Index des auteurs

  • Bernard Boëne, Professeur à l’Université de Toulouse-II et aux Écoles militaires de Saint-Cyr Coëtquidan.
  • Général François Bresson, Ancien directeur de l’Institut des Hautes Études de Défense Nationale (1992-1994).
  • André Brigot, Chercheur au Groupe de sociologie de défense, École des Hautes Études en Sciences Sociales (EHESS) à Paris.
  • Patrice Buffotot, Chercheur au Centre de Relations Internationales et de Stratégie (Paris-I).
  • François Cailleteau, Inspecteur des Finances.
  • Pierre Dabezies, Professeur émérite de l’Université de Paris-I, ancien président de la Fondation pour les Études de Défense Nationale.
  • François Gresle, Professeur à l’Université de Paris-I.
  • Jean-Paul Hébert, Chercheur au Groupe de sociologie de défense, EHESS, Paris.
  • Jean Klein, Professeur à l’Université de Paris-I, directeur du CRIS.
  • Guillaume Muesser, Docteur en science politiques
  • Capitaine de Vaisseau Michel Pène, Délégation aux Affaires Stratégiques (ministère de la Défense).
  • Paul-Ivan de Saint Germain, Ingénieur général de l’armement, directeur du CREST et de la Fondation pour les Études de Défense.
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La réforme de la politique française de défense

Pierre Dabezies et Jean Klein (Dir.)

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Après l’effondrement de l’ordre bipolaire et la disparition de la menace que les armées du Pacte de Varsovie faisaient peser sur le monde occidental, les problèmes de la sécurité en Europe et dans le monde se sont posés en d’autres termes et les politiques de défense des États ont dû s’ajuster au nouveau contexte stratégique. Le Livre blanc de 1994 marquait à cet égard une inflexion de la politique française, mais il s’agissait d’un texte de compromis et le gouvernement de cohabitation dirigé par Édouard Balladur n’avait pas tiré toutes les conséquences des changements intervenus, notamment au plan de l’organisation des forces armées et de la programmation militaire. C’est seulement après l’élection de Jacques Chirac à la présidence de la République que la France s’est prononcée nettement en faveur de l’émergence d’une « identité européenne de sécurité et de défense » dans le cadre d’une « alliance atlantique rénovée » et a rompu avec la tradition républicaine du « citoyen-soldat » en optant pour la professionnalisation des armées.

Le colloque organisé en mars 1997 par le Centre de Relations Internationales et de Stratégie (CRIS) de l’Université de Paris-I (Sorbonne) se propose d’éclairer la signification de la réforme de la politique française de défense en examinant tour à tour la modification de l’environnement international, la mutation de l’institution militaire et l’avenir de l’industrie européenne d’armement. Des universitaires, des officiers supérieurs et généraux ainsi que des ingénieurs de l’armement ont apporté leur contribution à ce débat et un compte rendu détaillé des travaux permet à la fois de prendre la mesure des enjeux de la réforme en cours et de mettre en évidence la diversité des opinions émises sur ces sujets. Il est complété par deux communications consacrées respectivement aux armées de métier contemporaines (Bernard Boëne) et à l’industrie française d’armement (Jean-Paul Hébert).

Table des matières

Index des auteurs
Index des sigles utilisés

INTRODUCTION par Pierre Dabezies et Jean Klein

Première table ronde – La mutation stratégique et ses conséquences sous la présidence de Jean Klein

La nouvelle politique de sécurité des États-Unis et les relations transatlantiques par Michel Pène
Les élargissements en Europe et la réforme de la défense en France par André Brigot
Débat

Deuxième table ronde – La mutation de l’institution
militaire sous la présidence de François Gresle

Exposé introductif de Pierre Dabezies 39
La conscription en France : mythes et réalités par Patrice Buffotot
Vers l’armée de métier ? par Bernard Boëne
La transformation des rapports entre l’armée et la nation par François Cailleteau
Débat

Troisième table ronde – La mutation de l’industrie
d’armement sous la présidence du général François Bresson

Exposé introductif de Paul-Ivan de Saint Germain
La réforme de la politique de défense et l’industrie française d’armement par Jean-Paul Hébert
L’adaptation de l’industrie d’armement à l’environnement international par Guillaume Muesser
Débat

CONCLUSIONS DU COLLOQUE par Jean Klein

Études

Armées de métier contemporaines par Bernard Boëne

La réforme de la politique de défense et l’industrie française d’armement par Jean-Paul Hébert

Annexe 1 – Crédits d’équipement : écart entre prévisions de programmation et ouverture en LFI

Annexe 2 – Sigles des sociétés liées à la défense

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La fin de l’armée romaine

Philippe Richardot

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Table des matières

Chronologie

Introduction

Chapitre I : la fonction militaire de l’empereur à la fin de l’empire romain

La pourpre impériale sommet de la carrière militaire

L’empereur et l’emblème de l’armée

Un guerrier accompli

Apprendre la science militaire

L’exercice du commandement

Au ve siècle, l’empereur dépossédé de sa fonction militaire

Chapitre II – La chaîne de commandement

Protectores domestici : un corps de cadets ?

