Philippe Forget et Gilles Polycarpe
Les réseaux envahissent notre monde, notre vie, jusqu’à notre langage. Ne parle-t-on pas désormais de « faire jouer ses réseaux », là où l’on parlait de « faire jouer ses amis » ou « ses relations » ? Le vocable ne traduit-il pas une profonde mutation anthropologique, sociale et stratégique des existences individuelles et collectives ?
Telle est l’ambition de cet ouvrage : saisir et montrer à travers sa genèse philosophique et sociale pourquoi le réseau, de nécessité subalterne est devenu la norme dominante de l’Occident ultramoderne.
Méthode de la puissance matérielle et de la sûreté générale, le réseau est fondamentalement stratégique. Il impose ses paramètres d’efficacité aux luttes informationnelles, économiques et militaires. Processus de domination instrumentale, il recouvre l’ancienne Terre et ses lieux, pendant qu’il produit à l’infini ses connexions de puissance, configurant ainsi de nouvelles conditions pratiques, sociales et culturelles de l’agir stratégique. Tactiques et opérations militaires en sont, par exemple, profondément modifiées
A la suite de L’homme machinal, les deux auteurs poursuivent, dans ce nouvel essai, leur réflexion sur l’humanité planétaire qui se profile, livrée au jeu terminal de la Matière déchaînée.
Philippe Forget est philosophe, ancien chercheur en science politique à l’Institut universitaire européen de Florence. Il est l’auteur de nombreux travaux d’anthropologie philosophique et de réflexion stratégique sur le thème des rapports de l’homme à son monde à travers la technique. Il dirige L’art du comprendre, revue d’anthropologie philosophique et d’herméneutique générale.
Gilles Polycarpe est polytechnicien, diplômé de l’École nationale supérieure des techniques avancées. Conseiller en prospective et stratégies, il a publié dans Le Nouvel Économiste, les Annales des mines, Défense nationale, Stratégique, etc. Ensemble, ils ont écrit L’homme machinal (Syros-alternatives, 1990).
Table des matières
Introduction – Réseau, sens et monde
Première Partie – Généalogie du réseau
Chapitre Premier – La réticulation, nécessité subalterne de la cité
1. Le réseau, méthode de survie
2. Patrimoine mobile et patrimoine stable
Chapitre II – Le dispositif réticulaire, mécanique fondatrice des sciences
1. De l’ontologie céleste à la physique spatiale
2. Mobilisation et connexion : la vérité comme valeur
3. Sécularisation politique et science positive
Chapitre III – Les intervalles du monde, enjeu capital de la technique
1. Empire britannique et appropriation du plan océanique
2. Esprit bourgeois et production des intervalles
3. Le réseau, méthode obnubilée du chiffre infini
Deuxième Partie – Polémologie du réseau : domination et réticulation
Chapitre Premier – L’agir réticulaire, stratégie normative de l’économie-monde
1. Loi des densités et physiologie des réseaux compétitifs
2. L’informatisation planétaire, paradigme de puissance abstractrice
3. Normes et maillages : le marché dominé
A – Structures économiques et réseaux d’innovation technologique : un équilibre métastable
B – La norme par anticipation ou le temps confisqué
Chapitre II – Machines de guerre maillées
1. Ingénierie militaire et quadrillage des forces
2. Connexion – déconnexion, les rets du virtuel
Chapitre III – Matrices réticulaires en lutte
1. La différence identitaire comme fonds productif
2. Règles de domination et processus stratégique
Conclusion – La stratégie terminale
Bibliographie
Index