande Guerre, avait séparé les « colombes » avec le Grand Amiral Thaon di Revel, des « faucons », incarnés par le duc des Abruzzes, avec ses projets d’opérations, et par les amiraux Cagni et Milla ; c’est la particularité de la guerre navale en Adriatique et la surprise provoquée par l’emploi généralisé des nouvelles armes dans la guerre maritime qui ont donné la palme de la victoire aux « colombes » et entraîné la défaite des « faucons ». C’est un différend qui, par la suite, sur le plan théorique, revoit le jour, au lendemain de la guerre. Au-delà des divergences de fond, il faut souligner une série d’évaluations concordantes dans les ouvrages de Fioravanzo et de Giamberardino : avant tout, la vision aéronavale de la guerre du futur (l’avion n’apparaît plus sous la forme d’un simple auxiliaire secondaire qu’on utilise éventuellement, mais comme l’une des principales armes de la guerre navale), et l’évaluation précise de l’indispensable interconnexion entre la politique et la stratégie. Ce dernier thème a toujours été négligé dans la pensée navale italienne, mais a acquis, entre la fin des années vingt et le début des années trente, une nouvelle valeur critique, à cause de la diffusion des Théories stratégiques de l’amiral Castex, commentées dans la Rivista Marittima par le capitaine de frégate Raffaele de Couten17. Comment la célèbre formule de Castex (stratégie/spectre solaire = politique/spectre infrarouge, là où le faisceau de lumière représente la zone d’interpénétration) aurait-elle pu ne pas attirer l’attention, malgré tous les « distinguos » et les expressions mesurées imposées par un régime dictatorial ? L’option théorique entre la défensive et l’offensive, dans une situation profondément conditionnée et fertile en opinions préconçues comme l’était celle de l’Italie à cette époque, ne pouvait que donner naissance à de très dangereuses équivoques. Celles-ci aboutirent, au cours du conflit, comme le reconnaît franchement un de ses protagonistes, à une conduite de la guerre sur mer stratégiquement défensive, bien qu’elle fût présentée comme offensive avec pour résultat une désorganisation « parce qu’elle laissait à l’ennemi la liberté d’action et qu’elle renonçait à lui disputer le libre usage de la mer »18. |
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Dies irae : à la veille de la guerre
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Dans cette fresque reposant sur des indices que nous présentons de manière impressionniste, il nous reste maintenant à examiner celle des deux idéologies, l’une basée sur la Rome antique et l’autre sur la Méditerranée, qui a semblé attirer la réflexion des penseurs navals italiens conformément aux directives politico-culturelles du régime. Après la victoire remportée dans la première guerre mondiale, les « intérêts » maritimes de l’Italie semblaient désormais vouloir s’étendre hors de l’espace rétréci de l’Adriatique vers le contexte bien plus étendu de la Méditerranée. La consécration de ce rapport entre la puissance sur mer de la Rome antique et le renouveau sous les auspices de la puissance de l’Italie fasciste a été confirmée par Mussolini lors de sa conférence au titre révélateur : Roma antica sul mare (la Rome antique domine les mers)19.
Par la suite, apparaissent de nombreuses études destinées à approfondir ledit rapport sur les plans historique et prospectif20 afin de réaffirmer, sans défaillance, la volonté de puissance en termes de maîtrise de la Méditerranée-Mare Nostrum par l’Italie. Une intéressante influence de cette suite d’études apparaît dans l’œuvre du directeur de la Lega navale, Edoardo Squadrilli : Politica marinara e Impero fascista, Rome, 1938, où l’idéologie traditionnelle de la puissance maritime se trouve mêlée à des thèmes dominants de la politique. La puissance maritime, chez Squadrilli, se présente comme étant « la résultante de divers facteurs militaires et économiques en œuvre dans le domaine des intérêts maritimes spécifiques et de ceux générateurs du développement du pays » ; ses « éléments » (comme pour Mahan, mais d’une façon complètement différente de celle professée en son temps par le théoricien américain), doivent être présents dans la marine militaire, dans la marine marchande, dans l’organisation de l’industrie, dans les colonies et dans la sensibilité et la participation du peuple aux intérêts maritimes de la nation. Un accent particulièrement fort est mis sur la politique coloniale au sens où « l’action coloniale d’un peuple est la résultante et la synthèse de l’importance réelle dont ce peuple jouit dans l’histoire du monde ». Les colonies, dans cette vision, outre une fonction économique, ont une importance