L’état-major impérial

Les officiers généraux

Officiers, sous-officiers et hommes du rang

Chapitre III – Une crise du recrutement

Démilitarisation des Romains

Un recrutement héréditaire, fiscal et médiocre

La désertion, un mal du ive siècle

Chapitre IV – Les effectifs de l’armée romaine à la fin de l’empire

Les effectifs sous la Tétrarchie

Une nouvelle armée romaine après 325

Nouveau format des unités au ive siècle

Effectifs opérationnels : brigades légères de 2 000 à 5 000 hommes

Armées en campagne au ive siècle : de 8 000 à 83 000 hommes

Au ve siècle : effondrement de l’armée occidentale

Apparition de milices d’autodéfense en Occident

L’armée d’Orient tient bon

Les effectifs des barbares

Chapitre V – Le choix d’une défense mobile

Le temps des hésitations 251-305

La double stratégie de Constantin 306-337

Après 337, une défense en avant occasionnelle

Maintien et validité de la défense en profondeur

La division du commandement

Chapitre VI – Étude de cas : la frontière du Rhin vers 388

Le contexte historico-militaire romain

Division structurelle du commandement romain

Stratégie barbare : la razzia

Infériorité tactique des Francs

Représailles et défaite romaines en terre barbare

Revanche romaine

Chapitre VII – Surveillance des frontières

Les gardes-frontière

De nouvelles fortifications frontalières

Les frontières terrestres : barrages filtrants sur le Rhin

… et filtrage : en Afrique du Nord

Flottilles fluviales du Rhin et du Danube

Frontières maritimes de la Manche

Chapitre VIII – La défense de l’intérieur

La défense de l’intérieur : protection des campagnes

Une gendarmerie barbare

Frontières intérieures

L’autodéfense urbaine

Villes impériales

Chapitre IX – Maîtrise navale de la Méditerranée

Déprofessionnalisation de la marine romaine

L’ascension des Vandales en Méditerranée 429-477

Chapitre X – Logistique

L’hébergement des troupes

Préparation logistique d’une campagne

Les campements

Disposition de l’armée en marche et franchissement des coupures

Chapitre XI – Renseignement

Cartographie

Renseignements généraux

Renseignement stratégique

Éclairage de l’armée

Interrogatoire

Interprétation du renseignement

Chapitre XII – Attaque et défense des places

Munition d’une place forte

L’artillerie

Machines d’approche et de rupture

Terrasses et mines d’assaut

Armes spécifiques des assiégés

Les Germains : primitifs mais efficaces

Le coût d’un siège en règle

Chapitre XIII – Un renouveau de la cavalerie ?

Réorganisation de la cavalerie

Développement de la cavalerie lourde

La cavalerie au combat

Chapitre XIV – Un déclin de l’infanterie ?

L’infanterie rangée en bataille

Les armes de jet

Supériorité tactique des Romains en combat rapproché

Adaptation à la guérilla barbare

Chapitre XV – Une grande bataille rangée :le choc d’andrinople (378)

L’incontrôlable mutinerie gothique (376-377)

La campagne de 378

Les forces en présence

Les phases de la bataille

Les pertes romaines

Les erreurs du commandement romain

Épilogue

Chapitre XVI – Barbarisation de l’armée

Barbarisation progressive de l’armée jusqu’en 376

Influences réciproques

Barbarisation massive de l’armée 376-382

Réactions antigermaniques en Orient et en Occident 400-408

Les fédérés et la désintégration de l’État romain d’Occident 408-476

Collaboration des élites avec les Barbares

Des soldats romains au service des Barbares

L’empire romain d’Orient et les royaumes barbares en 511

Chapitre XVII – Les champs catalauniques (20 juin 451) : une bataille entre Fédérés

La pauvreté des sources

La grande stratégie d’Attila

Les forces en présence

La campagne de 451

Le site de la bataille

Les phases de la bataille (20 juin 451)

Épilogue

Conclusion

Abréviations

Bibliographie

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France-Angleterre. Les relations militaires de 1945 à 1962

Sabine Marie Decup

 

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Depuis la victoire d’Hastings en 1066, et les problèmes liés à la succession de Guillaume le Conquérant, les relations entre la France et le Royaume-Uni n’ont pas toujours été empreintes de cordialité. Certaines rancunes, tenaces, subsistent encore. Pourtant, à l’heure de la construction de l’Europe et surtout d’une Europe de la défense, imposée par les changements géostratégiques, s’imposait une étude approfondie de ces questions.