militaire, avec la possibilité de créer des bases navales en plus des ports marchands, pour que la flotte ait un champ d’action plus étendu et puisse plus facilement défendre le trafic commercial. Au-delà des effets rhétoriques (ou même indicatifs) de Squadrilli, nous ne pouvons ignorer la contribution, plus pédagogique, de l’amiral Romeo Bernotti pour qui la puissance maritime « est le produit des facteurs de développement et de la protection des intérêts maritimes d’un état », facteurs que l’on doit chercher dans le caractère de la population, dans la compréhension des avantages que l’on retire de l’affrontement avec la mer et, avant tout, dans la situation géographique même du pays21. L’accent tend naturellement à être porté sur le thème central, celui du rôle stratégique de la marine militaire dans la guerre du futur ; les partisans de l’offensive, comme Giamberardino, ont été plus suivis que les adeptes de la défense de Fioravanzo, comme on peut le voir dans l’article, paru à la veille de la Seconde Guerre mondiale, du commandant Vittorino Moccagatta22 dont le nom est lié à la malheureuse tentative d’attaque de Malte le 26 juillet 1941 au cours de laquelle Moccagatta trouva la mort sur la vedette rapide MAS 452 ; dans cet article de la Rivista Marittima, l’auteur expose sa théorie de la guerre de coups de main sur mer, c’est-à-dire la guerre de mouvement qui permet d’arriver à une rapide décision dans un conflit et qui ne peut donc être fondée que sur l’offensive stratégique. |
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En définitive, le commandant Moccagatta a fortement souligné la nécessité de réévaluer le caractère décisif de la guerre maritime dans lequel le principe fondamental reste toujours celui de « développer sa propre puissance maritime et de détruire celle de l’adversaire ».
Malgré une adhésion majoritaire aux thèmes du moment et aux enseignements de la guerre passée (domaine des communications maritimes et exceptionnelle importance des actions pour assurer la continuité du trafic maritime en temps de guerre), de manière générale, les réflexions sur la guerre future en Méditerranée présentent un caractère trop abstrait, contrairement à l’aphorisme bien connu de Clausewitz : on ne fait jamais la guerre contre un ennemi abstrait, mais contre un ennemi réel ! Malheureusement, parmi les multiples hypothèses émises au sujet de la guerre future, élaborées à partir de la planification officielle des autorités navales (Italie et France contre Angleterre – Italie contre France – Italie et Angleterre contre France – Italie contre Angleterre et France) le choix politique s’est arrêté sur cette dernière hypothèse (laquelle comporte une circonstance aggravante, imprévue et imprévisible, qui est l’entrée en guerre des Etats-Unis aux côtés de la France et de l’Angleterre) créant ainsi une situation que Giamberradino lui-même n’hésite pas à qualifier de complètement absurde : la situation dans laquelle se trouverait la marine italienne « serait tellement catastrophique que cette éventualité ne mérite pas d’être prise en considération » 23.
C’est de cette dangereuse collusion entre la politique et la stratégie qu’est né le drame qui se jouera en Méditerranée pendant la guerre entre 1940 et 1943, bien loin des bonnes résolutions et des « rêves de gloire » qui avaient été entretenus pendant les vingt années précédentes par les analystes navals selon les idées de volonté de puissance du moment.
Traduit de l’italien par Jean Pagès
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Notes:
1 Voir mon article “La pensée navale italienne : de Lissa à la Grande Guerre”, dans L’évolution de la pensée navale III, pp. 108-111.
2 Par exemple, parmi les nombreuses contributions, R. Bernotti, Il pottere marittimo nella Grande Guerra, Livourne, Giusti, 1920 et La guerra marittima. Studio critico dell’impiego dei mezzi nella guerra navale, Florence, Carpigiani et Zipoli, 1922, ainsi que, V. de Feo, “L’avvenire delle navi di guerra” et A. Guidoni, “Navi da battaglia o velivoli ?”, tous deux dans Rivista Marittima (RM), 1/1920 et 7-8/1921 et enfin Bernotti, “Le Navi di Domani”, 7-8/1920.
3 dans RM, 11/1921.
4 Les pertes de la marine marchande italienne dans l’ensemble équivalaient à 955 881 t. avec un maximum de 417 000 t. en 1917, l’année “critique” de la guerre. Cf. mon ouvrage, La Grande Guerra in Adriatico, Rome, Ufficio storico della Marina, 1987, p. 104.
5 Voir mon article “Un rischio calcolato ? Mussolini e gli Ammiragli nella gestione della crisi di Corfù”, Storia delle Relazioni Internazionali, 5e année, 1989/2, pp. 221-245 et Il Grande Ammiraglio Paolo Thaon di Revel, supplément à la RM, n° 8/9,1989, p. 106.