Les relations militaires franco-britanniques reflètent, certes, le caractère orageux des liens entre les deux pays, mais prouvent également qu’a existé, entre la fin de la Seconde Guerre mondiale et les accords de Nassau, une volonté évidente de construire un front cohérent face à la menace communiste.

La collaboration actuelle entre les armées et les industries de défense des deux nations ne peut se comprendre qu’à la lumière de leur coopération passée. Rien dans ces rapports n’a été laissé de côté : tous les théâtres d’opérations ont été concernés, toutes les armes, toutes les sociétés d’armement ont participé de ce désir de construction.

Les ambiguïtés politiques de cette période troublée ne sont pas toujours parvenues à nuire à un consensus militaire, bien réel au cours de la Guerre froide. Il devenait dès lors nécessaire d’apporter la preuve de l’existence d’un appui du Royaume-Uni à la politique de défense de la France jusque dans les années cinquante, même si un renversement de cette tendance s’est produit par la suite.

Docteur en histoire, diplômée du King’s College de Londres – Master of Art in War Studies –, Sabine Marie Decup travaille aujourd’hui pour les industries de défense. Elle a participé à plusieurs colloques internationaux en France et à l’étranger, a publié divers articles et collaboré à la rédaction d’ouvrages collectifs traitant des questions militaires contemporaines.

Table des matières

PRÉFACE

INTRODUCTION

LISTE DES SIGLES ET DES ABRÉVIATIONS

Le legs historique

Problématique

MÉTHODOLOGIES, SOURCES ET DIFFICULTÉS

PREMIÈRE PARTIE – CRISES ET EMBELLIE : L’EXTRÊME ET LE PROCHE-ORIENT

CHAPITRE PREMIER – « UN PARFUM D’ORIENT ET DE FIN

D’EMPIRE »

I – Les origines de la situation au Levant

A. Les accords Lyttleton-de Gaulle, 25 juillet 1941

B. Novembre 1943, de nouvelles tensions

C. D’incompréhensions en maladresses

II – De la Concorde aux compromis

A. Âpres négociations

B. Les accords de décembre 1945 4

C. Consentements sans lendemain ?

III – Les difficultés techniques du retrait

A. La question des minorités

B. Les étapes du retrait

C. Multiplicité de l’aide britannique

Conclusion

CHAPITRE II – « L’HISTOIRE DU TROP PEU ET DU TROP TARD »

I – Réactions britanniques au conflit d’Indochine

A. La passation des pouvoirs

B. L’entrée dans le conflit

C. L’internationalisation du conflit et les changements militaires

II – Une coopération au plus haut niveau seulement ?

A. Les discussions d’état-major

B. Les conférences sur le renseignement

C. Le refus d’intervention directe

III – Et pourtant… une certaine aide technique

A. Armée de Terre et marine

B. L’Armée de l’Air

C. La reconnaissance photographique

Conclusion

CHAPITRE III – SUEZ : LA NOUVELLE ENTENTE CORDIALE ?

I – L’action diplomatique et les prévisions militaires

A. Les raisons de l’intervention

B. L’action diplomatique

C. La révision des plans : de l’opération 700…

D. … à Mousquetaire révisé

II – L’intervention

A. Le commandement et les forces alliées en présence

B. La supériorité aérienne alliée

C. Le débarquement

III – Le désengagement

A. Les ultimatums

B. Les étapes du départ

C. Présence française à Chypre

D. Les aléas de cette présence

Conclusion

DEUXIÈME PARTIE – PRENDRE OU LAISSER PRENDRE : LE CONTINENT AFRICAIN

CHAPITRE PREMIER – « FESTINA LENTE » OU LES PRÉMICES D’UNE COOPÉRATION

I – Le rôle de l’Afrique pendant la Seconde Guerre mondiale

A. L’effort de guerre de l’empire

B. Le débarquement en Afrique du Nord

C. La conférence de Brazzaville

II – Genèse d’une politique stratégique

A. Les prémices de la Guerre froide en Afrique

B. La voie vers la rupture

C. Le Moyen-Orient dans la Guerre froide

III – Ébauches de négociations

A. Face à face des théories

B. Réflexions militaires

C. La participation française

Conclusion

CHAPITRE II – PRÉLUDE OU ABOUTISSEMENT ?

I – La conférence de Nairobi

A. De l’océan Indien à l’Afrique

B. Préparation et déroulement de la conférence

C. D’une conférence à l’autre

II – La conférence de Dakar

A. Le Moyen-Orient remis en question

B. Développement et progrès

C. Les grands axes de réflexion

III – Vers la fin du processus

A. Les conférences de second ordre

B. La question de Fort Lamy

C. L’abandon final

Conclusion

CHAPITRE III – ENTRE MORALE ET INTÉRÊT

I – Une attitude inconsistante

A. La révolte Mau-Mau

B. La question du Fezzan

C. « Négligences » britanniques

II. Les intérêts britanniques

A. La guerre de guérilla

B. Les hélicoptères

C. Les échanges au pair

III. Le putsch

A. Les origines

B. La volonté d’action britannique

C. Les raisons de l’aide britannique

Conclusion

TROISIÈME PARTIE – LE DROIT À LA CONTRADICTION : LE THÉÂTRE EUROPÉEN

CHAPITRE PREMIER – Une DIFFICILE REPRISE

I – Les accords Hartemann-Dickson

A. Les fondements de ces accords

B. Descriptif des accords

C. Une transition difficile

II – Les accords Nomy-West et l’arrangement financier

A. Les accords Nomy-West

B. Les extensions du traité

C. L’accord financier

III – Le traité de Dunkerque : point de départ ou

aboutissement ?

A. Les freins à sa réalisation

B. Une pierre angulaire

C. Le chemin vers Bruxelles

Conclusion 4

CHAPITRE II – DE RÈGLEMENTS EN NÉGOCIATIONS

I – Les accords de fin de guerre

A. L’accord de Tanger

B. Présence militaire britannique en France

C. Le retrait des troupes britanniques

II – L’accord de transit aérien

A. Premières négociations

B. Un aboutissement réciproque ?

C. Des modifications à la disparition

III – Le démantèlement des bases allemandes en France

A. Destructions initiales : les sites terrestres

B. Les sites maritimes

C. Apologie d’une solution extrême ?

Conclusion

CHAPITRE III – UN FOISONNEMENT NOUVEAU

I – Échanges de méthodes

A. Les moyens humains

B. La loi de programme aérien et ses conséquences sur l’industrie française

C. De nouvelles études

D. Un renversement des demandes

II – Les derniers grands programmes de collaboration

A. Les accords Crépin-Cockburn

B. Mise en place des grands domaines de recherche

et de développement

C. Les grands domaines des groupes de travail

III – Le nucléaire

A. La doctrine

B. Projet de coopération

C. Les accords de Nassau

Conclusion

SOURCES ET BIBLIOGRAPHIE

I. Archives britanniques

II. Archives militaires françaises

III – Archives parlementaires

IV. Archives coloniales

V – Correspondance échangée

SOURCES IMPRIMÉES

I. Mémoires et biographies

II – Ouvrages et articles de circonstance

BIBLIOGRAPHIE DE RECHERCHE

INDEX

TABLE DES TABLEAUX

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Préface

Pendant la Grande Guerre, l’opinion française était imprégnée de deux idées-force. Cette guerre était une guerre française et la France, patrie du roi, se battait pour le Droit. Depuis 80 ans, l’opinion n’a que peu changé en France sur ces deux points ou, tout au moins, les changements sont forts récents, résultat à la fois des bouleversements qu’ont connus les rapports franco-allemands et des travaux des historiens pour sortir des mythes et retrouver la réalité. La réalité est que ce fut, non pas une guerre franco-allemande, mais une guerre européenne, une guerre entre les nations européennes, et que si la France y a joué un rôle particulier dans la mesure où les combats, du moins à l’ouest, se sont déroulés, pour l’essentiel, sur son territoire, chaque nation européenne, dans quelque camp qu’elle ait été, a trouvé, dans sa conscience nationale, des raisons tout à fait légitimes de se battre jusqu’au bout. C’est en définitive le conflit qui dans l’histoire a fait le plus appel aux sentiments nationaux.