6 “Dominio del mare”, RM, 7/8, 1935, p. 35.
7 “Concezioni di guerra aerea, Circa il problema generale”, Echi e Commenti, 5 janvier 1930.
8 “Riepilogando”, Rivista Aeronautica, novembre 1929.
9 “Resistere alla superficie per far massa nell’aria”, Rivista Aeronautica, juillet 1929.
10 Thèse sur laquelle Douhet insiste surtout dans les articles qui portent précisément le titre de “Resistere sulla superficie per far massa nell’aria”, parus à dessein à la même date, février 1929, l’un dans la Rivista Aeronautica et l’autre dans la RM ; dans cette dernière revue, en polémiquant directement avec le contre-amiral Giulio Valli. Valli avait exprimé son point de vue personnel sur le différend en cours dans deux écrits parus dans la RM : “Meditazioni sulla guerra aerea” et “Sulla guerra aerea”, 7-8/1928, auxquels Douhet avait ponctuellement répondu, toujours dans la RM, par l’article : “Per la guerra aerea”, 11/1929 et par celui cité de février 1929.
11 L’arte della guerra, Turin, Lattes, 1915, p. 162.
12 “Sulla guerra nell’aria”, Rivista Militare, 12/1927 ; du même auteur, rappelons aussi sa contribution “Per l’aviazione navale”, RM, 6/1929, parue sous le pseudonyme de ß.
13 Le débat sera relancé par Bernotti, Questa crisi mondiale, Livourne, Editions Tirrena, 1954, pp. 124 -sqq ; voir en outre mon article, duquel j’ai extrait le présent paragraphe, “Giulio Douhet e i pensatori navali”, dans La figura e l’opera di Giulio Douhet, Caserte, Società di Storia patria di Terra di Lavoro, 1988, pp. 245-257.
14 André Glucksmann, Le discours de la guerre, Paris, 10-18, 1967.
15 Respectivement Turin, Editions Schioppo, 1930-1931, 2 vol. et Rome, Ministero della Marina, 1937.
16 Très connu internationalement par les traductions intégrales du texte de la première (1937) et de la seconde édition (1938) : Seekriegskunst, Berlin, Offene Worte, 1938 ; L’art de la guerre sur mer, Paris, Payot, 1939 ; A arte da guerra no mar, Rio de Janeiro, Imprensa Naval, 1939 ; El Arte de la guerra en el mar, Buenos Aires, Estado Mayor, Marina Argentina, 1940 ; Dennizde Harp san’ati, Istanbul, Deniz matbaasi, 1942. Traductions partielles : dans la revue suédoise Sjöväsendet, Karlskrona, 1939 et dans la revue américaine The Marine Corps Gazette, septembre 1938, mars 1939.
17 “Teorie Strategiche francesi”, RM, 11/1929 et “La manovra strategica”, RM, 6/1931 et “I fattori esterni della strategia”, RM/1933.
18 Amiral Angelo Iachino, “La teoria della fleet in being” RM, 9/1959.
19 Conférence prononcée à l’Université pour les étrangers de Pérouse le 5 octobre 1926, Rome, 1926. Voir par exemple, “Roma nel pensiero del capo del Governo italiano”, Nuova antologia, 1298 du 21/11/26.
20 En particulier les écrits du commandant Giulio Vannutelli dans la RM (“L’Italia e il Mediterraneo”, “Il potere marittimo nel Mediterraneo” et “Verso un nuovo ciclo mediterraneo, 1870-1930” 9/1924, 1/1926 et 10/1930 et dans les monographies Il Mediterraneo. Origine e fonte risorgente della civiltà mondiale, Bologne, 1932 et Il Mediterraneo e la crisi mondiale dalle origini all’Impero Fascista della Nuova Italia, Bologne, 1936.
21 Avec une attention particulière pour les études de géopolitique navale et/ou, plus limitées, de géostratégie, comme celles de Fioravanzo (“Basi e Navi”) et de F. Garofalo (“Basi navale nel mondo”), RM, 1/1936 et 2/1937 ainsi que les évaluations de la projection de puissance des pays méditerranéens dans les contributions de L. Nonno et de G. Ducci (“Il potere marittimo della Francia” et “La Spagna e il potere marittimo”, Rivista di cultura Marinara, n° 1-2/1937 et RM, 1/1937).
22 “Il potere marittimo e la guerra di rapido corso” RM, 1/1939 ; sur le même sujet A. Cocchia, “Strategia Risolutiva”, 11/1939.
23 La politica bellica nella tragedia nazionale (1922-1945), Rome, Polin Editore, 1945, p. 29.