Cette attitude explique facilement que pendant longtemps l’opinion et l’historiographie française se sont très largement désintéressées des autres, y compris de ceux qui se sont battus dans son camp, au simple motif qu’il était considéré comme parfaitement normal de combattre aux côtés de la patrie du Droit. Cette indifférence, relative malgré tout pour les pays importants, a été caricaturale pour les petits pays. À l’heure actuelle, combien de Français savent que le Portugal a envoyé des soldats combattre à leurs côtés. Il serait d’ailleurs cruel pour les historiens français d’établir la liste d’ouvrages consacrés à la Grande Guerre, de qualité par ailleurs, où le Portugal n’est même pas mentionné, où est totalement passé sous silence que nombre de soldats portugais y ont perdu la vie. Quant la participation à la guerre du Portugal est mentionnée, le commentaire se contente de remarquer qu’il s’agit « d’un vieil allié de l’Angleterre », sous-entendu une sorte de prolongement de l’Angleterre.

La défaillance des historiens français avait pourtant une autre cause, cachée. En fait, ils ne savaient comment en parler. Pour l’historien français de la Grande Guerre, la participation du Portugal était au fond mystérieuse. Au lieu de rester neutre comme l’Espagne, dans un conflit qui ne le concernait guère, il multiplie les gestes de mauvaise volonté envers l’Allemagne jusqu’au moment où, en 1916, cette dernière prend l’initiative de lui déclarer la guerre. Plus étonnant encore, le Portugal, comme bien d’autres belligérants « déclarés », ceux d’Amérique latine en particulier, aurait pu se contenter d’un rôle passif. Il n’en fut rien et les malheureuses unités portugaises, installées au nord du dispositif britannique, dans la « boue » des Flandres, subirent le 9 avril 1918 le terrible choc de la deuxième offensive allemande de ce printemps. C’est la bataille de la Lys.

Comment expliquer tout cela, d’autant plus que la façon dont cette participation était décrite au Portugal ne facilitait pas les choses ? Après la guerre, cette participation au conflit est devenue, en effet, au Portugal un objet d’exaltation patriotique et nationale, le culte du souvenir de la guerre, la commémoration de l’héroïsme des soldats portugais, furent aussi bien le fait des manuels scolaires que des ex-voto dans les Églises.

Pour le lecteur français, il a fallu attendre les remarquables travaux de Nuno Severiano Teixeira pour comprendre, non seulement pourquoi le Portugal s’était engagé dans la guerre, mais aussi pourquoi le tableau qui en fut peint après la guerre ne correspondait guère à ce que fut la réalité.

Dans une analyse intégrant étroitement politique extérieure et politique intérieure, Nuno Severiano Teixeira a fait surgir cette réalité. Après la Révolution de 1910 qui établit la République au Portugal, à travers des péripéties complexe la grande question pour ses partisans fut d’en asseoir la légitimité, et n’y avait-il pas meilleure assise de la légitimité que de pouvoir lier la République à une grande cause nationale ? Cette cause nationale, ce fut la guerre dans laquelle le Portugal pouvait affirmer sa personnalité. La difficulté était qu’il n’était pas possible, dans un premier temps du moins, de s’appuyer sur un consensus national. Une grande partie de la population, rurale et catholique, la majorité probablement, était étrangère à la république, et évidemment étrangère au principe national que les Républicains voulaient affirmer. Il est d’ailleurs apparemment paradoxal de constater qu’en Italie, c’était une minorité nationaliste de droite qui entraîna le pays dans la guerre, au Portugal, ce fut une minorité démocrate de gauche qui joua ce rôle¼ Identité et spécificité des nations européennes¼

On pourrait s’étonner que l’ouvrage de Nuno Severiano Teixeira s’arrête au moment où la guerre commence. Certes, la description du Portugal dans la guerre s’impose aussi, ne serait-ce que pour prolonger et confirmer les analyses précédentes, mais la magnifique démonstration est déjà faite. Le jour où le Portugal est entré dans la guerre, tout était dit ou presque. Les Républicains portugais, et parmi eux les plus avancés, même s’ils n’étaient suivis que par une fraction minoritaire de la population du pays, avaient compris que la nation portugaise, telle qu’ils la concevaient, ne pouvait exister que dans un grand combat national. Ce n’est pas pour rien que, plus tard, ce fut tout la nation qui fut amenée à communier dans le souvenir de la guerre, même si une grande partie d’entre elle y avait été indifférente ou hostile sur le moment.

Il n’y a pas de plus grand mérite pour un historien que de faire émerger une réalité souvent obscurcie, ou pis encore effacée, par la gangue des événements. Au surplus, Nuno Severiano Teixeira le fait de façon passionnante. C’est un livre dans lequel on sent vivre un pays, mais plus encore, il a su remarquablement montrer que le Portugal, longtemps considéré comme un peu en marge de l’Europe, s’est en fait parfaitement inséré dans le grand courant de la pensée européenne du XIXe siècle, cette pensée européenne inséparable de l’idée de nation¼ pour le meilleur, ou pour le pire.

 

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